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Commande publique - Contrats de photocopieurs, d'assurances... : le cauchemar de l'acheteur public ?

Ecrits en caractères minuscules, beaucoup trop longs et comportant nombre de formules incompréhensibles : voilà une première définition, certes pragmatique mais pas si inexacte, des contrats d'adhésion. La plupart des acheteurs publics y sont confrontés : ainsi des contrats de photocopieurs, d'assurance, de téléphonie, etc. En général, l'acheteur a rédigé un cahier des charges, comparé les offres puis sélectionné une entreprise. Mais, lors de la signature du contrat, ce fournisseur ou prestataire lui impose ses propres conditions de vente. Celles-ci comprennent assez régulièrement des clauses contraires au Code des marchés publics - tout simplement car elles sont rédigées pour des marchés privés -, et parfois des clauses contraires au cahier des charges initial. Comment éviter les pièges de ce type de contrat ? Est-il possible de se désengager, une fois le contrat signé ? Telles ont les deux questions auxquelles Guy Jomin, ancien inspecteur de la répression des fraudes, et Daniel Maslanka, intendant en lycée, ont tenté de répondre lors d'un atelier le mardi 8 juin d'une session d'étude de l'association pour l'achat dans les services publics (Apasp).

 

Avant signature 

Quelles précautions prendre avant la signature du contrat ? D'abord, simplement... lire le contrat que l'entreprise veut faire signer à l'acheteur public. Et fuir par exemple si pour un photocopieur, le contrat impose d'utiliser les consommables de l'entreprise, sans préciser quels sont ces consommables (papier...). Mais pour pouvoir fuir, il faut avoir, systématiquement, classé les différentes offres, pour pouvoir se retourner vers l'entreprise classée deuxième et ne pas se retrouver sans fournisseur. Autre conseil donné  par les deux intervenants : aussi souvent que possible, sur les demandes de devis, indiquer que les conditions de tel CCAG s'appliqueront et faire attention que ce soit bien inscrit sur le document cosigné par les deux parties. Il est également possible d'imposer des "conditions générales d'achat", brèves, mais comportant l'essentiel, par exemple les délais de paiement. Dans tous les cas, tant que le contrat n'est pas signé, l'acheteur public peut refuser toute clause "imposée" par l'entreprise.

 

Les clauses entraînant nullité

Plus aucun contrat ne doit être à tacite reconduction : cela est contraire à l'article 16 du Code des marchés publics. La cour administrative d'appel de Bordeaux le 15 juillet 2009 a jugé qu'une telle clause rendait automatiquement le contrat nul, et donc déliait l'acheteur de toute obligation, notamment de paiement. De même, une clause disant que les "prix sont susceptibles de révision en cas d'évolution des tarifs" est contraire à l'article 18-4 du Code des marchés et entraîne la nullité du contrat.
Il y a ensuite les clauses qui peuvent être considérées comme nulles par le juge, mais qui n'entraînent pas la nullité de l'ensemble du contrat. Ainsi, que le contrat indique que tel tribunal de commerce est compétent n'est pas un problème : en cas de contentieux, le juge administratif se déclarera compétent. Une révision des prix basée sur l'indice des prix à la consommation est illégale, mais ne pose pas nécessairement d'importants problèmes pratiques.

 

Après signature : appliquer le contrat ou le résilier?

Une fois ces contrats signés, les recours sont peu nombreux : a priori, l'acheteur public a signé en toute connaissance de cause et pas sous la contrainte. Il est donc tenu d'exécuter le contrat jusqu'à son terme. Il faut donc bien réfléchir au bilan coût-avantages d'une rupture anticipée. On peut résilier pour motif d'intérêt général, mais le contentieux indemnitaire ne manquera pas de suivre cette décision. Une fois signées, des clauses illégales (par exemple un délai de paiement de 10 jours avec intérêts moratoires ensuite) doivent être respectées jusqu'à une éventuelle décision du juge.


Hélène Lemesle