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Handicap - Baromètre accessibilité de l'APF : le verre à moitié vide ou à moitié plein ?

C'est désormais une référence incontournable en matière de mesure de l'accessibilité urbaine : l'Association des paralysés de France (APF) publie la cinquième édition de son baromètre sur l'accessibilité des chefs-lieux de département.
Mais, cette année, le discours de l'association est pour le moins ambivalent. D'un côté, la couverture du document annonce un "avis de tempête" et dénonce "le retard pris dans la mise en accessibilité des 96 chefs-lieux départementaux", jugé "plus que préoccupant". Proximité des municipales oblige, l'APF demande également "que cet enjeu primordial soit inscrit dans les programmes des candidats aux élections municipales à venir". L'association feint également de s'interroger : "Comment les villes vont-elle pouvoir combler toutes ces lacunes en quelques mois, alors qu'elles n'ont pas réussi à mettre en œuvre ces chantiers depuis 1975, date de la première loi sur l'accessibilité ?"
Mais, de l'autre côté, l'édition 2013 du baromètre de l'APF relève "une hausse de la moyenne générale" de ces 96 chefs-lieux. Cette progression est d'ailleurs constante depuis la création du baromètre. La note moyenne nationale est ainsi passée de 10,6 en 2009 à 11,6 en 2010, 12 en 2011, 13,04 en 2012 et 14,14 en 2013. Loin de se réjouir de cette progression significative, l'APF estime qu'"une moyenne de 14,14 à quelques mois de l'échéance finale est un grave échec de la politique de mise en accessibilité de la France ! D'autant plus que l'obligation d'accessibilité date de 1975 et non pas de 2005 ! Qu'ont fait les villes pendant 39 ans en matière d'accessibilité ?"

Des écarts importants

Il subsiste en outre des écarts importants. C'est le cas, bien sûr, entre le premier du classement (Grenoble avec une note moyenne de 18,7 sur 20) et le dernier (Digne-les-Bains, 10,2), qui n'est pas vraiment servi par sa topographie. Au passage, on observera qu'aucun des chefs-lieux ne se situe désormais sous la note de 10, ce qui était encore le cas de quatre villes en 2012.
En termes de typologie de locaux, les centres commerciaux continuent de se distinguer, avec une note moyenne de 8,89 sur 10. D'autres catégories de bâtiments progressent sensiblement, comme les bureaux de poste (7,59), les piscines (qui passent de 6,89 à 7,35) et les cinémas (de 6,58 à 7,14). En revanche, les résultats sont toujours aussi mauvais pour les commerces de proximité et les cabinets médicaux et paramédicaux, ce qui pose le problème de l'accès aux soins des personnes handicapées. Même si l'accessibilité à 100% ne sera sans doute pas atteinte avant l'échéance du 1er janvier 2015, les résultats sont également plutôt bons pour les bâtiments publics : 93,75% des mairies principales seraient accessibles (contre 84% en 2012), de même que 94,79% des théâtres et 91,07% des stades.
En termes de localisations géographiques, le baromètre montre que certaines villes ont fait preuve d'un fort dynamisme en 2013, en améliorant nettement leur note moyenne, à l'image de Poitiers et Mont-de-Marsan (+4,5 points par rapport à 2012), Dijon (+3,9), Nîmes (+3,6), Besançon (+2,9), Laval et Saint-Etienne (+2,7). A l'inverse, une douzaine de villes ont fait du sur-place l'an dernier, comme Avignon, La Rochelle, Toulon, Bar-le-Duc, Aurillac, Vannes et Évry.

Non aux AD'AP

Mais, au-delà de ces contrastes, la vraie raison de la colère de l'APF réside dans les AD'AP - les agendas d'accessibilité programmée -, mis en place à la suite du rapport de Claire-Lise Campion en mars 2013 (voir notre article ci-contre du 4 mars 2013). Malgré quelques points positifs (instauration de sanctions financières, possibilité d'annuler un marché public en cas d'acquisition de matériel roulant inaccessible...), les AD'AP se voient reprocher le "délai supplémentaire inacceptable de 3 à 9 ans" dans la mise en œuvre de l'accessibilité. Ainsi que le résume le document de l'APF : "Accessibilité en France : 40 ans d'échec et bientôt 9 de plus avec les AD'AP ! "

Adapt : autre baromètre, autre interpellation des élus locaux

L'Adapt, l'Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées, publiait l'été dernier les résultats d'une enquête menée par OpinionWay auprès des Français et des maires. Selon ce baromètre, un Français sur deux estime que sa commune est "en retard" sur ce sujet de l'insertion des handicapés. Et un maire sur trois admet le retard de sa propre collectivité. Avec une fourchette très large de situations… Ainsi, 8% des communes, le plus souvent des petites communes de moins de 5.000 habitants, reconnaissent n'avoir encore lancé aucun aménagement, tandis que parmi les grandes villes de plus de 10.000 habitants, près d'une sur deux estime même être en avance sur ses obligations.
Plus des trois quarts des maires interrogés estiment qu'il est "difficile de mener une politique en faveur des personnes en situation de handicap" et ce, pour de multiples raisons : budgets trop limités (80%), manque d'information sur les structures et les aides existantes (45%), manque de pédagogie sur les problématiques liées au handicap (35%).
Tout en rappelant qu'elle met précisément à disposition des collectivités locales "son expérience et son savoir-faire pour les accompagner dans l'élaboration et le déploiement de leur politique d'insertion", l'Adapt prend aujourd'hui les devants et vient d'interpeller les élus locaux et les candidats aux municipales : elle leur adresse "14 engagements permettant à la personne handicapée de vivre dans sa commune une vie de citoyen à part entière". Et ce, qu'il s'agisse de culture, de sport, d'éducation, d'emploi, de logement, de transports ou de vie politique. Parmi ces 14 propositions, outre les plus évidentes sur l'accessibilité, la scolarisation ou encore l'embauche de personnes handicapées au sein des services municipaux, on trouve des préconisations plus spécifiques, telles que : "Aborder dès que possible les questions du handicap dans les délibérations du conseil municipal", "Renforcer l’articulation entre le centre communal d’action sociale (CCAS) et la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH)".
Cette campagne à destination des maires et des candidats est à retrouver sur www.ladapt.net. Claire Mallet

 

 

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