Après la Seine-Saint-Denis, le RSA renationalisé dans les Pyrénées-Orientales
Le département des Pyrénées-Orientales, qui connaît un taux important de pauvreté et d'allocataires du RSA, devient le deuxième – et le dernier cette année – département métropolitain à entrer dans le cadre de l'expérimentation d'une renationalisation du financement du RSA. Cela devrait générer au moins 3 millions d'euros de marges de manoeuvre supplémentaires pour le département, qui s'engage à intensifier ses actions d'insertion.
Dans un communiqué commun du 1er mars, la préfecture et le département annoncent la signature, le jour même, de la convention qui met en place la renationalisation expérimentale du RSA dans les Pyrénées-Orientales. Cette expérimentation, pour une durée de cinq ans (2022-2026), est rendue possible par l'article 43 de la loi de finances du 30 décembre 2021 pour 2022 et ses modalités ont été définies par un décret du 5 février (voir notre article du 8 février 2022). Après la Seine-Saint-Denis (voir notre article du 21 septembre 2021), les Pyrénées-Orientales deviennent ainsi le deuxième – et le dernier cette année – département métropolitain à entrer dans le cadre de l'expérimentation. Trois départements d'outre-mer (Guyane, Mayotte et La Réunion) ont également déjà fait l'objet d'une renationalisation du RSA, mais dans un cadre juridique différent.
Deux fois plus d'habitants couverts par le RSA que la moyenne nationale
Dans le cas des Pyrénées-Orientales, l'opération a été rondement menée. Le département s'est officiellement porté candidat en décembre 2021 et le Premier ministre a donné son accord dans la foulée sous réserve, selon les termes du communiqué commun, que "le département s'engage à redéployer une part significative des marges de manœuvre financières dégagées par la renationalisation dans ses politiques d'insertion, sur la base d'objectifs négociés avec l'État et retracés dans une convention". Réuni le 28 février en session extraordinaire, le conseil départemental, présidé par Hermeline Malherbe (PS), a délibéré sur la question et adopté à l'unanimité le principe de la renationalisation du RSA.
Pour expliquer sa décision, le département met en avant une proportion importante de personnes en situation de précarité au sein de sa population. Le taux de pauvreté s'élève ainsi à 20,5%, nettement au-dessus de la moyenne nationale de 14,5%. De même, le taux de chômage atteint 12,5% contre 7,9% au niveau national. Conséquence : près d'un habitant sur dix (9,8%) est couvert par le RSA, soit près du double de la moyenne nationale (5,5%). Mais le département insiste surtout sur l'écart entre le niveau de la dépense de RSA et les recettes affectées par l'État. Pour Hermeline Malherbe en effet, "il s'agit là d'un enjeu crucial pour notre institution, nos politiques publiques et les publics que le département accompagne" : "Renationaliser l'allocation, c'est redonner à l'Etat le poids de la charge de son financement. Je parle de poids car vous savez que dans nos comptes, cette dépense a atteint un montant brut de 145,3 millions d'euros en 2021 pour seulement 86,9 millions de recettes affectées par l'État. La renationalisation offre une opportunité de réparer une iniquité en attribuant des moyens supplémentaires pour permettre une remise à niveau de notre département."
La renationalisation du RSA – déduction faite de l'investissement supplémentaire dans les actions d'insertion (voir ci-dessous) – devrait dégager une marge budgétaire nette de l'ordre de 14 millions d'euros sur la période 2022-2026, soit "une capacité budgétaire nouvelle d'au moins 3 millions d'euros annuels", qui devrait être affectée au financement du programme d'investissement du département.
Le département doublera ses efforts d'insertion
La convention entre la présidente du conseil départemental et le préfet des Pyrénées-Orientales, qui met en place la renationalisation du RSA, a été signée le 1er mars, autrement dit à la date limite fixée par l'article 43 de la loi de finances pour 2022. Elle précise les modalités de la prise en charge de l'allocation par l'État, mais aussi l'engagement pris en contrepartie par le département. Conformément à l'article 43 et au décret du 5 février, ceux-ci portent sur l'intensification des actions d'insertion, qui continuent de relever de la responsabilité et du financement du département.
Ce dernier s'engage ainsi à doubler ses efforts en matière d'actions d'insertion à destination des bénéficiaires du RSA. Ceci se traduira par une hausse des crédits correspondants à hauteur de 24,7 millions d'euros sur la période 2022-2026. L'objectif est "d'accélérer l'entrée dans un parcours d'accompagnement des bénéficiaires du RSA et d'intensifier et démultiplier les actions entreprises pour leur retour vers l'activité". Pour cela, le nombre de places dans les dispositifs d'accompagnement vers l'emploi sera augmenté de 69% d'ici à 2026. Dans la convention, le département prend également des engagements en termes de résultat et notamment d'obtenir une hausse de 20 points sur le taux de bénéficiaires du RSA accompagnés, ainsi qu'une hausse identique sur le taux de sortie positive vers une formation ou un emploi.
Dans sa délibération du 28 février, le département annonce aussi qu'il compte recruter 69 personnes "pour renforcer l’accompagnement des publics, la mobilisation des acteurs locaux, et l’ingénierie nécessaire à la définition de nouveaux dispositifs". Dans leur communiqué commun, le préfet et la présidente du conseil départemental précisent que "la mise en œuvre de ces engagements exigeants, qui portent autant sur les moyens mis en œuvre que sur les résultats atteints, sera suivie conjointement par l'État et le département au cours de rencontres régulières".