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Revitalisation - Déjà 1.000 emplois créés grâce à l'aide à la réindustrialisation

En un an, la nouvelle aide à la réindustrialisation a permis de créer 1.000 emplois. Soit déjà la moitié de ce que le gouvernement envisageait en trois ans. Pour tous ces projets à fort impact territorial, l'aide a surtout permis de pallier la frilosité du secteur bancaire. Mais elle se veut plus large que la "prime à la relocalisation" dont il avait été question, un phénomène qui demeure marginal.

Après un démarrage assez lent, la nouvelle aide à la réindustrialisation (ARI) semble aujourd'hui tenir ses promesses. Depuis son lancement en juillet 2010, elle a permis de soutenir 12 entreprises pour un montant de 53,7 millions d'euros sous forme d'avances remboursables, selon un premier bilan publié par Bercy. De quoi créer 1.000 emplois, soit déjà la moitié des 2.000 emplois que le gouvernement prévoyait en trois ans. Annoncée par Nicolas Sarkozy en mars 2010 suite aux Etats généraux de l'industrie parmi les 23 mesures destinées à relancer une industrie en berne, la nouvelle aide est financée dans le cadre des investissements d'avenir (grand emprunt). 200 millions d'euros ont ainsi été programmés. Elle s'adresse à des entreprises de moins de 5.000 salariés qui doivent investir au moins cinq millions d'euros et créer plus de 25 emplois en trois ans sur un territoire en difficulté. C'est la commission interministérielle d'aide à la localisation des activités (Ciala) qui instruit leurs demandes. Quant au versement de l'aide, il fait l'objet d'une convention signée entre l'entreprise et Oséo, la banque des PME.

"Sans l'aide, nous n'aurions jamais pu relocaliser nos activités" 

La fonderie Loiselet a été la première à bénéficier de l'ARI. Elle a ainsi reçu une avance remboursable de près de 6,5 millions d'euros pour relocaliser une partie de son activité en Chine à Dreux (Eure-et-Loir). C'est la moitié des 13 millions d'euros que représente la création de sa nouvelle fonderie automatisée qui devrait permettre de créer 100 emplois en trois ans. Pour Sylvain Loiselet, le PDG de l'entreprise, l'aide a été capitale. "Produire en Chine impose des stocks de sécurité très lourds et 5 à 6 semaines de bateau pour le transport. Nous avions commencé à réfléchir à monter quelque chose en Europe. Mais il est clair que sans l'aide, nous n'aurions jamais pu relocaliser nos activités", explique-t-il. "Trouver des partenaires banquiers sur un tel projet est très compliqué et difficile", déplore encore le patron de cette PME. L'aide a donc permis de pallier la défaillance d'un secteur bancaire frileux. Sont venues s'ajouter des aides des collectivités (région, département et communauté d'agglomération) sur les emplois créés, ainsi que celles du FNRT (Fonds national de revitalisation du territoire). Quant au choix de Dreux, il tient à la présence sur place d'un bâtiment disponible correspondant à ce que recherchait l'entreprise.
Sur les douze projets retenus par la Ciala depuis un an, un seul autre concerne une relocalisation. Celui de la la société Gaston Cartier Technologies qui a reçu 1,5 million de prêts pour la création de deux nouvelles lignes automatisées fabriquant des relais électriques destinés au secteur automobile, sur son site de Cluses (Haute-Savoie). De quoi augmenter sa capacité de production mais aussi relocaliser en France certains produits actuellement fabriqués au Maroc. Trente-trois emplois doivent être créés dans les trois ans.
Les dix autres projets financés correspondent à des projets de "réindustrialisation" sans qu'il y ait eu de transfert de production. Le dispositif se veut en effet plus large que la "prime à la relocalisation" voulue au départ par l'ancien ministre de l'Industrie Christian Estrosi. "L'objectif premier n'est clairement pas de favoriser les seules relocalisations mais d'avoir un vrai outil d'aide à l'investissement", insiste Yan Rovere, chef du bureau des restructurations des entreprises au ministère de l'Industrie.

Une relocalisation pour six délocalisations

En réalité, aussi marquantes soient-elles sur le public, les délocalisations sont très marginales par rapport aux flux des emplois industriels. Près de 90% des destructions d'emplois n'ont pas pour origine une délocalisation. Quant aux relocalisations, qui peuvent être favorisées par l'augmentation des coûts de transport et les hausses de salaires dans les pays émergents, elles demeurent l'exception. Ainsi, selon une étude menée par deux chercheurs de l'université de Poitiers, Liliane Bonnal et Olivier Bouga-Olga, sur la base des données de l'Observatoire de l'investissement, on compte environ "une opération de relocalisation pour six opérations de délocalisation et un emploi créé suite aux relocalisations pour près de 30 emplois détruits suite aux délocalisations". Par ailleurs, d'après l'Insee, plus de la moitié (53%) des emplois délocalisés vont en direction des pays développés, davantage donc que vers les pays en développement (47%), Chine en tête. De quoi tordre le cou à certaines idées reçues.
Bien sûr, cela n'enlève rien au problème de la désindustrialisation, bien tangible lui et mis en lumière par plusieurs rapports parlementaires ces derniers mois. Deux millions d'emplois industriels ont disparu depuis les années 1980, estime la direction générale du Trésor. Alors, plutôt que de s'attacher aux relocalisations/délocalisations, les deux chercheurs de l'université de Poitiers invitent à prendre en compte l'ensemble des investissements (créations et extensions d'usines) et des désinvestissements industriels (fermetures, réductions d'effectifs). Et leur analyse montre que toutes les régions ne seront pas logées à la même enseigne. Ils identifient ainsi cinq régions à risque : Poitou-Charentes, Champagne-Ardenne, Centre, Picardie et lle-de-France. Chez elles, la désindustrialisation progresse beaucoup plus vite que la réindustrialisation.

Amorçage

Dans ces régions en souffrance, l'ARI peut apporter une bouffée d'oxygène à un secteur qui en a grand besoin. Mais elle pèse de peu de poids par rapport aux enjeux. 1.000 emplois créés, c'est loin des 70.000 destructions enregistrées en moyenne ces dernières années (l'année 2011 semble toutefois marquer un tournant avec près de 8.000 postes supplémentaires au premier semestre). "L'ARI n'a pas vocation à redresser tout le tissu industriel, nuance Yan Rovere. Il faut surtout pouvoir accompagner de beaux projets à fort impact économique et territorial, créateurs d'emplois durables et capables de consolider des acteurs décisifs dans un secteur ou une filière. Des projets qui soulignent également les atouts du site France." C'est donc la qualité des projets et leur ancrage territorial qui sont recherchés, à l'instar de celui du spécialiste de la maroquinerie et des bracelets de montre SIS, situé à Valdahon, dans le Doubs. Son extension va créer quelque 285 emplois. Et dans tous ces projets, l'ARI a servi d'amorçage. "Sans la prise de risque de l'Etat, partagée avec l'actionnaire, les banques auraient pu renoncer", poursuit Yan Rovere.  

 

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