Archives

PLF 2018 - Transition écologique : un budget en hausse mais recentré sur les priorités du Plan climat

La transition écologique, affichée comme une priorité du gouvernement, bénéficiera d'un budget en hausse de 3,9% en 2018, à 10,4 milliards d’euros. Mais cette augmentation doit servir avant tout à mettre en œuvre les priorités du Plan climat.

"Le projet de loi de finances pour 2018 traduit les ambitions du gouvernement pour accélérer la transition écologique et solidaire et rendre accessible la protection de la planète à tous les Français dans leur quotidien, et en particulier les plus modestes", a déclaré Nicolas Hulot en présentant le budget 2018 de son ministère ce 27 septembre. Avec une hausse de 3,9%, à 10,4 milliards d'euros, celui-ci fait partie des "gagnants" du projet de loi de finances (PLF) 2018. Mais ses actions sont recentrées sur la mise en œuvre du Plan climat présenté en juillet dernier. S'agissant des emplois, le ministère continue à voir ses effectifs baisser : -828 postes en 2018 (on comptais 660 suppressions de postes en 2017) pour le ministère et -446 postes pour ses opérateurs (-334 postes en 2017). Le plafond en équivalents temps plein (ETP) est porté à 40.805 pour le ministère et à 19.791 pour les opérateurs.

Paquet "solidarité climatique"

Côté fiscalité ou mesures incitatives, on retrouve dans le PLF les dispositions du paquet "solidarité climatique" dévoilé le 18 septembre. Dans le domaine de l'habitat et des économies d'énergie, d'abord, le dispositif du chèque énergie, expérimenté en 2017 dans quatre départements (l'Ardèche, l'Aveyron, les Côtes-d'Armor et le Pas-de-Calais), sera bien étendu à l'ensemble du territoire à compter du 1er janvier 2018 et bénéficiera à environ quatre millions de ménages. Il sera attribué automatiquement au bénéficiaire selon un barème compris entre 48 et 227 euros en fonction des revenus et de la taille de la famille, soit en moyenne un chèque de 150 euros par an. Le coût de ce dispositif pour les chèques émis en 2018 est évalué à 600 millions d'euros inscrits sur le programme "service public de l'énergie".
Le crédit d'impôt transition énergétique (CITE), qui sera prorogé jusqu'au 31 décembre 2018 avant d'être transformé en prime versée à l'achèvement des travaux en 2019, sera "recentré" l'an prochain sur certains types de travaux de rénovation (isolation des combles, changement de chaudière, etc.) et élargi par exemple aux frais d'audits énergétiques. Mais les changements des portes, fenêtres et volets isolants engagés dès ce mercredi ne bénéficieront plus que d'un crédit de 15% contre 30% pour les autres travaux. Et à partir du 28 mars 2018, ils seront exclus du CITE. Le gouvernement a évoqué un coût trop important par rapport aux gains énergétiques observés, mais la mesure va aussi considérablement baisser les dépenses liées à ce dispositif, évaluées à 875 millions d'euros l'an prochain, contre près de 1,7 milliard d'euros cette année. Les industriels de la "filière fenêtre" se disent "vent debout" contre cette mesure et défendent l'efficacité de ces travaux, qui contribuent à l'activité de 51.000 PME et artisans.
Le gouvernement prévoit un "coup de pouce" pour le remplacement d'une chaudière au fioul par une chaudière utilisant les énergies renouvelables. Financée via le mécanisme des certificats d'économie d'énergie, répercuté in fine sur la facture d'énergie des consommateurs, cette mesure pourrait représenter 60 millions d'euros par an.
Le paquet "solidarité climatique" compte aussi faciliter la transition du parc automobile. L'évolution du bonus/malus et le renforcement de la prime de conversion des vieux véhicules polluants doivent permettre de sortir 100.000 véhicules polluants du parc automobile dès l'an prochain. De 1.000 euros pour tous les ménages, le montant de la prime est doublé à 2.000 euros pour les ménages non imposables. Elle sera aussi élargie aux véhicules essence les plus anciens. Ce dispositif va mobiliser 388 millions d'euros, contre 347 millions d'euros en 2017.

Fiscalité plus verte

La fiscalité écologique se veut aussi plus ambitieuse via l'augmentation du prix du carbone et le rapprochement de la taxation applicable au gazole et à l'essence. Ainsi, pour la période 2018-2022, les tarifs des TIC (taxes intérieures de consommation) sont relevés avec une accélération de la trajectoire de la valeur de la tonne de carbone qui doit passer de 30,50 euros en 2017 à 44,6 euros en 2018 pour atteindre progressivement 86,20 euros en 2022.
Le tarif de TIC appliqué au gazole va être revu à la hausse de 2,6 centimes d'euros par litre par an pendant quatre ans afin d'annuler progressivement d'ici 2021 l'avantage fiscal accordé au diesel, considéré aujourd'hui par le gouvernement comme injustifié au vu des émissions de particules fines issues de sa combustion. Selon le ministère, ces deux mesures se traduiront par une augmentation des prix à la pompe de 3,9 centimes d'euro/litre pour l'essence et de 7,6 centimes d'euro/l pour le gazole en 2018. Elles permettront de dégager des recettes de 3,7 milliards d'euros en 2018, a précisé Bercy.
Pour mieux surveiller le marché automobile, après le scandale des moteurs truqués visant à minimiser la pollution affichée, un service doté d'un budget annuel de 5 millions d'euros va être créé. Il réalisera des tests sur des véhicules et des pièces détachées, de manière aléatoire.

Soutien à la production d'énergies renouvelables

L'effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques passe aussi par la poursuite du soutien à la production d'énergies renouvelables. 5,4 milliards d'euros seront mobilisés, contre 5,6 milliards d'euros l'an dernier, une contraction qui s'explique par la baisse du coût de ces énergies et des prix de l'électricité sur le marché, selon le ministère. Le gouvernement remboursera 1,6 milliard d'euros à EDF, soit une partie des fonds avancés par EDF dans le soutien à l'électricité verte. Le fonds chaleur (financement de la chaleur renouvelable, par exemple issue du bois) sera simplement stabilisé à 200 millions d'euros, alors qu'Emmanuel Macron s'était engagé à le doubler durant le quinquennat.

Budget de l'Ademe

Principal opérateur du ministère pour la mise en œuvre des actions du Plan climat, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) ne sera plus financée en 2018 par le produit de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) et rejoint le budget de l'Etat (programme 181 "prévention des risques"). Elle va être dotée d'un budget de 613 millions d'euros en 2018 (+36%) mais doit dans un même temps réaliser une économie de 50 millions d'euros "pour participer à la réduction des dépenses publiques", selon le ministère. Elle aura pour mission de poursuivre la réalisation des objectifs de la transition écologique, via notamment les fonds chaleur et déchets. Elle devra aussi stabiliser ses interventions sur sites et sols pollués et démarrer de nouveaux fonds d'intervention comme le fonds "air-mobilité" qui sera doté de 20 millions d'euros pour aider les territoires sur ces deux volets.

Coup de pouce pour la biodiversité et ponction sur les agences de l'eau

Le programme "paysages, eau et biodiversité" va bénéficier d'une nouvelle mesure de 5 millions d'euros pour renforcer les actions de l'Etat en faveur de la préservation des espèces et des espaces protégés. "Une attention particulière sera apportée aux sites labellisés Natura 2000 avec un budget additionnel de 2 millions d'euros", a précisé le ministère. Par ailleurs, le budget affecté aux politiques marines et littorales de protection de la biodiversité augmentera de 2 millions d'euros en 2018.
Les agences de l'eau, chargées de la gestion et de la préservation de cette ressource, voient leurs responsabilités élargies au financement de l'Agence française pour la biodiversité à hauteur de 195 millions d'euros, des parcs nationaux (65 millions) et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (37 millions). Selon le ministère, cette mesure représente une économie de 136,2 millions d'euros pour le budget de l'Etat. Mais cette nouvelle ponction a encore une fois été vivement dénoncée par les associations d'élus locaux qui craignent une baisse de la contribution des agences à leurs projets au moment où les collectivités vont devoir exercer la nouvelle compétence Gemapi (lire nos articles ci-dessous). L'organisation professionnelle Canalisateurs de France, qui fédère les entreprises de pose et de réhabilitation des réseaux d'eau et d'assainissement, s'est aussi alarmée de cette "ponction d'une ampleur sans précédent". Elle dit redouter de "lourdes conséquences écologiques, sociales et économiques".

Santé environnementale

En matière de prévention des risques, le budget 2018 entend donner la priorité à la santé environnementale (qualité de l'air, perturbateurs endocriniens...) et au développement de l'économie circulaire. Trois millions d'euros lui sont consacrés. Cette somme permettra notamment de financer une campagne de sensibilisation au risque d'exposition aux substances dangereuses, comme les pesticides et les perturbateurs endocriniens, ainsi que des recherches sur ces derniers. Par ailleurs, la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques bénéficiera d'un million d'euros de moyens supplémentaires.

Transports : priorité à l'existant

Dans le domaine des transports, le budget confirme la priorité donnée à l'entretien et au fonctionnement des infrastructures existantes, et à la sécurité. Le volet transports des contrats de plan Etat-régions représente près de 24 milliards d'euros dont plus de 7 milliards d'euros pour l'Etat et 8 milliards d'euros pour les régions. "Les opérations inscrites aux contrats pour les différents modes contribueront à la modernisation et à l'optimisation des réseaux de transports du quotidien", affirme le ministère.
Les dépenses opérationnelles de l'Agence pour le financement des infrastructures de transports de France (Afitf) passent de 2,2 milliards d'euros en 2017 à 2,4 milliards d'euros en 2018. Le ministère a précisé la ventilation de ces crédits : entretien et régénération des réseaux existants (800 millions d'euros pour la route et 80 millions d'euros pour le fluvial, soit plus de 10 % d'augmentation dans les deux cas), et modernisation des trains d'équilibre du territoire grâce à l'acquisition de nouvelles rames. Le montant des concours financiers versés à la SNCF pour l'utilisation de ses infrastructures par les trains d'équilibre du territoire, les trains régionaux et les trains de fret augmente de 200 millions d'euros, indique aussi le ministère. "La dotation de l'Afitf doit lui permettre de faire face aux engagements pris tandis que l'impact budgétaire du cadencement de plusieurs grands projets (canal Seine-Nord-Europe, tunnel Lyon-Turin, etc.) sera examiné lors des Assises nationales de la mobilité ", a-t-il encore souligné.

Economie sociale et solidaire

Enfin, pour promouvoir le développement de l'économie sociale et solidaire qui relève désormais de son périmètre, le ministère de la Transition écologique et solidaire bénéficiera en 2018 du transfert des crédits relatifs à l'économie sociale et solidaire et des crédits relatifs au dispositif local d'accompagnement. En 2018, ces crédits atteindront un total de 15,25 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 14,24 millions d'euros en crédits de paiement.

 

Téléchargements

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis