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Approvisionnement local : un rapport suggère de porter le débat au niveau communautaire

"L’origine et les modes de commercialisation sont désormais pris en compte dans une grande majorité des appels d’offres émis récemment par les collectivités locales." Le ministre de l’Agriculture se félicite, dans un communiqué du 20 février, des conclusions du rapport du CGAAER (Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux) sur l’approvisionnement de proximité. Ce rapport commandé en mars 2016, touche aussi bien la restauration commerciale que la restauration collective (écoles, ministères, hôpitaux…). Un secteur qui représente 7,3 milliards d’euros par an (à parts égales entre les deux) et qui peut constituer un levier très important pour l’économie locale. Stéphane Le Foll a dévoilé les mesures proposées dans ce rapport à l’occasion de la visite de la cuisine centrale des villes de Rouen et Bois-Guillaume "qui s'approvisionnent à plus de 50% en produits de proximité et produits issus de l'agriculture biologique". Un exemple qui selon lui "démontre que des objectifs ambitieux d'approvisionnement de proximité et de qualité en restauration collective sont atteignables".

Des montants de 5% sont parfois difficilement atteints

Le sujet a fait couler beaucoup d’encre cette année avec une proposition de loi de la députée écologiste Brigitte Allain qui fixait pour la restauration collective un objectif de 40% de produits locaux dont 20% en bio. Un objectif repris dans la loi Egalité et Citoyenneté, mais qui vient d'être censuré par le Conseil constitutionnel. Sur ce point, le rapport se range du côté des sénateurs qui avaient argué que le marché ne permettrait pas de remplir de tels objectifs. Les interlocuteurs rencontrés par les rapporteurs (syndicats, grossistes, distributeurs, groupes de restauration, associations d'élus...) préfèrent "une approche progressive" à l’édiction de tels objectifs chiffrés, assurent-ils, d’autant que l’absence de définition du "local" constituerait une insécurité juridique. Selon le CGAAER cet objectif "méconnaîtrait la réalité des pratiques actuelles", sachant que des montants de 5% sont parfois difficilement atteints, "faute de disponibilité des marchandises en quantités suffisantes". "Une part obligatoire accrue d’approvisionnement local ou bio entraînerait une augmentation des prix", développe-t-il.

Le local n'est pas moins cher

D'après les chiffres de la DGCCRF, le local représenterait actuellement 10 à 15% des achats alimentaires en restauration collective. "Dans la restauration collective des ministères sociaux à Paris, les produits locaux représentent 20 à 30% de l’approvisionnement global, mais 80% du frais et 90% des fruits et légumes", précise le rapport.
Seulement, l’approvisionnement local n’est pas moins cher, le surcoût est estimé à 20% pour les produits laitiers, 30 à 40% pour les viandes et peut même aller jusqu’à 50% pour le bio.
"Le local est de ce point de vue plus facile à développer que le bio", insiste le rapport qui rappelle que la logique des marchés publics, notamment les marchés d’assistance à maîtrise d’ouvrage, tirent les prix vers le bas.
Malgré ces difficultés, les initiatives locales foisonnent. Une analyse récente menée sur 170 appels d’offres de collectivités montre que tous avaient introduit une exigence à l’égard des circuits courts et des produits locaux. Mais si dans des régions comme les Pays de la Loire ou la Bretagne la production locale est suffisamment variée pour répondre à la demande, "ailleurs, l’absence de productions locales suffisantes interdit tout développement, sauf à augmenter le rayon d’approvisionnement", comme l’a fait l’Ile-de-France.

Porter le débat au niveau communautaire

Le CGAAER recommande de favoriser le rapprochement entre l’offre et la demande, en identifiant de nouveaux producteurs et fournisseurs prêts à s’engager sur ce débouché. Il suggère aussi de compléter la boîte à outils Localim mise en ligne en octobre 2016 par un "vade mecum" sur les points de vigilance à observer dans les marchés publics d’assistance à maîtrise d’ouvrage. Un guide commun pourrait être élaboré par les différents ministères concernés et les associations d’élus (ARF, ADF, AMF) qui s’étaient fortement mobilisées sur cette question à l’été 2015, pour faire face à la crise agricole. Il serait piloté par le Conseil national de l'alimentation. Enfin, le sujet ne pourra pas faire l’économie d’un débat au niveau communautaire avec des exemptions aux règles du droit de la concurrence tenant compte des denrées périssables, des transports sous température dirigée, des cultures gastronomiques locales… Un vœu pieux alors que l'Union européenne reste allergique à toute préférence communautaire. L’entrée en vigueur (provisoire) prévue pour le mois d’avril du Ceta, le traité de libre-échange avec le Canada, adopté par le Parlement la semaine dernière ne va en tout cas pas dans cette direction.

 

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