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Habitat - "Droit au logement : rappel à la loi"

Le sixième rapport annuel du comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable (Dalo) ressemble étrangement à son édition précédente (voir notre article ci-contre du 30 novembre 2011). A défaut d'évolution notable dans les constats, le comité de suivi, présidé par Xavier Emmanuelli, s'efforce de retenir l'attention du lecteur en pratiquant l'art du titre. Au "Monsieur le Président de la République, faisons enfin appliquer la loi Dalo !" de 2011 - un titre effectivement peu usuel pour un rapport officiel - succède ainsi, en 2012, "Droit au logement : rappel à la loi".

Des recours à la hausse, des réponses moins favorables

Le rapport commence par rappeler les chiffres du Dalo. Le nombre de recours est ainsi de 7.000 par mois, contre 6.000 un an plus tôt. L'Ile-de-France représente 59% du total, soit un léger recul par rapport à 2011 (62%). De même, la part de l'hébergement diminue légèrement : 12% des recours visent à obtenir un hébergement et 88% un logement, contre respectivement 15% et 85% il y a un an. En revanche, le taux de décisions favorables marque un net recul : 37% contre 45% en 2011. Il faut toutefois y ajouter les 7% de requérants relogés avant la tenue de la commission. A l'inverse, le taux de décisions de rejet est en hausse (55%).
Enfin, le rapport relève que "le rythme des relogements a chuté au premier semestre 2012". Les relogements représentent ainsi, sur l'ensemble de la France, 50% des décisions favorables. Mais cette proportion tombe à 33,6% en Ile-de-France. Cette situation a pour conséquence un accroissement des retards de relogement. En Ile-de-France, 27.500 ménages jugés prioritaires par les commissions de médiation sont ainsi en attente d'un relogement. En province, les retards concernent principalement le Var, les Alpes-Maritimes, la Guyane, les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse. La situation est plus mauvaise encore pour l'hébergement, puisque le taux d'application des décisions favorables prises par les commissions de médiation est seulement de 29%.

Pas d'expulsion sans offre de relogement

Au-delà de ces aspects quantitatifs qui attestent la persistance des difficultés de mise en oeuvre du Dalo, le comité de suivi s'attache à formuler des propositions d'amélioration, elles aussi récurrentes. Le rapport commence ainsi par rappeler que le non-respect du droit à l'hébergement constitue "une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale", pour reprendre la position récente du Conseil d'Etat (voir notre article ci-contre du 15 février 2012). Il formule donc plusieurs préconisations, comme le renforcement des capacités des CHRS (centres d'hébergement et de réadaptation sociale) et de l'intermédiation locative, la mise en place d'une évaluation et d'une orientation personnalisées des demandeurs, ou encore l'association des collectivités aux projets territoriaux annoncés par le gouvernement (voir notre article ci-contre du 26 novembre 2012).
Le comité de suivi rappelle aussi que "l'expulsion sans offre de relogement d'une personne reconnue prioritaire au titre du Dalo est une violation du droit au logement". "Particulièrement choqué de certaines expulsions parisiennes, qui ont conduit à la rue des familles avec enfants", il demande qu'il ne soit procédé à aucune expulsion, y compris lorsque la bonne fois de la personne est en cause, "sans que le droit inconditionnel à l'hébergement soit assuré".

Une meilleure prise en compte des priorités sociales

Le comité de suivi reprend également sa demande d'intégrer davantage les priorités sociales dans l'attribution de logements sociaux. Il propose pour cela de réécrire le cadre législatif afin de clarifier le dispositif, de mettre en oeuvre une gouvernance territoriale de l'attribution de logements dans le cadre des PLH (programmes locaux de l'habitat) et de redéfinir le rôle de l'Etat dans le processus d'attribution, en le recentrant sur sa mission de garant. Ce souci de clarification vaut aussi pour le dispositif de lutte contre l'habitat indigne, qualifié de "particulièrement complexe et peu lisible".
Dans le même esprit, le comité demande une plus grande mobilisation des logements privés, qui ne représentent aujourd'hui que 2% des relogements (dont les deux tiers dans les Bouches-du-Rhône), grâce notamment à la fixation d'objectifs annuels territorialisés.
Enfin, le comité de suivi recommande de "mettre le Dalo au coeur de l'action de l'Etat en Ile-de-France". Il renouvelle pour cela sa demande de mise en place d'une autorité organisatrice du logement, mais préconise aussi un renforcement des moyens et de la formation des commissions de médiation franciliennes. Pour finir sur une note optimiste, le rapport présente, en conclusion, un certain nombre de bonnes pratiques, qui "montrent que la loi peut être respectée".

Jean-Noël Escudié / PCA
 

 

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