Elus - Transparence de la vie publique : les projets de loi définitivement adoptés
Les deux projets de loi sur la transparence de la vie publique, nés dans le sillage de l'affaire Cahuzac, ont été adoptés définitivement au Parlement par des ultimes votes de l'Assemblée nationale mardi 17 septembre en fin de journée. L'Assemblée avait le dernier mot suite au désaccord apparu en juillet dernier entre les parlementaires des deux chambres en commission mixte paritaire.
Le texte relatif aux parlementaires a recueilli 324 voix pour, contre 205, lors du scrutin dans les salles attenantes de l'hémicycle, dépassant la majorité absolue requise pour l'adoption de ce projet de loi organique (289 voix sur 577). L'Assemblée nationale avait auparavant adopté, par 291 voix contre 196, le projet de loi concernant les autres élus, lors d'un scrutin habituel avec boîtier électronique dans l'hémicycle. S'ils ont été soutenus par les socialistes, les écologistes et les communistes, ces deux projets de loi prévoyant notamment des déclarations de patrimoine des élus, consultables en préfecture, et des déclarations d'intérêts publiables, ont été rejetés par la très grande majorité des députés UMP dénonçant deux lois qui "donnent une image déformée et injuste des élus", à l'exception de certains élus comme Laurent Wauquiez, et par une large majorité des radicaux de gauche. Les députés de l'UDI de Jean-Louis Borloo ont choisi de s'abstenir. Les élus d'extrême-droite ont aussi opté pour l'abstention.
Les députés sortent victorieux de leur bras de fer avec les sénateurs mais aussi avec le gouvernement : les déclarations de patrimoine des élus ne seront pas publiées. Plus précisément, ces déclarations de patrimoine des parlementaires et des "grands" élus locaux (voir encadré ci-dessous) seront consultables en préfecture mais interdites de divulgation, sous peine d'amende.
André Chassaigne, le président du du groupe Gauche démocrate et républicaine, a résumé les choses – et le point de vue de l'Assemblée – en ces termes : "Au cours de l'examen de ces projets de lois, la question de la publication des déclarations de situation patrimoniale des parlementaires et des élus titulaires de fonctions exécutives locales a constitué une pierre d'achoppement entre notre assemblée et le Sénat. En définitive, nous sommes satisfaits du rétablissement du régime de publicité des déclarations de situation patrimoniales sous la forme d'un droit de consultation en préfecture par tout citoyen inscrit sur les listes électorales. C'est une solution équilibrée qui concilie transparence et respect de la vie privée. En outre, rappelons qu'il sera possible aux citoyens d'adresser à la haute autorité des observations écrites à propos des déclarations qu'ils ont consultées. Une certaine forme de contrôle citoyen est donc permise."
Egalement obligatoires, les déclarations d'intérêts, qui indiqueront les activités et relations que les élus, leurs proches ou leurs collaborateurs peuvent avoir et qui sont susceptibles de créer des conflits d'intérêts, seront publiques. Selon les "comptages" du député PS René Dosière, "près de 9.000 personnes, dont 5.000 élus et 4.000 non-élus", seraient ainsi tenues de faire une déclaration d'intérêts ainsi qu'une déclaration d'activités, que ces activités soient rémunérées ou non.
Nouvelle instance indépendante, la Haute Autorité de la transparence de la vie publique contrôlera ces déclarations en début et en fin du mandat pour vérifier s'il n'y a pas eu enrichissement personnel.
Mercredi 18 septembre, 101 sénateurs UMP ont saisi le Conseil constitutionnel. Dans un communiqué, ils affirment que "ce texte porte atteinte à la vie privée, à la liberté d'entreprendre, à la séparation des pouvoirs et au principe de légalité des délits et des peines".
Claire Mallet
Déclarations de patrimoine : qui est concerné ?
- les présidents de conseil régional, présidents de conseil général, présidents du conseil de la métropole de Lyon, maires d'une commune de plus de 20.000 habitants, présidents d'un EPCI à fiscalité propre de plus de 20.000 habitants (ou ayant des recettes de fonctionnement de plus de 5 millions d'euros), présidents de syndicats mixtes dont les recettes dépassent là encore les 5 millions d'euros ; les présidents des assemblées de Corse et d'outre-mer.
- s'il est titulaire d'une délégation de signature du chef de l'exécutif local, le conseiller régional, conseiller général, adjoint au maire d'une commune de plus de 100.000 habitants, vice-président d'un EPCI de plus de 100.000 habitants.
- les présidents et directeurs généraux de sociétés d'économie mixte (dont le chiffre d'affaires dépasse 750.000 euros) et des offices publics de l'habitat (gérant plus de 2.000 logements).