Environnement - Un nouveau bouquet de mesures pour accélérer les économies d'énergie
"Il s'agit de mesures permettant d'aller au delà des engagements du Grenelle, en les prolongeant et en les complétant", a résumé la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, en présentant ce 16 décembre une petite trentaine de dispositions issues de la table ronde sur l'efficacité énergétique et de la consultation publique qui l'a suivie (voir ci-contre notre article du 14 novembre 2011). L'objectif est de permettre une diminution des consommations à l'horizon 2020 comprise entre 19,7 et 21,4%, soit l'équivalent de la consommation annuelle de 16 millions d'habitants, alors que la trajectoire-cible est aujourd'hui de 17%, et donc inférieure au taux de 20% fixé au niveau européen.
Parmi les mesures retenues, qui ciblent les ménages, les entreprises et les pouvoirs publics, certaines sont déjà connues. C'est le cas de l'extension de l'écoprêt à taux zéro (éco-PTZ) aux syndicats de copropriétés, qui a été inscrit par voie d'amendement dans le quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2011 (voir ci-contre notre article du 5 décembre 2011), et de la relance de l'écoprêt pour la rénovation thermique des logements sociaux distribué par la Caisse des Dépôts (voir ci-contre notre article du 29 novembre 2011). En prenant l'hypothèse de 70.000 logements sociaux rénovés par an, le ministère table sur 700 GWh d'économies d'energie finales par an réalisées grâce à cette mesure.
Autres dispositions destinées à accélérer la rénovation thermique de l'habitat : le rétablissement sous condition de ressources, à compter du 1er janvier 2012, du cumul du crédit d'impôt développement durable et de l'éco-PTZ et le renforcement du programme "Habiter mieux" qui doit permettre, sur la période 2011-2017, la rénovation de 300.000 logements dont les propriétaires occupants sont en situation de précarité énergétique. A travers les certificats d'économies d'énergie, les fournisseurs d'énergie s'engagent à apporter au programme une contribution de 85 millions d'euros d'ici 2013 tandis que l'aide de solidarité écologique aux travaux, octroyée en complément de la subvention principale de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), va être portée de 1.100 à 1.600 euros à compter du 1er janvier 2012.
20 millions d'euros pour un éclairage public moins énergivore
Plusieurs mesures nouvelles ont été annoncées en direction des collectivités. 20 millions d'euros de subventions seront déployés par l'Ademe à partir de février 2012 pour aider les 31.900 communes de moins de 2.000 habitants à rénover leur éclairage public. Il s'agit de traiter en priorité les luminaires équipés de lampes à vapeur de mercure qui sont les plus énergivores et représentent un tiers du parc français d'éclairage public. Ces lampes équipent majoritairement les lampadaires de type "boule" qui contribuent le plus aux nuisances lumineuses. L'opération de rénovation doit permettre de réduire de moitié la consommation d'énergie et de diminuer la pointe d'électricité à la tombée de la nuit.
Par ailleurs, la Caisse des Dépôts va développer de nouveaux outils d'investissement dédiés à répondre aux besoins des collectivités qui ont des projets de rénovation énergétique de leur patrimoine (bâtiments municipaux, écoles, collèges, lycées, etc.). Cette offre d'investissement dans les projets locaux d'efficacité énergétique se traduira principalement par deux actions au deuxième trimestre 2012. D'abord, la mise en place d'une filiale de la Caisse des Dépôts dédiée majoritairement aux rénovations énergétiques des bâtiments publics, qui permettrait aux petites collectivités de disposer d'une offre de financement et de prestation de services, capable d'inclure des engagements de performance, notamment dans le cadre de contrats de partenariat (contrats de performance énergétique). Cette offre s'appuiera sur des partenariats industriels avec des opérateurs qualifiés. En mobilisant ses capacités d'ingénierie et d'investissement, la Caisse des Dépôts pourra aussi s'engager aux côtés de collectivités de taille plus importante, disposant de compétences techniques, dans la création d’opérateurs locaux prenant en charge des projets de rénovation énergétique de bâtiments. Elle est d’ores et déjà engagée aux côtés de la région Ile-de-France pour l’accompagner dans la création d’une société d'économie mixte dédiée, et participe à des études de faisabilité avec la région Alsace et le conseil général des Alpes-Maritimes.
De son côté, l'Etat va développer des guides de bonnes pratiques pour aider à bien identifier les étapes essentielles dans la mise en place de contrats de performance énergétique et mettra à disposition des clausiers-types pour sécuriser les démarches. Des modèles de clauses-types pour les contrats en marchés publics seront disponibles début janvier 2012. L'Etat s'engage aussi à éliminer certains freins réglementaires. Après avoir modifié en août dernier le Code des marchés publics pour permettre de conclure des contrats globaux visant à satisfaire des objectifs chiffrés de performance (voir ci-contre notre article du 26 août 2011), il permettra l’accès à la TVA à 7% pour les travaux d’économies d’énergie lorsque leurs bénéficiaires ont recours au tiers financement.
Vers un plan d'achats public "performance énergétique"
En outre, il est prévu de lancer un grand plan d’achats publics "performance énergétique". L’objectif est, sur une quinzaine de produits identifiés (chaudières, data centers, équipements bureautiques, réfrigérateurs-congélateurs pour la restauration collective par exemple), de stimuler l’achat de produits plus performants au plan énergétique en lançant des appels d’offres intégrant davantage les enjeux d’économies d’énergie (avec notamment la mise en place de normes plus exigeantes) et en adaptant, en parallèle, un bonus-malus exemplaire pour inciter les administrations et établissements publics à acheter plus performant. Un groupe de travail national sera créé associant les services de l’Etat, l’Ademe, les représentants des collectivités locales et la principale centrale d’achat public (l’Ugap) pour définir les modalités de ce plan. L’intervention de l’Ugap doit permettre d’avoir un effet d’entraînement sur d’autres acheteurs publics que l’Etat. L’identification des produits prioritaires sera réalisée en mars 2012 puis un plan d’actions sera défini au premier semestre 2012.
Du côté des entreprises, enfin, le plan gouvernemental prévoit également plusieurs mesures pour limiter les gaspillages sur l'éclairage. Un décret va rendre obligatoire à partir du 1er juillet 2012 l'extinction des enseignes lumineuses commerciales de 1 heure à 6 heures du matin. Cela doit permettre une économie d'électricité équivalente à la consommation annuelle de 260.000 ménages. "Comme 20% des surfaces de bureaux restent allumés pour rien", selon Nathalie Kosciusko-Morizet, une étude a été lancée pour rendre également obligatoire à partir de fin 2012 l'extinction des lumières dans les bureaux et bâtiments non résidentiels lorsqu'ils sont vides. Cette mesure doit là encore permettre de réduire la pollution lumineuse et d'économiser l'équivalent de la consommation annuelle d'électricité d'un million de ménages. Parmi les principales mesures ciblant les entreprises, 100 millions d'euros de prêts à taux bonifié de 2% va également être mis en place par Oseo pour inciter les très petites entreprises et les petites PME à réaliser des économies d'énergie. 5.000 entreprises sont visées. Gain énergétique escompté : 200 GWh par an.