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Transparence - Déclaration de patrimoine : davantage d'élus locaux concernés

Les députés ont adopté ce 25 juin les deux projets de loi destinés à améliorer la transparence de la vie publique, dont ils ont débattu du 17 au 19 juin. Ils ont entre autres, au nom du droit au respect de la vie privée, refusé la publication des déclarations de patrimoine des élus locaux voulue par le gouvernement. Ils ont en revanche élargi le cercle des élus locaux concernés par cette déclaration.

Les députés ont adopté ce 25 juin les projets de loi organique et ordinaire relatifs à la transparence de la vie publique, dont ils ont débattu du 17 au 19 juin, malgré l'opposition de la plupart des députés UMP et des radicaux de gauche. Le premier a été voté par 326 voix pour (193 voix contre), le second a bénéficié pratiquement du même nombre de voix. Cet ensemble de deux textes a été légèrement remanié par rapport à sa version initiale.
Au cours de cette première lecture, l'Assemblée nationale a ainsi quelque peu élargi le cercle des élus locaux concernés par l'obligation de déposer des déclarations d'intérêts et de patrimoine. Au total, plus de 2.870 responsables élus des collectivités devront se plier à l'obligation. Il s'agit : des présidents des conseils généraux et régionaux, des maires des communes de plus de 20.000 habitants, des présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la population excède 20.000 habitants ou dont le montant des "recettes ordinaires" est supérieur à 5 millions d'euros. Les présidents des syndicats intercommunaux seront également visés par ces obligations, dès lors que leurs structures sont dotées de "recettes ordinaires" dont le montant dépasse 5 millions d'euros. Devront se soumettre aux mêmes règles : les conseillers généraux et régionaux, ainsi que les adjoints aux maires des communes de plus de 100.000 habitants, lorsqu'ils sont titulaires d'une délégation de signature du président ou du maire. Enfin, les présidents et directeurs généraux des sociétés d'économie mixte (soit 876 dirigeants), et ceux des offices publics de l'habitat (soit 443 dirigeants) déposeront eux aussi des déclarations d'intérêts et de patrimoine.
Les directeurs et chefs de cabinet des élus locaux ne sont pas visés par le texte. "Cette catégorie générale a vocation à être traitée dans le cadre du prochain projet de loi relatif à la fonction publique, qui revalorisera le rôle de la commission de déontologie de la fonction publique", a précisé le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, Alain Vidalies (sur cet autre projet de loi, lire notre article du 22 mai 2013).

Déclarations de patrimoine : une consultation en préfecture

La grande majorité des élus mentionnés par le projet de loi, ainsi que l'ensemble des dirigeants des organismes publics énumérés sont déjà concernés, aujourd'hui, par l'obligation d'une déclaration de patrimoine, en début et en fin de mandat, auprès de la commission pour la transparence financière de la vie politique. La nouveauté réside dans le fait qu'ils seraient, désormais, également tenus d'établir des déclarations d'intérêts.
Celles-ci seraient rendues publiques, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, par une nouvelle instance dotée d'importants moyens de contrôle, la Haute Autorité de la transparence de la vie publique. S'agissant des déclarations de patrimoine des responsables des exécutifs locaux, les députés ont souhaité, comme pour les parlementaires, fixer des limites très strictes au principe de publication. Beaucoup ont, en effet, mis en avant la nécessité de préserver le secret de la vie privée. Les déclarations de patrimoine pourraient être consultées par tout citoyen inscrit sur les listes électorales. Mais uniquement en préfecture. De plus, la personne devrait garder le secret. Si elle venait à "publier" ou "divulguer" les informations qu'elle aurait recueillies, elle pourrait être sanctionnée d'un an de prison et de 45.000 euros d'amende.

Prévenir les conflits d'intérêts

Destiné à renforcer la prévention et la lutte contre les conflits d'intérêts, le projet de loi affirme que les élus locaux, notamment, "veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts". Cela passe par plusieurs modalités concrètes.
Ainsi, "lorsqu'ils estiment se trouver dans une telle situation", les élus sont suppléés par leur délégataire, auquel ils s'abstiennent d'adresser des instructions, indique le texte. En outre, lorsqu'ils exercent simultanément à leur(s) mandat(s) une activité dans une entreprise publique ou privée d'un secteur concurrentiel, les élus locaux devront le signaler à la Haute Autorité. Celle-ci se prononcera alors sur la compatibilité de l'activité avec la fonction élective, selon des mécanismes proches de ceux qui sont aujourd'hui en vigueur pour les agents publics (la commission de déontologie de la fonction publique étant compétente dans ce cas). L'obligation de saisir la Haute Autorité demeurera pendant une période de trois années après la date où les fonctions électives auront pris fin. De plus, lorsqu'ils auront des questions d'ordre déontologique, les élus locaux pourront demander un avis à cette instance.

Avantages en nature : une délibération sera nécessaire

Les députés ont validé sans les modifier les dispositions qui étendent aux membres du gouvernement et aux élus locaux qui ont été mentionnés plus haut les dispositions sur le délit de pantouflage, qui s'appliquent déjà aux agents publics. Un élu local qui, ainsi, rejoindrait, pendant ou après son mandat, une entreprise dont il aurait assuré la surveillance, pourrait être sanctionné de trois ans de prison et de 45.000 euros d'amende.
La création d'une peine complémentaire d'inéligibilité à vie a été retoquée par l'Assemblée. Les députés ont en revanche donné leur feu vert à une peine d'inéligibilité allant jusqu'à dix ans. Elle sera applicable notamment aux élus s'étant rendus coupables de corruption, de trafic d'influence, de fraude électorale ou de fraude fiscale.
Les députés ont, par ailleurs, adopté un amendement de René Dosière, qui prévoit l'obligation d'une délibération de l'assemblée locale pour l'attribution, à un ou des élus, d'avantages en nature, comme la mise à disposition d'un véhicule, d'un téléphone ou d'un ordinateur. Actuellement, les collectivités attribuent ces avantages dans des conditions d'"opacité forte", déplore le député de l'Aisne.