Education - Scolarité obligatoire à trois ans : le PS retire son texte au Sénat le jugeant "dénaturé"
Le groupe socialiste du Sénat a retiré dans la nuit du 3 au 4 novembre sa proposition de loi visant à instaurer la scolarité obligatoire à trois ans. Il a jugé son texte "dénaturé" après que la commission des finances du Sénat a considéré comme irrecevables les paragraphes (I et II de l'article premier) faisant passer de six à trois ans l'âge de la scolarité obligatoire pour raisons budgétaires sur demande du gouvernement. A l'ouverture de la discussion générale, le ministre de l'Education nationale, Luc Chatel, a en effet invoqué l'article 40 de la Constitution qui stipule qu'une proposition est irrecevable si elle induit une charge financière supplémentaire pour l'Etat. L'adoption de la proposition de loi "entraînerait la scolarisation de 700.000 à 750.000 élèves de plus, avec un coût pour l'Etat de 1,3 milliard d'euros. Voilà pourquoi j'ai invoqué l'article 40", a justifié le ministre.
La décision de Luc Chatel d'invoquer l'article 40 a provoqué une vive réaction de la nouvelle majorité de gauche sénatoriale. "Le gouvernement a mis le feu", a lancé le chef de file des sénateurs PS, François Rebsamen. La sénatrice de Gironde Françoise Cartron (PS), auteure de la proposition de loi, a évoqué un texte "salvateur" face aux menaces pesant sur les maternelles. "La scolarisation obligatoire des plus petits aurait été la première pierre de la refondation de l'école maternelle. Le Code de l'éducation prévoit seulement un accueil des enfants, mais l'obligation aurait fait de la maternelle une école à part entière", a pour sa part plaidé Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteure de la proposition. "La commission voulait attirer l'attention sur un possible effet pervers : il faut empêcher que la consolidation de la scolarité à trois ans ne renforce les refus à l'égard des deux ans ; il faut mettre fin à une dérive de l'école maternelle vers l'école élémentaire dans ses missions et son organisation", a-elle poursuivi. De son côté, Luc Chatel s'est défendu de toute velléité contre l'école maternelle, "un fleuron qui constitue une spécificité française". Et d'ajouter : "Si je suis persuadé qu'il faudra que cette école fasse partie de la scolarisation obligatoire, je suis convaincu qu'il est trop tôt pour le décider : il faut une concertation avec les parents. Les collectivités locales doivent également être associées à cette évolution car la scolarisation dès deux ans coûterait cher." A la fin de la discussion générale, Françoise Cartron a soutenu : "Le ministre a magnifiquement défendu l'école maternelle et reconnu que 99% des enfants de trois ans sont scolarisés ; je ne comprends donc pas le recours à l'article 40. Un contresens nous a occupés toute la soirée. J'ai déposé, j'y insiste, une proposition de loi tendant à une obligation scolaire non à deux mais à trois ans ; nous laissons le choix aux familles de pouvoir scolariser leur enfant avant trois ans." Elle a finalement décidé de retirer son texte : "Je ne reconnais rien de ce qui est le corps central de notre proposition de loi, je ne vois pas de quoi nous allons débattre, elle a été dénaturée, je propose de la retirer." Par ailleurs, la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin a prévenu : "Dans quinze jours, il y aura une conférence des présidents et nous allons soulever ce point et examiner les suites à donner à ce blocage du gouvernement." Elle a ajouté qu'elle souhaite "contribuer à remettre l'ouvrage sur le métier", pourquoi pas en déposant une nouvelle proposition de loi. "Nous allons en discuter, a-t-elle conclu, car l'affaire ne va pas en rester là."