Fibre optique - Les collectivités rêvent d'un scénario ambitieux pour le déploiement du très haut débit
La marche est grande pour passer du haut au très haut débit : selon les estimations, il faudrait près de 35 milliards d'euros pour remplacer le réseau de distribution téléphonique en fil de cuivre par un réseau optique sur tout le territoire français. Or, à défaut d'intervention publique massive, vers 2015, seulement 1/3 des foyers français seront équipés en FTTx (fibre jusqu'au domicile ou jusqu'à l'immeuble), à savoir les foyers des zones desservies par le câble, réseau concurrent de France Télécom. Les 2/3 restants n'auront le choix qu'entre DSL et radio de nouvelle génération. En dehors de l'Ile-de-France où la proportion de foyers FTTx devrait approcher les 3/4, cette proportion descendra à 1/4. Pour éviter ce scénario de "résignation", l'Association des régions de France (ARF) a présenté, le 9 décembre à l'Assemblée nationale, les conclusions d'une étude confiée au cabinet PMP conseil, avec le soutien de la Caisse des Dépôts, et l'appui technique de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca). Dans le prolongement de la plateforme "Internet rapide pour tous", élaborée en commun par les associations de collectivités AMF-ADF-ARF-Avicca en juin dernier, ce document propose un "programme de travail 1 + 10" pour accélérer le déploiement de la fibre en France.
L'étude donne aux collectivités un éclairage de leur rôle potentiel dans le domaine. Elle identifie ensuite des évolutions souhaitables du cadre général du déploiement du très haut débit, afin d'obtenir la couverture maximale des territoires de la façon la plus pertinente économiquement. Car la pose de fourreaux par les collectivités, à l'occasion de leurs travaux de voirie, ne sera pas une réponse suffisante pour combler la nouvelle fracture numérique annoncée. Les collectivités doivent donc envisager de jouer un rôle actif dans le déploiement de réseaux FTTH (fibre optique jusqu'au domicile et à l'entreprise), ouverts aux opérateurs de façon neutre.
Un schéma directeur dans chaque territoire
"Chaque collectivité devrait à présent étudier les perspectives du très haut débit sur son territoire et se doter d'un schéma directeur de son intervention dans ce domaine", conseille l'étude. Sur plusieurs millions de foyers, les projets de collectivités pourraient ainsi être financés en misant principalement sur les recettes tirées des utilisateurs. Trois conditions sont cependant indispensables pour résoudre la difficile équation économique et technique hors des grandes agglomérations. Un mécanisme de péréquation devra être mis en place entre territoires plus ou moins denses, au plan national. Les autorités de régulation devront améliorer les conditions actuelles d'accès aux infrastructures de France Télécom et de mutualisation des nouveaux réseaux en dehors des zones les plus denses. L'opérateur historique devra, enfin, clarifier ses intentions de déploiement dans les zones de monopole naturel, afin que les collectivités puissent prendre leurs décisions d'investissement avec une meilleure visibilité. "Avec des aides publiques complémentaires de l'ordre d'un milliard d'euros par an pendant 10 ans (à part égale Etat/collectivités territoriales), les projets de collectivités pourraient apporter le FTTH à (presque) tous les Français dans la prochaine décennie", promet l'étude.
Luc Derriano / EVS
" Programme de travail 1 + 10 "
Le premier chantier, préalable aux suivants, est de renforcer des ressources nationales de soutien de l'intervention des collectivités. Ensuite ces ressources devraient se consacrer à 10 chantiers :
1/ Obtenir de l'Etat des mécanismes juridiques et financiers, de très long terme, optimisés pour réduire les coûts financiers.
2/ Faire jouer la solidarité nationale dans le financement des déploiements.
3 / Faire davantage entendre les préoccupations d'aménagement du territoire auprès des autorités de régulation, notamment pour l'accès aux infrastructures de France Télécom et les règles de mutualisation des nouveaux réseaux.
4/ Utiliser le dividende numérique pour couvrir rapidement les territoires les moins denses.
5/ Obtenir de l'Etat le droit d'intervention d'une collectivité en investisseur minoritaire, particulièrement intéressant pour les territoires denses et moyennement denses.
6 / Proposer une charte " opérateur citoyen ", pour éviter les micro-zones non couvertes dans les zones de déploiement FTTH.
7/ Peser dans les débats sur l'accès aux réseaux par les services, et sur la juste rémunération des réseaux par les fournisseurs de contenus audiovisuels.
8/ Ajuster les normes, conventions et règlements techniques concernant les déploiements FTTH.
9/ Impliquer les gestionnaires de distribution d'électricité.
10/ Faciliter l'échange d'informations entre collectivités et grands groupes construisant et exploitant les réseaux d'initiative publique.