Transports publics et mobilités actives dans la crainte de coupes budgétaires

Création des RER métropolitains, développement des transports publics, construction d'infrastructures cyclables... La décarbonation des transports nécessite des investissements colossaux à l'heure où les coupes budgétaires menacent de freiner l'allant d'un secteur qui réclame plus de soutien et de leviers financiers pour se développer.

"Si nous ne sommes pas au rendez-vous, notamment de la crise budgétaire du pays, les problèmes seront encore plus monstrueux l'an prochain", a prévenu le ministre délégué aux Transports, François Durovray, invité à s'exprimer ce 3 octobre devant de nombreux acteurs de la mobilité en France réunis à Strasbourg au Salon européen de la mobilité (European Mobility Expo). "Il faut avoir cette capacité aujourd'hui à faire des efforts, ce n'est pas facile et ça concerne mon secteur comme l'ensemble des secteurs", a-t-il ajouté.

Premier signe de ces coups de rabot, le budget de l'Agence de financement des infrastructures de France (Afit France), dont les crédits sont majoritairement alloués au ferroviaire et aux transports publics, devrait être amputé de 770 millions d'euros l'an prochain, selon la lettre plafond du ministère des Transports.

Les acteurs du transport public s'inquiètent aussi des coupes dans le budget de l'Ademe (Agence de la transition écologique), tandis que les opérateurs doivent investir des sommes colossales pour verdir leurs flottes de bus - un bus électrique coûte deux fois plus (500.000 euros environ) qu'un bus diesel.

Besoin de développement de l'offre de transports publics

Dans une position commune avec le Medef, l'Union des transports publics et ferroviaires (UTPF) propose de flécher 250 millions d'euros (sur 2 milliards) tirés des crédits carbone (ETS) payés par le transport aérien et routier, afin d'aider les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à développer l'offre de transport public sur leurs réseaux, au bénéfice notamment des salariés et des demandeurs d'emplois.

"Les efforts que l'État pourra faire, et qui ne sont pas actés au moment où on se parle, doivent être au service d'une ambition forte de création de l'offre", a reconnu François Durovray. Si aide il y a, ce sera donc pour permettre de développer l'offre de transports publics et non pour offrir un service moins cher, voire gratuit.

Conférence de financement des Serm : pas avant début 2025

Grand projet de mobilité du second quinquennat d'Emmanuel Macron, les services express régionaux métropolitains (Serm, souvent appelés RER métropolitains), attendent toujours leur conférence de financement, qui devait avoir lieu avant le 30 juin.

François Durovray a indiqué préférer attendre la fin des débats budgétaires pour la tenue de cette conférence, qui ne devrait pas avoir lieu avant début 2025 d'après lui. Soupçonné de vouloir développer des services de cars express au détriment du ferroviaire - il a rédigé un rapport pour la région Île-de-France sur le sujet -, celui qui préside aussi le conseil départemental de l'Essonne a rassuré en promettant d'"accompagner les projets de Serm et de Serm ferroviaires". Au total, 24 projets labellisés par son ministère attendent toujours de connaître les modalités de financement.

Débat budgétaire : les priorités du Gart

Dans la perspective du prochain débat budgétaire, les élus du Gart, qui s'affirment toujours "très attachés (…) à ce que ne subsiste aucune différence de traitement entre l’Île-de-France et le reste du pays", donnent d'ores et déjà la priorité à "trois axes d’action en faveur des AOM : une réévaluation des plafonds du versement mobilité, pour laisser, à la discrétion des AOM, davantage d’autonomie fiscale pour répondre à la forte demande de solutions de mobilité alternatives à la voiture individuelle ; la mise en place d’une ressource affectée, dédiée, dynamique, pérenne et distincte du versement mobilité pour assurer aux régions le financement de leurs compétences mobilités ; l’engagement d’une réflexion sur l’élargissement du panier de ressources des AOM urbaines et régionales."

Les mobilités actives redoutent a minima une "année blanche"

C'est du côté du Club des villes et territoires cyclables et marchables, qui réunit environ 300 collectivités, que les inquiétudes sont les plus grandes. Alors que le plan vélo et marche présenté par Élisabeth Borne prévoyait d'allouer 250 millions d'euros par an entre 2023 et 2027 pour aider au développement d'infrastructures cyclables et piétonnes, rien n'a été versé cette année aux 400 projets candidats.

"A minima, nous aurons une année blanche", déplore Françoise Rossignol, la présidente du Club, qui craint tout bonnement la non-reconduction du dispositif l'année prochaine. "Ce serait une erreur politique majeure" de l'abandonner subitement, dénonce-t-elle alors que des maires se sont engagés et "ont pris des risques politiques pour faire voter des schémas cyclables" en comptant sur ces financements. "Les territoires abandonnés se sentiraient encore plus relégués", affirme l'élue de la communauté urbaine d'Arras, se disant "en colère". "Le ministre ne conteste pas ce qu'on dit mais tout ça dépend d'arbitrages qui le dépassent", craint-elle.

 

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