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Une proposition de loi pour encadrer les dépenses de communication des collectivités

Jean-Pierre Grand, sénateur LR de l'Hérault, vient de déposer une proposition de loi , "visant à garantir la transparence et l’équité des dépenses de communication des collectivités territoriales et de leurs groupements". Plutôt que de tenter de limiter les dépenses de communication des collectivités, le sénateur entend plutôt instaurer davantage de transparence et mieux encadrer les actions et supports de communication.

La communication des collectivités territoriales revient régulièrement dans les préoccupations du législateur, même si cela n'a, pour l'instant, pas donné lieu à des textes significatifs, sauf pour ce qui concerne les sondages et la communication en période électorale. Jean-Pierre Grand, sénateur (LR) de l'Hérault, vient néanmoins de déposer une nouvelle proposition de loi "visant à garantir la transparence et l'équité des dépenses de communication des collectivités territoriales et de leurs groupements".

Volonté de transparence, au risque de l'inconstitutionnalité

Contrairement à des tentatives précédentes, celle-ci ne vise pas à limiter les dépenses de communication des collectivités – au demeurant assez modestes au regard de leurs autres dépenses obligatoires ou facultatives – en fixant un pourcentage du budget général à ne pas dépasser. La proposition de loi, qui comprend quatre articles, entend plutôt instaurer davantage de transparence et mieux encadrer les actions et supports de communication.
Pour assurer cette transparence, l'article Ier prévoit que les communes de plus de 100.000 habitants, les départements et les régions publient "un état récapitulatif des dépenses de communication au cours de l'exercice",  annexé au compte administratif. Cet état précise "les dépenses de création et d'impression des différents supports de communication, les frais de personnels affectés à la communication et les dépenses publicitaires par médias et par services de communication au public en ligne". Il est vrai que les dépenses de communication des collectivités sont souvent difficiles à reconstituer, soit qu'elles sont dispersées sur plusieurs lignes budgétaires, soit qu'à l'inverse elles prennent en compte des dépenses qui ne relèvent pas de la communication stricto sensu (par exemple des dépenses pour les cérémonies).
On peut cependant s'étonner que la proposition de loi n'applique pas – contrairement à ce qu'explique l'exposé des motifs – cette transparence aux intercommunalités, dont les budgets de communication ont crû fortement ces dernières années. En effet, l'article L.2121-31 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) – l'un des trois modifiés par l'article Ier – vise exclusivement les communes et ne concerne donc pas les intercommunalités.
L'article 2 est beaucoup plus sensible politiquement, dans la mesure où il touche au régime juridique de la presse. Il prévoit en effet, "pour chaque titre de publication de presse", l'obligation de produire chaque année la liste et le montant des ressources publicitaires versées par les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics locaux, les SEM et les sociétés publiques locales, ainsi que les offices publics de l'habitat. En outre, "lorsqu'une élection locale est prévue dans l'un des départements de distribution du titre, ces informations sont publiées tous les mois pendant les six mois précédant le premier tour de scrutin".
On peut avoir de sérieux doutes sur la constitutionnalité de cette disposition et il aurait été plus logique de demander aux organismes concernés de publier eux-mêmes leurs dépenses publicitaires, ce qui est d'ailleurs déjà prévu par l'article Ier pour les communes de plus de 100.000 habitants, les départements et les régions.

Influenceurs et élus anonymes

L'article 3, placé dans un chapitre de la proposition de loi intitulé "Transparence de l'activité des influenceurs" est consacré aux réseaux sociaux. Il prévoit que "toute promotion réalisée pour le compte de collectivités territoriales, de leurs établissements publics locaux ou de leurs groupements, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. Elle doit rendre clairement identifiable la personne morale pour le compte de laquelle elle est réalisée".
Le quatrième et dernier article vise l'"équité de la communication en période électorale". Il prévoit pour cela une disposition assez radicale puisqu'elle dispose qu'"à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucun support de communication et aucune campagne de promotion publicitaire des collectivités territoriales, de leurs établissements publics locaux et de leurs groupements ne peuvent mentionner les noms et prénoms d'élus des collectivités, établissements et groupements intéressés par le scrutin".
Il va donc nettement plus loin que la jurisprudence établie, au fil des élections, par le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État. Celle-ci est pourtant parvenue à un équilibre satisfaisant et globalement respecté par les élus, au demeurant, sous l'œil vigilant de leurs adversaires (d'où la part importante des recours électoraux portant sur des questions de communication).
En outre, pour aller jusqu'au bout de la logique de cet article, il aurait fallu également interdire systématiquement les photos des élus sortants dans les six mois précédant l'élection, puisque ces derniers sont généralement suffisamment connus de leurs électeurs – notamment les maires – pour qu'il ne soit pas besoin de mentionner leur nom.
Bien que la proposition de loi émane du groupe majoritaire au Sénat, son sort est néanmoins très incertain. On rappellera, par exemple, que la proposition de loi de Pierre Morel-A-L'Huissier, député (UDI, Agir et Indépendants) de la Lozère, "tendant à limiter les dépenses de communication dans le budget des collectivités territoriales" (à 0,3% du budget de la collectivité), est toujours en attente de désignation d'un rapporteur depuis le... 14 février 2008 (voir notre article ci-dessous du 1er avril 2008).

 
Références : Sénat, proposition de loi visant à garantir la transparence et l'équité des dépenses de communication des collectivités territoriales et de leurs groupements.
 

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