Commande publique - Ordonnance et décret Concession : une transposition fidèle de la directive
La transposition de la directive Concession du 26 février est en marche. La Direction des affaires juridiques a publié le projet d'ordonnance et de décret y afférant. Les acheteurs peuvent faire part de leurs remarques sur ces textes jusqu'au 30 septembre.
La France est l'un des seuls pays à être déjà doté d'une législation sur les délégations de service public (DSP). La directive Concession n'est donc pas réellement novatrice, bien qu'elle vise à régir l'ensemble des actes concessifs et non plus seulement les DSP. En rappelant que ces textes ont vocation à s'appliquer uniquement aux concessions d'un montant supérieur au seuil européen fixé à 5.186.000 euros HT, la loi Sapin de 1993 demeurant pour les autres.
Limitation relative de la durée en fonction de l'investissement
L'article 5 du projet de décret prévoit de fixer la durée du contrat de concession en fonction de la nature et du montant des prestations. En revanche, au-delà de cinq ans, la durée devra être déterminée par le temps escompté en vue de recouvrir les investissements effectués. Cette disposition aurait pu faire obstacle aux contrats d'affermages qui n'engendrent pas d'investissements. Le décret livre toutefois une définition large de l'investissement qui permet d'entendre comme telles les dépenses liées notamment à la logistique, au recrutement et à la formation du personnel. Les contrats d'affermage pourront donc continuer d'être conclus pour des durées excédant cinq ans.
Consécration de la hiérarchisation des critères d'attribution
Non obligatoire mais déjà largement utilisée, la pratique de la hiérarchisation des critères d'attribution est consacrée par l'article 25 du projet de décret. Cette hiérarchisation devra figurer dans l'avis concession. L'indication de la pondération des critères utilisée reste quant à elle facultative.
Consécration de l'exception in house
L'article 10 du projet d'ordonnance consacre la célèbre jurisprudence européenne Teckal de 1999 ainsi que la pratique qui en découle : les quasi-régies. Les deux conditions classiques sont reprises : l'ordonnance ne s'appliquera pas lorsque le pouvoir adjudicateur "exerce sur la personne morale concernée un contrôle analogue à celui qui l'exerce sur ses propres services" et si la personne contrôlée réalise plus de 80% de son activité au bénéfice de la personne publique concédante. Une troisième condition est introduite, revenant sur la position jurisprudentielle de la CJUE. En effet, selon un arrêt Stadt Halle de 2005, il ne pouvait y avoir de capitaux privés au sein de l'opérateur "in house". Désormais, cette hypothèse devient possible à condition que les acteurs privés ne détiennent pas de capacité de contrôle ou de blocage sur la personne contrôlée.
Cet article présente d'autres cas de quasi régies dit en cascade. Pour exemple, l'opérateur contrôlé pourra conclure une convention avec l'opérateur initialement concédant. Il pourra également s'engager avec une entité elle aussi contrôlée par le pouvoir adjudicateur.
Négociation
La négociation reste la procédure de droit commun pour les concessions au-dessus comme en dessous des seuils européens. Si aucune limite textuelle ne lui était imposée auparavant, l'article 23 du projet de décret reprend la jurisprudence délimitant cette pratique. Sans en durcir le régime, il consacre notamment l'interdiction de négocier sur l'objet du contrat, les exigences minimales de la convention ainsi que sur les critères d'attribution.
Evaluation préalable
A l'instar des marchés publics, l'évaluation du mode de réalisation du projet d'investissement est étendue aux contrats concessifs pour tout projet dont le montant excéderait 100 millions d'euros HT (article 8 du projet de décret).
L'entrée en vigueur de l'ordonnance et du décret est prévue pour le 1er avril 2016. Néanmoins, tout avenant conclu après l'entrée en vigueur du décret devra respecter les articles 34 et 35 relatifs aux modifications du contrat de concession, et ce même si le contrat initial a été conclu avant l'entrée en vigueur dudit décret.
L'Apasp
Références : Projet d'ordonnance "Concession " ; Projet de décret "Concession" ; Consultation sur les projets de textes