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Economie / Commande publique - Baisse des dotations, nouvelle donne territoriale : les EPL ne connaissent pas la crise

Jacques Chiron, sénateur de l'Isère et président de la Fédération des entreprises publiques locales (EPL), a présenté, mercredi 25 mai, les résultats d'une enquête sur "Les EPL et la commande publique", réalisée auprès des adhérents de la Fédération. Si l'enjeu principal de cette étude était de s'assurer que les EPL ne "siphonnaient" pas une partie importante de la commande publique, aux dépens du secteur privé, les résultats démontrent aussi la vitalité des EPL en cette période de baisse des dotations aux collectivités, et donnent un nouvel indice de la résistance de l'investissement public au niveau du bloc communal.

Jacques Chiron, président de la Fédération des Entreprises publiques locales (EPL) et sénateur de l'Isère, a présenté mercredi 25 mai les résultats d'une enquête menée fin 2015 auprès d'un échantillon représentatif des EPL, sur le thème "Les EPL et la commande publique", et ce dans un contexte de baisse sensible de l'investissement des collectivités, évaluée à plus de 17% sur deux ans dans la récente note de conjoncture de la Banque postale. En valeur, la baisse devrait atteindre  plus de 9 milliards d'euros sur cette période (voir ci-contre notre article du 12 mai).
La Fédération rappelle que cette rétractation est la conséquence de plusieurs facteurs : la persistance de la crise qui dure depuis 2008, l'effort budgétaire de 50 milliards d'euros décidé par l'État dont les collectivités locales sont parties prenantes, la modification de la donne territoriale par une série de réformes (loi Maptam, loi Notr, etc.) et la succession d'élections locales (municipales, départementales, régionales) qui ont ralenti les investissements des collectivités.
Alors que les 1.200 EPL réalisent un chiffre d'affaires annuel moyen de 12,1 milliards d'euros, les objectifs de l'enquête étaient triples : évaluer le volume de marchés conclus entre les acteurs publics locaux (dont les collectivités locales) et les EPL, dresser les perspectives 2016 des EPL quant à l'attribution de nouveaux marchés, évaluer le volume de marchés conclus entre les EPL et leurs prestataires.

7% du volume des marchés émis par les collectivités locales

Il ressort de l'enquête que 11.100 contrats de commande publique sont attribués aux EPL. 80% des EPL sont titulaires d'au moins un contrat de commande publique émis par des collectivités locales (les 20% restants concernent des EPL dont la mission exclusive est la gestion de patrimoine pour leur propre compte ou pour le compte de tiers), 6.700 marchés sont exécutés directement par les EPL pour un volume de 5,6 milliards d'euros. Au final, les EPL concentrent 7% du volume des marchés émis par les collectivités locales en 2015 (soit 1,9 milliard d'euros de nouveaux marchés en 2015).
En moyenne, chaque EPL détient 15 marchés attribués mais, ce chiffre s'élève à presque 23 pour les sociétés d'aménagement. Par ailleurs, les EPL implantées en Île-de-France nouent, avec 22 marchés en moyenne, 1,5 fois plus de contrats que les EPL des autres régions métropolitaines et ultramarines. Les marchés émis par les donneurs d'ordre au bénéfice des EPL portent sur une durée moyenne de 4 ans, même si, là encore, des disparités importantes existent. Dans le secteur de l'énergie, par exemple, 36% des marchés sont passés pour une durée minimale de 5 ans, et fréquemment contractés pour une période de 20 ans.

Des marchés obtenus auprès du bloc communal et des régions

En volume, les marchés obtenus par les EPL proviennent à égalité du bloc communal (47%) et des régions (45%). Pour les auteurs de l'étude, cette donnée "confirme le rôle privilégié des communes aux côtés des EPL, ainsi que la montée en puissance de l'échelon intercommunal", qui émet 20% des marchés en moyenne. Celle-ci résulte de deux facteurs : le renforcement récent des compétences des intercommunalités et leur investissement croissant dans la gouvernance des EPL. Si 71% des EPL contractent avec le bloc communal, les régions concentrent 9% des contrats mais 45% du volume des marchés (soit 2,5 milliards d'euros), du fait, entre autres, de leur forte implication dans le développement des territoires d'outre-mer, la construction et la gestion des lycées.

"Bons donneurs d'ordre" aux entreprises locales

D'après l'étude, en 2015, les marchés émis par les EPL ont permis l'intervention de 35.000 entreprises pour un montant total de 3,7 milliards d'euros. Par ailleurs, 17.000 entreprises exercent des prestations au bénéfice des Sem immobilières pour un montant évalué à 1,8 milliard d'euros, avec un "effet d'entraînement majeur" des 200 EPL de ce secteur sur les économies locales. Les EPL d'aménagement participent pour leur part au dynamisme économique local avec 1,3 milliard de commande publique bénéficiant à 12.000 entreprises attributaires.
 "Les EPL continuent donc de soutenir activement l'économie et les entreprises en créant de la richesse et en jouant pleinement leur rôle contra-cyclique, il s'agit d'un fait important à rappeler à quelques jours du congrès des maires", a insisté Jacques Chiron, qui a souligné que les EPL se voulaient à la fois "au service des collectivités" et  de "bons donneurs d'ordre" aux entreprises locales. Pour la Fédération, ce résultat permet donc de "tordre le cou"  aux critiques émanant du secteur privé à l'encontre des EPL.

Les SPL montent en puissance

Les sociétés publiques locales (SPL, statut créé en 2010 avec un actionnariat 100% public) contribuent en proportion de leur poids aussi activement au développement local que les Sem. En 2015, elles ont conclu des marchés pour un montant de 700 millions d'euros, - les Sem pour 3 milliards d'euros -, soit 19% des marchés alors qu'elles représentent 20% du total des EPL.
La présentation de l'étude a permis à la Fédération de faire le point sur l'essor des SPL. Depuis la loi  de 2010, 250 SPL ont été créées, soit environ 40 par an, 210 étant des créations ex nihilo correspondant à de nouveaux métiers, tandis que 40 résultaient de transformations de Sem. Les auteurs constatent une montée en puissance des SPL très forte, souvent dans le cadre de GIE avec des Sem d'aménagement. La SPL, soulignent les auteurs, permet l'association des élus, la multiplication des acteurs locaux, et présente plus de sécurité qu'une simple Sem d'aménagement. "Outil de modernisation de l'action publique locale", les SPL constituent aussi, pour la Fédération, le principal vecteur du "partenariat public public" (voir notre article du 3 septembre 2014 ci-contre). Les collectivités passent en outre par la SPL pour rationaliser ou mutualiser des services, un besoin accentué par la "nouvelle donne" territoriale.

1,7 milliard d'euros de volume de marchés captés en 2016

Les dirigeants d'EPL envisagent un quasi-maintien du volume de marchés captés en 2016 : 1,7 milliard d'euros, soit 200 millions d'euros de moins qu'en 2015. Cela correspond à un "ralentissement prévisible des investissements des collectivités locales et au manque de visibilité de certaines EPL sur les projets à venir". Au total, l'effet de la recomposition territoriale et de la baisse des dotations est modéré sur les EPL, note Jacques Chiron, qui ne partage pas le sentiment de certaines associations d'élus locaux sur l'importance de la baisse des investissements pour l'année en cours. "Nos EPL n'ont pas baissé leur dynamisme, même si nos Sem départementales s'interrogent sur un changement de périmètre d'aménagement."
Le second volet de l'étude, à paraître d'ici la fin de l'année, identifiera la contribution spécifique des EPL au développement local, notamment la création d'emploi et de valeur ajoutée à l'échelle nationale et régionale. Une série de rencontres est prévue prochainement avec les représentants des acteurs privés, ainsi qu'une audition par les commissions des affaires économiques de l'Assemblée nationale et du Sénat, afin de leur présenter les résultats de l'enquête.

Laurent Terrade

La Fédération des EPL "globalement satisfaite" de la réforme de la commande publique

La Fédération, dans un avis adopté par son conseil d'administration le 31 mars, se réjouit en particulier du maintien d'un droit distinct pour les marchés publics et les concessions, et de la reconnaissance, en droit positif, du "in house" ce qui "consacre" la loi sur les EPL. La nouvelle législation reconnaît également l'existence du contrôle analogue conjoint ou indirect en "in house", ce qui rend caduc  l'arrêt "Marsannay" du Conseil d'Etat qui "remettait en cause l'existence de la moitié des SPL déja créées".

L. T.

 

 

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