Insertion - RSA : plus vite ou plus loin ?

L'Assemblée nationale a adopté, le 25 novembre, dans la version issue des travaux de la commission mixte paritaire (voir notre article ci-contre), le projet de loi généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion. Le 27 novembre, le Sénat devrait adopter à son tour le texte, qui pourrait être ainsi rapidement promulgué, sauf improbable recours devant le Conseil constitutionnel.
Intervenant le 24 novembre à l'occasion d'un colloque sur "la contribution de la finance au développement durable" organisé par l'université de Paris-Dauphine, Nicolas Sarkozy a créé la surprise en évoquant une possible accélération de la mise en place du RSA, qui doit normalement être généralisé en juillet 2009. "Nous prendrons des initiatives, peut-être pour accélérer le RSA", a notamment déclaré le chef de l'Etat. Insistant sur la nécessaire contrepartie de l'effort consenti en faveur des acteurs économiques - et plus particulièrement des banques -, il a affirmé que "dans une économie en crise, on doit se mobiliser pour [...] la très grande pauvreté, ceux qui n'ont rien" et qui "sont les premiers à payer". Pour le chef de l'Etat, "ça n'est pas une question de déficit, c'est une question de bon sens". Nicolas Sarkozy n'a toutefois pas précisé les modalités d'une éventuelle accélération de la mise en place du RSA.
S'il paraît difficile de revenir sur la date du 1er juillet prévue par la loi, on peut imaginer une accélération de la publication des textes d'application, qui permettrait un basculement effectif et complet dès la mi-2009. Une autre solution, plus incertaine, pourrait consister à développer les expérimentations, conçues cette fois-ci comme une anticipation de la mise en oeuvre "officielle".
De son côté, Martin Hirsch a écrit le 20 novembre, dans une démarche inhabituelle, à l'ensemble des parlementaires pour les inviter "à mesurer les progrès rendus possibles par l'adoption de ce texte" et à le voter "au-delà des clivages politiques". Dans sa lettre, le haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté insiste sur le fait qu'"au regard du contexte économique, le revenu de solidarité active est plus que jamais nécessaire". Pour en assurer une mise en oeuvre rapide, il fait également part de son intention d'organiser "dans les prochaines semaines, des réunions - dans chaque région, avec tous les acteurs départementaux - de discussion des conditions de mise en oeuvre locales de cette réforme".

 

Le retour du social

Cette possible accélération du calendrier contraste singulièrement avec les rumeurs de l'été dernier, qui évoquaient l'éventualité d'une année blanche en 2009 pour le RSA. Face aux conséquences sociales de la crise économique, cette accélération n'est cependant pas la seule réponse possible. Le gouvernement réfléchit également à un renforcement ou un élargissement des dispositifs de soutien aux personnes en difficulté. Le 3 novembre, lors de son audition, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, par la commission élargie (commission des finances, de l'économie générale et du plan et commission des affaires culturelles, familiales et sociales) de l'Assemblée nationale, Martin Hirsch a évoqué en effet une autre piste possible. Après avoir annoncé que le nombre de Rmistes est reparti à la hausse en septembre, le haut commissaire a insisté sur la nécessité de "préparer les mesures complémentaires qui pourraient se révéler nécessaires". Il s'est fait plus précis en indiquant que "le gouvernement est prêt à étudier dès les prochains jours avec les différents groupes politiques les mesures qui, en fonction des craintes qui peuvent se faire jour pour les différentes tranches de revenus, pourraient être envisagées pour faire jouer à ces différents leviers leur rôle d'amortisseur". L'augmentation et l'anticipation de la prime de Noël ou le brusque redémarrage des contrats aidés - 27.000 entrées en septembre, ce qui devrait permettre d'atteindre le nouvel objectif de 60.000 contrats supplémentaires avant la fin de l'année - sont autant de signes annonciateurs du grand retour du social.
Enfin, ce 25 novembre, Martin Hirsch a indiqué sur RMC qu'il s'apprêtait à remettre le jour même au président de la République et au Premier ministre "quinze propositions, un document d'une centaine de pages qui s'aligne sur trois axes". Et le haut commissaire de déclarer : "Il faut pouvoir soutenir les revenus des plus faibles. Le RSA va arriver, est-ce qu'il faut le mettre plus tôt ? Est-ce qu'il faut faire un dispositif de transition d'ici là ? Il faut pouvoir dire aux gens les plus en difficulté, aux travailleurs pauvres, aux salariés modestes, vous n'allez pas trinquer pendant les premiers mois de la crise." Le contenu de ce document n'a pour l'heure pas été dévoilé par l'entourage du haut commissaire.

 

Jean-Noël Escudié / PCA