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Fonction publique - Vers un décontingentement des heures supplémentaires dans la fonction publique

Dans une réponse publiée au Journal officiel du Sénat du 4 février 2010, le ministre du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat a annoncé qu'un projet de décret prévoyant la suppression du plafond des heures supplémentaires pour la fonction publique était actuellement "en cours de finalisation".

Actuellement, la durée légale du travail des fonctionnaires est fixée par décret à 1.607 heures par an. Ce qui ne fait pas obstacle à la réalisation d'heures supplémentaires. Rappelons que le régime des heures (ou travaux) supplémentaires diffère suivant le grade des agents. Les agents de catégorie A peuvent se voir attribuer une indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires (IFTS). Les agents de catégorie B et C, si la collectivité a mis en place un système qui permet de comptabiliser de façon exacte les heures supplémentaires réalisées (par exemple un système de badgeage), peuvent eux recevoir des "indemnités horaires pour travaux supplémentaires" (IHTS). Dans ce cas, les heures effectuées à la demande de l'autorité territoriale en dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail ne peuvent, sauf dérogations exceptionnelles, excéder 25 par mois. C'est ce plafond de 25 heures que le gouvernement pourrait supprimer.  Il modifierait en conséquence le décret n°2002-60 du 14 janvier 2002 qui l'instaure, pour, explique le ministre,  "accorder des moyens complémentaires aux administrations qui en manifestent la nécessité et offrir aux agents la possibilité d'améliorer, s'ils le souhaitent, leur pouvoir d'achat".

Rappelons qu'en principe, la réalisation d'heures supplémentaires peut donner lieu soit à un repos compensateur soit à une indemnisation. Ce choix relève du pouvoir discrétionnaire de l'autorité territoriale. S'il y a indemnisation, depuis la parution du décret n°2007-1430 du 4 octobre 2007 portant application aux agents publics de la loi du n°2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat dite loi "Tepa", les heures supplémentaires effectuées par les agents publics et comptabilisées par un système fiable de contrôle sont exonérées d'impôt sur le revenu et bénéficient d'une réduction des cotisations salariales de sécurité sociale. Une exonération qui concerne uniquement les IHTS, donc uniquement les catégories B et C (voir nos articles ci-contre).

Ce dispositif a concerné, en 2008, 174.000 agents en moyenne chaque mois (rapport annuel 2008-2009 sur la fonction publique, p.172). Ce qui signifie que 12% des agents territoriaux de catégorie B et C font des heures supplémentaires, reçoivent des IFTS et bénéficient des dispositifs Tepa. Les agents de catégorie C constituent 93% des bénéficiaires. En 2008, le nombre d'heures supplémentaires donnant lieu à exonération est en moyenne de 14 heures par mois (Bulletin statistique de la DGCL n°63, p.4) ... c'est donc cette moyenne qui pourrait augmenter si le plafond des 25 heures était supprimé.  

Bien entendu, ce nouveau décret ne devra pas avoir pour effet de remettre en cause les principes posés par la directive communautaire n°93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant l'aménagement du temps de travail, et qui vise à protéger la santé et la sécurité des travailleurs en imposant le respect de périodes minimales de repos et en limitant la durée de la semaine de travail. Actuellement, cette directive est transposée pour la fonction publique d'Etat et Territoriale par le décret n°2000-815 du 25 août 2000 qui prévoit que :

- la durée hebdomadaire du travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder ni 48 heures au cours d'une même semaine, ni 44 heures en moyenne sur une période quelconque de 12 semaines consécutives ; 
- le repos hebdomadaire, comprenant en principe le dimanche, ne peut être inférieur à 35 heures ;
- la durée quotidienne du travail ne peut excéder 10 heures ;
- les agents bénéficient d'un repos minimum quotidien de 11 heures ;
- l'amplitude maximale de la journée de travail est fixée à 12 heures ;
- aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre 6 heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes.

 

Isabelle Béguin, avocat à la Cour /Cabinet de Castelnau et Hélène Lemesle

 

RéférencesQuestion parlementaire n°06750, JO Sénat, 4 février 2010, p.245 ; décret n°2002-60 du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ; décret n°2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature.