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Apprentissage - Un rapport juge décevants les résultats des contrats d'objectifs et de moyens

Quel est l'avenir des contrats d'objectifs et de moyens (COM) pour le développement et la modernisation de l'apprentissage, conclus entre l'Etat et les régions ? C'est la question que l'on peut se poser à la lecture du récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas). Ces contrats ont été mis en place par la loi de programmation pour la cohésion sociale de 2005 pour développer l'apprentissage. Ils s'appuient sur un levier financier constitué par la deuxième section du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage (FNDMA), avec une logique de cofinancement entre la région et l'Etat. Leurs missions : permettre la concertation et la mobilisation de tous les acteurs de l'apprentissage, dans l'optique d'atteindre les objectifs fixés en matière d'apprentissage par la loi de 2005, à savoir 500.000 apprentis à l'échéance des contrats, soit une hausse, en 2009, de 40% par rapport à 2004. Ces contrats ont été conclus dans la quasi-totalité des régions dès 2005 et pour cinq ans. Ils sont renouvelés chaque année par avenant, pour "tirer régulièrement les enseignements de leur mise en œuvre et de préciser leur contenu en fonction de l'importance des crédits alloués", précise le rapport qui vient d'être dévoilé. Leur échéance arrivant en 2010, les régions commencent à s'inquiéter. "La région Ile-de-France a signé son avenant fin novembre 2009, une procédure tout à fait normale qui a lieu chaque année depuis la création de ces COM, explique-t-on au conseil régional, après cette date, il faut voir." Lors d'un colloque sur l'apprentissage organisé le 19 janvier à Paris par l'ACFCI (Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie), Marie-Laure Meyer, conseillère régionale d'Ile-de-France, demandait à l'Etat de clarifier les moyens qui seront accordés aux régions en matière d'apprentissage, sans quoi il serait "difficile de s'engager". Le rapport de l'Igas n'est pas là pour les rassurer. S'il cite un certain nombre d'effets bénéfiques qu'auraient eu les COM sur le développement de l'apprentissage, il reste critique envers ce dispositif. Les COM "semblent avoir eu une véritable valeur ajoutée sur la dynamique de partenariat entre opérateurs, avec pour résultats des ouvertures concertées de sections d'apprentissage ou encore des actions communes pour améliorer la qualité des formations", indique ainsi la note chiffre à l'appui, l'apprentissage ayant augmenté de 15% entre 2004 et 2007. Mais l'Igas ajoute qu'au-delà de cet effort, la réelle valeur ajoutée des COM est "difficile à objectiver".

 

Un suivi et un pilotage jugés insuffisants

Autre critique : "L'effet de levier financier des COM est globalement limité." Le principe de cofinancement, selon lequel, quand une région reçoit un euro du FNDMA, elle est censée en dépenser deux, n'a pas toujours fonctionné. Sur quatre régions étudiées par l'Igas, aucune n'atteint ce seuil. "Pour un euro délégué dans le cadre du FNDMA, les Pays-de-la-Loire ont dépensé 1,12 et l'Ile-de-France 1,44, signale ainsi le rapport. Dans les deux autres régions l'effet de levier est inférieur à un." Enfin, les auteurs estiment que le suivi et le pilotage des COM ne sont pas satisfaisants. "La mission de suivi et de pilotage des contrats confiée à l'Etat a vite rencontré des limites ; de ce fait les conseils régionaux ont bénéficié d'une forte autonomie dans la gestion des crédits du FNDMA, ce qui peut contribuer à expliquer l'effet de levier limité au final", détaille le rapport, qui avance des recommandations pour rectifier le tir. L'Igas propose notamment de recentrer les objectifs des COM, avec un nombre plus limité, parmi lesquels : la formation des jeunes non qualifiés, la féminisation de l'apprentissage, la priorité au développement de l'apprentissage dans le secteur public et les grandes entreprises. Le rapport propose également deux scénarios d'évolution concernant le pilotage : soit conserver le dispositif actuel en améliorant son suivi, "si l'Etat se fixe pour but d'infléchir les politiques des régions", soit, "si l'Etat souhaite définir et participer à la mise en œuvre de priorités nationales", revoir la logique du dispositif actuel, en répartissant les crédits du FNDMA entre un petit nombre de priorités nationales et en lançant un appel à projets auprès des régions pour chacune d'entre elles. Des propositions qui vont à l'encontre de ce que souhaitent les régions. "En tentant de mettre la main sur les COM, qui représentent chez nous 20% du budget de l'apprentissage, on a l'impression que l'Etat cherche à contrôler l'ensemble du budget", explique un responsable en région. Une recommandation qui va également à l'encontre des conclusions que la Cour des comptes avait rendues, dans le cadre de son rapport sur la formation tout au long de la vie. Soulignant la faiblesse du suivi des actions mises en oeuvre dans le cadre des COM, les magistrats posaient la "question de la signification réelle d'un retour de l'Etat", dont la portée est qualifiée "d'ambiguë", "dans un domaine qui échappait largement à ses compétences depuis les lois de 2002". Reste à savoir quelle position choisira l'Etat et comment il interviendra dans les futurs COM.

 

Emilie Zapalski