Logement - Dalo : le comité de suivi juge la situation "inacceptable"
Le comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable (Dalo) - émanation du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, où siègent notamment six représentants des collectivités territoriales - a réagi à la présentation du bilan chiffré de cette mesure au 31 décembre 2011. Si le jugement sur l'exercice 2010 était plutôt positif - la loi étant "globalement appliquée sur une majeure partie du territoire" -, il n'en va pas de même pour 2011.
Appel à un plan d'urgence
Le comité constate en effet "un déficit important de mise en oeuvre qui concerne particulièrement l'Ile-de-France, où le nombre de relogements est en diminution par rapport à 2010, [et] les recours déposés en vue d'obtenir une place d'hébergement [...]". Pour le comité de suivi, "cinq ans après la promulgation de la loi, il y a là une situation inacceptable". Il estime qu'"il y a, aujourd'hui, une carence de l'Etat qui se traduit par sa condamnation par les tribunaux administratifs et le maintien de personnes dans des situations dramatiques".
Rappelant ses propositions déjà formulées à plusieurs reprises, le comité demande la mise en oeuvre "dans tout département en difficulté et en particulier en Ile-de-France, d'un plan d'urgence permettant d'assurer, dans le délai légal, le relogement des personnes désignées comme prioritaires par les commissions de médiation". Il réclame également, dans le cas particulier de l'Ile-de-France, la création d'une autorité organisatrice régionale du logement.
Le comité de suivi continue ainsi de durcir le ton à l'encontre de l'Etat et reprend, en les amplifiant, les critiques qu'il avait déjà formulées dans son cinquième rapport de suivi du Dalo en novembre dernier (voir notre article ci-contre du 30 novembre 2011). Il s'était alors attiré une virulente réplique de Benoist Apparu, le ministre délégué chargé du Logement estimant que dire que l'Etat est "hors la loi" dans l'application du Dalo "dépasse la raison" et affirmant que "nous ne réglerons pas cette question-là d'un claquement de doigts comme certains voudraient bien le croire ou le laisser à penser".
52% de rejets
Le bilan chiffré au 31 décembre 2011 montre que le nombre de recours au titre du Dalo se situe aux alentours de 6.200 par mois, soit 74.422 recours sur l'ensemble de l'année. Les demandes restent toujours aussi concentrées, puisque l'Ile-de-France totalise 62% des recours (proportion stable), Paca 12% (en hausse), Rhône-Alpes 5% et Nord-Pas-de-Calais, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon 3% chacune. Sur ce total, 13,5% des recours visent à obtenir un hébergement, proportion qui monte à 24,7% en Midi-Pyrénées, 20,9% en Rhône-Alpes et 16,2% en Ile-de-France.
En 2011, les commissions de médiation Dalo ont rendu 39% de décisions favorables et prononcé 52% de rejets. S'y ajoutent 8% de décisions "sans objet" - les demandeurs ayant été relogés avant la date de la commission - et 1% d'"autres sans objet". Cette répartition d'ensemble recouvre toutefois de très fortes disparités départementales. Les taux de décisions favorables sur les recours touchant à une demande de logement vont ainsi de 19% dans le Val-d'Oise à 55% à Paris. Les principaux motifs retenus pour les décisions favorables (une même décision pouvant viser plusieurs motifs) sont : "délai anormalement long" (38%), "dépourvu de logement" (36%), "suroccupation" (23%), "en hébergement temporaire" (18%) et "menacé d'expulsion sans relogement" (14%).
En termes de profils, les requérants sont pour 61% des Français, pour 3% des ressortissants d'autres Etats de l'Union européenne et pour 36% des ressortissants d'Etats hors UE. Les personnes isolées prédominent fortement (33% de personnes seules et 32% de personnes seules avec enfants), mais on compte également 26% de couples avec enfants et 9% de couples sans enfant.
En termes de mise en oeuvre des décisions, le bilan au 31 décembre 2011 porte essentiellement sur l'Ile-de-France. Il montre un taux de 44% de relogements effectifs parmi les personnes déclarées prioritaires. Ce chiffre recouvre toutefois de forts écarts entre départements franciliens : 30% dans le Val-de-Marne, 35% à Paris et 36% en Seine-Saint-Denis, mais 80% dans les Yvelines et 88% dans les Hauts-de-Seine.
Enfin, le bilan au 31 décembre recense 2.540 recours devant un tribunal administratif sur les décisions des commissions, dont 89% en Ile-de-France. Sur les 1.479 jugements déjà rendus à ce titre, 62,7% ont conclu à un rejet du recours, tandis que 16,1% ont donné satisfaction au requérant. Cette proportion est évidemment inverse pour les recours devant un tribunal administratif portant sur la non-application par l'Etat des décisions des commissions Dalo. En 2011, 5.648 recours ont été enregistrés à ce titre, dont 80% en Ile-de-France, 12% en Paca et dans l'Hérault et 2,8% en Guyane. Sur les 5.718 jugements de tribunaux administratifs rendus en 2011, 78,8% ont donné satisfaction au demandeur et 13,7% ont conclu à un rejet. Le bilan ne précise pas la somme totale mise à la charge de l'Etat à l'issue de ces décisions.