Très haut débit - 18 milliards d'euros de fonds publics pour une couverture à 100% en 2025
La mobilisation générale pour le très haut débit est lancée ! De la secrétaire d'Etat au Développement de l'économie numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet, jusqu'au Premier ministre, François Fillon, en passant par le ministre de l'Espace rural, Michel Mercier, le gouvernement multiplie les annonces, ces dernières semaines. Point d'orgue de l'offensive de communication, le discours de Nicolas Sarkozy, qui concluait, ce 9 février, les Assises des territoires ruraux à Morée, près de Vendôme (Loir-et-Cher). Le président de la République y annonçait l'objectif que 100% des Français aient accès au très haut débit (THD) en 2025, avec un palier intermédiaire de 70% en 2020. Ce scénario s'appuie notamment sur un rapport d'étude pour le déploiement des réseaux THD sur l'ensemble du territoire, commandé à la Datar par Michel Mercier. Réalisée par le cabinet conseil en aménagement numérique Tactis avec les avocats de Seban & associés, le concours du Centre d'études techniques de l'équipement de l'Ouest et de l'Autorité de régulation (Arcep), l'étude a été mise en ligne, ce 10 février. Elle présente les différents scénarios de déploiement généralisé du très haut débit ainsi que les investissements nécessaires, et ouvre des pistes de réflexion sur les modalités de financement. Elle part du grave constat que sans appui public, seulement 25% (investissement des seuls opérateurs privés et des collectivités pionnières) à 40% (en comptant la mutualisation des réseaux en zone 2, moyennement dense, définie par l'Arcep) de la population aura accès au THD fin 2014. Pour mémoire, ce scénario "catastrophe" où plus de 60% de la population française restait exclue de la modernité, avait déjà été dressé par l'Association des régions de France et l'Avicca, en décembre 2008. Le cabinet PMP conseil avait alors estimé le coût du passage au THD à 35 milliards d'euros. "Conduire la fibre optique jusqu'à chaque habitation et entreprise coûterait 30 milliards d'euros" dont la moitié de financement public, confirme avec plus de précision la nouvelle étude. Une solution deux fois moins chère, permettrait d'atteindre 80% de la population en FTTH (fibre jusqu'au domicile) avec 6 milliards d'euros de fonds publics. Entre la solution 100% de la population couverts en FTTH et un scénario a minima délaissant 20% de la population, une hypothèse intermédiaire offre de couvrir le territoire au meilleur coût, en combinant les technologies optiques et hertziennes.
La chasse aux milliards est ouverte
100% de la population seraient couverts dont 80% en FTTH, 5% par équipement des sous répartiteurs et 15% par la téléphonie mobile de quatrième génération dite "Long term evolution" (4G/LTE). Pour ce troisième scénario, le besoin de financement public atteint 8 milliards d'euros sur un total de 18, "soit 500 millions d'euros par an sur 15 ans", prévoient les experts. Comme défendu par le ministre Michel Mercier, ce déploiement devra se faire simultanément en milieu rural et urbain, et non avec un phasage chronologique des zones les plus denses vers les plus isolées, comme craint un temps par les élus. Il reste désormais à trouver les ressources publiques nécessaires. Le soutien de l'Etat pourrait prendre différentes formes : apport de garanties d'emprunt, prêts bonifiés ou de capital pour faciliter les déploiements des opérateurs privés. "Mais ces aides devront respecter les principes de libre concurrence, édictés par Bruxelles", a prévenu le conseiller technique TIC de Michel Mercier. Un des deux milliards d'euros prévus pour les infrastructures numériques dans le cadre du grand emprunt y serait consacré. L'Etat pourrait aussi intervenir aux côtés des collectivités en participant au financement de délégations de services publics (DSP) ou de partenariats public-privé (PPP). Le second milliard serait ainsi utilisé, avec 250 millions déjà fléchés sur les solutions satellitaires. Des fonds européens Feder pourraient également être obtenus pour les projets locaux. Il reste que la pérennisation du Fonds numérique, créé dans le cadre de la loi Pintat, pose problème. Comment faire rentrer les 500 millions annuels nécessaires ? Le sénateur Hervé Maurey devrait être mandaté pour travailler sur le sujet, a annoncé le président de la Républqiue, le 9 février. Il pourra déjà s'appuyer sur l'étude de la Datar qui propose une analyse comparative de tous les mécanismes de péréquation géographique mis en œuvre en France pour l'eau, l'électricité, le gaz, les communications électroniques, etc. Un Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire (Ciadt) est également annoncé dans les prochaines semaines. Quant aux appels à projets déjà prévus pour les opérateurs et les collectivités, il devrait être ouvert à la mi-2010 pour une attribution des fonds d'ici la fin de l'année.
Luc Derriano / EVS