Energie / Habitat - Travaux de rénovation énergétique : l'UFC-Que choisir dénonce les "piètres performances" des artisans labellisés
Les prestations des artisans disposant de la qualification RGE ("reconnu garant de l'environnement") ne sont pas d'une qualité suffisante pour que les consommateurs puissent réaliser des travaux de rénovation énergétique "en toute confiance", a dénoncé le 7 décembre l'association UFC-Que Choisir. Le recours à des professionnels disposant de ce label est obligatoire pour bénéficier d'aides publiques au financement de ces travaux, telles que l'éco-prêt à taux zéro et le crédit d'impôt développement durable (CIDD). Or aujourd'hui les professionnels RGE "sont toujours incapables d'avoir une approche globale du bâti et de faire des préconisations cohérentes", estime l'association de consommateurs, au vu de sa deuxième étude de terrain, réalisée sur dix maisons mal isolées dans dix départements différents, auprès de 42 professionnels, en août/septembre 2016.
Dans le cadre de cette enquête, seuls 8% des artisans ont fait un examen consciencieux du bâti (enveloppe du logement, ventilation et production de chaleur), jugé indispensable pour établir des recommandations de travaux fiables, même si on les fractionne. Rares ont été ceux "capables d'effectuer un diagnostic pertinent : 9% contre 3% dans notre étude de 2014 et de proposer une solution à la fois sur l'enveloppe du bâti et sur la production de chaleur cohérente", pointe l'UFC. "Très souvent les professionnels se cantonnent à analyser la partie du bâtiment qui concerne la ou les compétences qu'ils maîtrisent", ce qui "rend difficile voire impossible" une approche globale.
En cause, selon l'association, "une formation inadaptée", trop courte (trois jours) et trop théorique, qui rend "illusoire la maîtrise de la thermique des bâtiments", dans un métier où "la formation pratique sur le terrain est essentielle", et un contrôle insuffisant des qualifications des professionnels. Sur les 4 ans de certification, un seul contrôle est réalisé par l'organisme certificateur, ce qui est "insuffisant pour garantir la qualité du RGE", souligne l'UFC, pour qui des contrôles renforcés doivent surtout permettre d'adapter les formations. "Ni les professionnels RGE spécialisés, ni ceux bénéficiant des mentions spécifiquement créées pour répondre aux problématiques de la rénovation globale 'Eco-artisan', 'Pros de la performance' et 'offre globale' ne se montrent à la hauteur", estime l'UFC.
A ses yeux, leurs préconisations de rénovation énergétique sont "du grand n'importe quoi" car elles ne permettent de baisser, en moyenne, que "de 27% la consommation d'énergie alors que la loi Transition énergétique pour la croissance verte fixe un objectif de 75% pour l'ensemble du bâti résidentiel d'ici 2050". Même les rapports d'auditeurs, pourtant payants (entre 900 euros et 1.140 euros) "n'adoptent pas une approche globale satisfaisante, déplore l'association. Un auditeur est même parvenu à promettre des économies supérieures à la facture d'énergie actuelle du propriétaire de la maison !".
"Le consommateur aimerait bien savoir comment déceler le professionnel vertueux mais franchement, autant chercher une aiguille dans une botte de foin", a estimé lors d'une conférence de presse téléphonique le président de l'UFC-Que Choisir Alain Bazot. En outre les professionnels testés pratiquent des prix "excessivement élevés et injustifiés, jusqu'à 185% supérieurs aux prix constatés sur une opération comparable optimisée. Et la majorité ne donne qu'une information "minimale et générique" sur les aides accessibles aux consommateurs. Si 80% des professionnels testés abordent le crédit d'impôt transition énergétique, seuls 26% évoquent les certificats d'économies d'énergie et 23% les aides locales. Plus rares encore sont ceux qui intègrent ces aides dans le calcul du devis pour proposer un coût net.
Au final, les surcoûts constatés ne permettent pas aux consommateurs de rentabiliser les opérations de rénovation énergétique, et peuvent rendre "financièrement inaccessibles les travaux de rénovation, même avec les dispositifs d'aides", tranche l'association. Et ces prix excessifs "trop largement subventionnés", font "peser un surcoût sur les finances publiques", souligne l'UFC, pour qui "clairement, la qualification RGE ne répond pas à l'objectif de montée en compétence que se sont fixés les pouvoirs publics et la profession".
Pour s'attaquer à ces difficultés, l'association de consommateurs demande aux pouvoirs publics "une totale remise à plat de la qualification RGE, avec un renforcement de la formation et des contrôles des professionnels qualifiés". Elle préconise également de "promouvoir une nouvelle filière d'experts indépendants, capables de coordonner les travaux et d'accompagner les consommateurs tout au long de leur démarche de rénovation énergétique". Elle souhaite aussi que soit "instaurée une obligation de résultat", que les consommateurs pourront invoquer dès lors que les allégations de performance énergétique faites par les professionnels n'auraient pas été atteintes. Elle veut également que les banques soient responsabilisées dans le cadre d'un "crédit affecté", afin qu'elles vérifient la prestation réalisée, ainsi que la solvabilité et les capacités du professionnel partenaire.