Logement - Statistiques immobilières : le premier qui dit la vérité, il doit être labellisé...
Il y a près de deux ans, Jean-Louis Borloo, Christine Lagarde et Benoist Apparu tapaient du poing sur la table, excédés par la cacophonie assourdissante des statistiques immobilières, et tout particulièrement de celles relatives aux prix. Tout cela au plus fort de la crise immobilière... Une multiplication incontrôlée des chiffres, des méthodologies parfois obscures, des champs et des approches sur mesure et impossibles à comparer, des périodes de référence à géométrie variable, des motivations pas toujours avouables : tout était réuni pour faire du logement une sorte de Far West de la statistique, où chaque acteur est en permanence prêt à dégainer la sienne. Un capharnaüm qui sied mal à une discipline qui se veut l'incarnation d'une rigueur austère, sous l'œil sévère de l'Insee et du Conseil national de l'information statistique (Cnis)...
Le coup de colère ministériel a fait son effet. La commission des comptes du logement a ainsi "bénéficié" d'un sérieux toilettage réglementaire, avec pour objectif avoué d'atteindre l'autorité et la fiabilité reconnues à la commission des comptes de la sécurité sociale (voir notre article ci-contre du 3 novembre 2010). Mais surtout, le 26 mars 2010, le Cnis a rendu un rapport et formulé 27 propositions pour remettre de l'ordre dans le secteur et permettre aux décideurs et au grand public de s'y retrouver (voir notre article ci-contre du 29 mars 2010). Parmi ces propositions figurait en premier lieu la mise en place d'une "offre d'étalonnage" pour les producteurs de statistiques privées.
Cette proposition vient de se concrétiser avec la remise du premier label, délivré par l'Autorité de la statistique publique (ASP). Et le vainqueur est... la chambre des notaires de Paris-Ile-de-France ! Plus précisément, l'outil statistique ainsi "officialisé" concerne les "indices notaires - Insee" trimestriels relatifs aux prix des logements anciens en Ile-de-France. Ce premier label a été accordé après une analyse approfondie de l'outil et de la méthodologie par l'ASP. Selon le communiqué de la chambre régionale, "la labellisation garantit que le cadre méthodologique, la production et la diffusion des indices notaires - Insee est conforme au code de bonnes pratiques de la statistique européenne". En contrepartie de ce sceau officiel, "les notaires de Paris-Ile-de-France seront désormais tenus de diffuser à la presse les communiqués concernant ces indices le jour même de la conférence de presse les présentant, sans possibilité de diffusion en amont".
Les chiffres émanant du Conseil supérieur du notariat (qui couvrent l'ensemble de la France) devraient également être labellisés très prochainement. En revanche, soucieuse de monter que le label n'est pas un dû, l'Autorité de la statistique publique a écarté le dossier présenté par la Fnaim (Fédération nationale des agents immobiliers), qui devra donc revoir sa copie ou renoncer au label. Les nombreux autres producteurs de chiffres privés - promoteurs, réseaux d'agences immobilières, courtiers en prêts immobiliers, sites internet spécialisés... - se sont tenus soigneusement à l'écart de ce premier tour. Il n'est pas sûr que l'échec de la Fnaim les incite à se présenter, mais, dans ce cas, leurs chiffres ne pourront plus être pris en compte avec le même degré de confiance que ceux des notaires.