Congrès des maires - Communes nouvelles : les "pionniers" montrent la voie
Après le débat sur l'avenir de la commune la veille (voir ci-contre notre article du 2 juin) l'AMF proposait, en ce troisième jour du congrès, un "point" sur les communes nouvelles. L'occasion pour les élus et experts rassemblés autour de Christian Bilhac, vice-président de l'AMF et co-président du groupe de travail "communes nouvelles" de l'Association - Jérome Nury, 1er vice-président du conseil départemental de l'Orne, maire de Tinchebray, la sénatrice Françoise Gatel, auteur avec Christian Manable d'un rapport récent sur les communes nouvelles (voir ci-contre notre article du 19 mai 2016), et Vincent Aubelle, professeur associé - de dresser un premier bilan de ce processus de recomposition, et d'échanger avec l'auditoire sur les atouts de ce dispositif, mais aussi sur les difficultés rencontrées par les "pionniers".
Une réforme "basée sur la responsabilité des maires"
Christian Bilhac a salué une réforme intelligente car "basée sur la responsabilité des maires, et sur le volontariat". Il a rappelé que si le nombre de communes en France était passé symboliquement sous la barre des 36.000 (voir ci-contre notre article du 11 janvier 2016), il existait toujours 36.000 maires en comptant les maires délégués. Le maire de Péret a affirmé que cette loi donnait naissance à "une nouvelle organisation de la République", en permettant aux communes ainsi regroupées de continuer à fournir les services de proximité auxquels les citoyens étaient attachés. De plus, dans la mesure où la fusion des intercommunalités laisse "orphelines" certaines compétences (voir ci-contre notre article du 5 avril 2016), la commune nouvelle permet aussi aux communes qui s'en étaient dessaisies de les exercer à nouveau.
A l'instar de nombreux autres élus durant le congrès, Christian Bilhac a relativisé l'importance de l'incitation financière prévue par la loi - dont la prolongation à la fin de l'année a été annoncée par le président de la République en fin de journée -, qui ne saurait à elle seule constituer un motif d'union. Pour Françoise Gatel, c'est bien plus la perspective d'une "stabilité des conseils municipaux jusqu'en 2020", et la possibilité pour les communes associées de conserver leur identité qui ont joué un rôle incitatif.
Pas un seul, mais "317 modèles"
Vincent Aubelle a souligné que cette réforme "perturbe notre législation et notre façon de penser, en ce qu'elle interroge la construction même du territoire français". Avec 1.090 communes qui décident de se regrouper, il y a là en effet un mouvement "sans ampleur comparable depuis la Révolution." De plus, à la différence des autres textes fondateurs de la "nouvelle donne territoriale" - la loi Maptam et la loi Notr -, il s'agit d'un texte "ouvert", pas entièrement prescriptif qui de ce fait a généré "pas mal de problèmes" pratiques que l'Etat n'avait pas envisagés (voir ci-contre notre article du 18 mars 2016).
Les maires qui se sont engagés dans ce processus sont donc des "pionniers", tant il est vrai qu'il n'existe pas de "modèle" de commune nouvelle, mais autant de façons différentes de créer des communes nouvelles que de communes nouvelles. Preuve de leur diversité, si la moitié des communes nouvelles ne comportent que deux communes déléguées, la plus grande - Livarot-Pays-d'Auge - en comporte 22. 23 résultent de transformations de communautés de communes, la plus grande, Cherbourg-en-Cotentin rassemble désormais plus de 80.000 habitants, tandis qu'Issy-les-Moulineaux et Boulogne-Billancourt envisagent une telle union.
"Revitalisation du principe communal"
La commune nouvelle pose deux questions de fond, a-t-il conclu, "celle de la subsidiarité et celle de la gouvernance." Sur ce dernier point, le risque de "décrochage" d'élus de communes déléguées désormais exclus de la gouvernance, - similaire à celui relevé la veille par Alain Richard pour les intercommunalités – relève pour lui du paradoxe dans la mesure où la commune nouvelle constitue une "revitalisation du principe communal".
La question de la représentation des élus de la commune nouvelle au sein d'une intercommunalité dont les communes originelles étaient déjà membres a été également soulevée, les dispositions actuelles aboutissant à une baisse du nombre de représentants dans le cas d'un regroupement. A cette égard, il a été annoncé que la proposition de loi "tendant à permettre le maintien des communes associées, sous forme de communes déléguées, en cas de création d’une commune nouvelle", du sénateur Bruno Sido (voir ci-contre notre article du 14 mars 2016), désormais modifiée par l'Assemblée nationale et de retour au Sénat en deuxième lecture, prévoyait le maintien d'un mode de calcul plus favorable jusqu'en 2020. Sur ces questions, comme sur les questions de fiscalité, l'AMF - qui a également évoqué le rôle de Mairie-conseils - se veut aux côtés des communes qui envisagent de se regrouper.