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Un décret renforce les droits des personnes victimes de violences intrafamiliales

Un décret du 23 novembre tend à "renforcer l'effectivité des droits des personnes victimes d'infractions commises au sein du couple ou de la famille" (enfants, conjoints, personnes âgées...) : extension des possibilités de mesures de justice restaurative lorsque les faits sont prescrits, pouvoir d'appréciation donné au procureur de la République, mesures liées aux examens médicaux, compétences des associations d'aide aux victimes...

Un décret du 23 novembre 2021, pris par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, renforce "l'effectivité des droits des personnes victimes d'infractions commises au sein du couple ou de la famille". Il précise pour cela les modalités d'application de diverses dispositions du code pénal ou du code de procédure pénale. Ce texte, qui s'appliquera à compter du 1er février 2022, intervient dans un contexte marqué par une recrudescence des violences intrafamiliales, sous l'effet notamment de la crise sanitaire et des confinements.

Des possibilités plus larges de justice restaurative

Tout récemment, la Fédération 3977 – qui gère la plateforme nationale du même nom dédiée au signalement des maltraitances envers les personnes âgées et les adultes en situation de handicap – a fait état d'un "fort rebond des alertes pour maltraitances d'adultes au premier semestre 2021" (voir notre article du 13 octobre 2021). Et, le 23 novembre, la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), qui gère la plateforme d'appels 3919, vient de publier le bilan de son activité 2020 (voir notre article de ce jour), montrant une progression de 22% des appels l'an dernier par rapport à 2019. Il s'agit à 95% d'appels pour des violences conjugales. La crise sanitaire et les confinements ne sont pas la seule explication, puisque, sur trois ans (2017-2020), la progression des appels est de 114%.

Dans ce contexte, qui correspond aussi à une libération de la parole des victimes, le décret du 23 novembre commence par étendre les possibilités de mesures de justice restaurative lorsque les faits sont prescrits. Celles-ci visent notamment à faire prendre conscience du point de vue de la victime et des conséquences pour celle-ci du passage à l'acte. Le décret prévoit que, dès lors "que l'auteur de l'infraction a reconnu avoir commis les faits qui lui sont reprochés, les mesures de justice restaurative peuvent être mises en œuvre, y compris si la prescription de l'action publique est acquise". Le procureur doit également vérifier si une mesure de justice restaurative peut être mise en œuvre "en cas de décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement dans des procédures concernant des infractions sexuelles commises par des majeurs sur des mineurs dont la commission est reconnue par leur auteur mais qui sont motivées par la prescription de l'action publique".

Le cas particulier des violences intrafamiliales en présence d'un mineur

Un autre article donne un plus large pouvoir d'appréciation au procureur de la République, notamment lorsque des violences au sein d'un couple ont été commises en présence d'un mineur. Dans ce cas, il veille "à ce que le mineur puisse se constituer partie civile lors des poursuites, le cas échéant en étant représenté par un administrateur ad hoc", afin qu'il puisse ultérieurement être appelé comme partie civile et non comme témoin. Dans ce cas, le procureur s'assure également que figurent au dossier de la procédure dont est saisie la juridiction de jugement tous les éléments lui permettant d'apprécier l'importance du préjudice subi par le mineur et de se prononcer sur le retrait total ou partiel de l'autorité parentale ou de son exercice, ainsi que sur la suspension des droits de visite et d'hébergement.

Une autre disposition concerne les examens médicaux. Elle prévoit que "lorsque l'examen médical concerne une victime mineure, le médecin n'est pas tenu de remettre une copie du certificat aux représentants légaux du mineur qui en font la demande s'il estime que cette remise pourrait être contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant, notamment en cas de suspicion de violences intrafamiliales, ou si le mineur disposant d'un degré de maturité suffisant, le refuse".

Compétences étendues pour les associations d'aide aux victimes

Un autre article étend les compétences des associations d'aide aux victimes. Il ouvre la possibilité, pour les associations d'aide aux victimes spécialisées dans la prise en charge et l'accompagnement des victimes de violences au sein du couple et dans les violences sexuelles et sexistes, d'obtenir un agrément du ministère de la Justice pour assister les victimes de ces infractions.

Enfin, le décret du 26 novembre prévoit que lorsqu'une personne mise en cause pour le délit de non représentation d'enfant soutient que les faits qui lui sont reprochés ont été justifiés par des violences ou toutes autres infractions commises sur le mineur par la personne qui a le droit de le réclamer, le procureur de la République veille à ce qu'il soit procédé à la vérification de ces allégations avant de décider de mettre ou non l'action publique en mouvement.

Référence : décret n°2021-1516 du 23 novembre 2021 tendant à renforcer l'effectivité des droits des personnes victimes d'infractions commises au sein du couple ou de la famille (Journal officiel du 24 novembre 2021).
 

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