De Pôle emploi à France Travail, Thibaut Guilluy dresse un premier bilan devant les sénateurs
Un an après la mise en œuvre de France Travail, son directeur général, Thibaut Guilluy, a rappelé devant la commission des affaires sociales du Sénat que le chemin serait long vers le plein emploi, même si les premiers résultats enregistrés en 2024 vont dans le bon sens, estime-t-il.

© Capture vidéo Sénat/ Audition de Thibaut Guilluy devant la commission des affaire sociales
Invité le 19 mars par la commission des affaires sociales du Sénat à dresser le bilan de la première année de la mise en œuvre de France Travail, son directeur général, Thibaut Guilluy, a souligné que 2024 avait été une année "de transformation et d’expérimentation" pour l’opérateur lui-même et plus largement pour le service public de l’emploi. La loi Plein Emploi aura ainsi marqué "un réel tournant" et impulsé "un cap ambitieux" afin de mieux répondre aux besoins des territoires, a-t-il ajouté. Des territoires qui ont largement inspiré la réforme, a-t-il expliqué, rappelant "l’esprit de coconstruction" qui a été à l’œuvre. Plus largement, la réforme de France Travail a été conduite dans un contexte économique "en pleine mutation" qui "nous oblige à améliorer toujours plus le service aux demandeurs d’emploi et aux entreprises". "Nous entendons les critiques, légitimes", a expliqué le directeur général de France Travail, qui a assuré que l’opérateur travaillait à faire évoluer ses pratiques et ses outils "pour fluidifier toujours plus le marché du travail". Mais, a-t-il reconnu, "nous devons aller beaucoup plus loin".
En 2024, le taux de chômage s’est stabilisé à un niveau parmi les plus faibles de ces 40 dernières années, a rappelé Thibaut Guilluy, même si un rebond à la hausse est attendu en 2025. Le taux d’emploi qui avait connu une forte baisse sur la dernière décennie repart également à la hausse chez les jeunes (+4,2% points chez les 15/24 ans) comme chez les seniors (+20,3 points chez les 55/64 ans). Une performance qui ne doit cependant pas masquer le mouvement enregistré ces derniers mois, avec une hausse de +4% du nombre de demandeurs d’emplois de catégorie A au quatrième trimestre 2024 ainsi qu’une baisse de 7% des offres d’emplois collectées par France Travail sur la même période ; un recul qui atteint même -15% en janvier 2025, concède Thibaut Guilluy.
Plus d’un million d’inscrits en plus depuis le 1er janvier
Sur les grands axes de la réforme, le directeur général de France Travail revendique de premiers résultats encourageants en 2024. Revenant sur l’accompagnement des demandeurs d’emploi avec un objectif assumé de prise en charge rapide et adaptée, "nous avons privilégié les expérimentations", notamment vis-à-vis des bénéficiaires du RSA. Au final, 75.000 parcours rénovés ont été enregistrés dans les 49 départements engagés dans l’expérimentation. "70% ont été orientés vers une solutions socioprofessionnelle, 40% sont sortis du RSA 12 mois après leur entrée dans le parcours et 54% ont accédé à un emploi dans les 6 mois", s’est félicité Thibaut Guilluy. Depuis le 1er janvier 2025 l’inscription automatique pour toutes les personnes en recherche d’emploi à France Travail s’est généralisée, "soit plus de 1 million de personnes inscrites, dont 130.000 jeunes et 950.000 bénéficiaires du RSA". Un défi "technique et humain" sans précédent pour France Travail et ses partenaires, a tenu à souligner le dirigeant. Et "même s’il s’agit d’une modernisation de l’arrière-boutique", cela constitue "une évolution majeure pour le citoyen qui ne sera plus renvoyé de guichet en guichet" grâce à cette inscription automatique qui marque la première étape d’une orientation mieux ciblée. En janvier, 150.000 orientations ont été proposées, dont 77% par France Travail, 260.000 diagnostics ont été réalisés et plus de 95.000 contrats d’engagement jeune ont été établis. L’objectif étant d’atteindre la barre de 1,5 million de CEJ signés à horizon 2027.
"Une offre de service trop peu connue des recruteurs"
Pour 2025, a expliqué Thibaut Guilluy, France Travail entend sonner la mobilisation au profit des publics les plus fragiles "au côté des missions locales", notamment. L’opérateur souhaite également généraliser le dispositif "Avenir Pro" à destination des élèves des lycées professionnels ou encore mettre en œuvre le pacte des solidarités qui se veut "une réponse pour les personnes les plus éloignées de l’emploi" à travers l’activation de relais tels que les clubs sportifs, dont près de 10.000 ont rejoint la démarche. Un autre chantier va consister à renouer le contact avec des entreprises, dont seulement 23% ont fait appel à France Travail en 2024, pour réaliser un recrutement durable, selon Thibaut Guilluy. "Notre offre de services est trop peu connue des recruteurs", constate le DG de France Travail, qui souhaite multiplier les actions de prospection en 2025 tout en améliorant le ciblage des candidats : à ce titre, une expérimentation est menée dans une centaine d’agences France Travail de Loire-Atlantique, "Match France Travail", à travers l’utilisation d’outils numériques d’analyse des offres et d’identification des candidats. Enfin, sur le volet formation professionnelle, Thibaut Guilluy ne se satisfait pas d’un taux de retour en emploi qui ne dépasse pas 60%. "Il existe trop de formations proposées sans projet de recrutement associé" alors que l’opérateur prône le "former pour recruter".
Rappelant que 2025 devait être l’année "de l’accélération et de la consolidation", Thibaut Guilluy a précisé qu’à ce jour, plus de 250 comités locaux pour l’emploi avaient été lancés sur les 330 prévus. Des CLE dans lesquels "on n’est pas du tout passé aux travaux pratiques", sauf dans une centaine d’entre eux, mais pour lesquels "le défi majeur" reste d’être opérationnels dans les 3 ans qui viennent", a-t-il rappelé.