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Commande publique - Révision des directives Marchés publics : les pistes de la Commission se précisent

A quel rythme et dans quelle direction le chantier de la révision des directives européennes sur les marchés publics va-t-il avancer ? Abilio Pereira, administrateur à la Commission européenne, a apporté un certain nombre de précisions, avec les réserves qui s'imposent, quant aux grandes pistes vers lesquelles s'engage Bruxelles en vue de moderniser ces directives marchés. Les propos d'Abilio Pereira, venu s'exprimer lors de la 151e session d'étude de l'Association pour l'achat dans les services publics (Apasp), organisée les 27 et 28 septembre, se sont voulus rassurants. Notamment sur la question du calendrier. La Commission devrait en effet déposer son projet de réforme d'ici les mois de novembre ou décembre de cette année mais, compte tenu des délais d'adoption par le Parlement et le Conseil européen ainsi que des délais de transposition, elles ne seront d'application que dans quatre ans. Et ce, dans le meilleur des cas. Il semblerait en outre que la réglementation française ne nécessitera pas de grands bouleversements. En effet, de nombreuses pistes évoquées par le représentant de la Commission figurent déjà dans le Code des marchés publics (CMP), notamment depuis le décret de toilettage du 25 août (décret n°2011-1000, voir ci-contre notre article du 26 août) et son acolyte du 14 septembre (n°2011-1104, voir notre article du 16 septembre).

Premier objectif affiché par la Commission : améliorer la gouvernance et professionnaliser la fonction d'acheteur public. A cette fin, elle envisage de demander aux Etats membres de créer des infocentres auprès desquels les opérateurs économiques pourront trouver toutes les informations nécessaires sur le droit des marchés publics (procédures, etc.). Ou comment faciliter l'accès à la commande publique.
La Commission souhaiterait aussi la mise en place d'un organisme de contrôle des marchés publics au sein de chaque Etat membre. Cet "office des marchés publics", dont une partie des compétences pourrait être laissée à la discrétion des autorités nationales, servirait de point de contact entre les différentes administrations des Etats membres, notamment lors de marchés transfrontaliers. Cet office pourrait également avoir des compétences en matière de statistiques ou pour émettre des avis sur l'application du droit des marchés publics.

Estimant qu'il faut adapter davantage les procédures aux besoins des acheteurs, la Commission souhaiterait inscrire dans les directives deux nouveaux points.
D'une part, une règle sur les conflits d'intérêts pourrait faire son entrée. Au préalable, cette notion devrait être définie au niveau européen et des règles minimales de résolution de ces conflits adoptées.
D'autre part, la Commission envisagerait également d'intégrer et de préciser dans les nouvelles directives la jurisprudence Fabricom de la Cour de justice du 3 mars 2005. Dans cet arrêt, la Cour avait considéré que "la candidature d'une entreprise ayant déjà participé à une étude portant sur l'opération, objet de la consultation, était acceptable si l'entreprise apportait la preuve qu'elle n'avait pas tiré avantage de la situation".

De nombreuses pistes sont évoquées s'agissant d'améliorer l'accès des marchés publics aux PME et entreprises innovantes. La Commission souhaiterait par exemple rendre exhaustive la liste des critères de sélection d'une offre posée aux articles 53 de la directive 2004/18 et du CMP. De même, l'idée d'un ratio par rapport à la valeur du marché comme limite du chiffre d'affaires que la personne publique peut demander aux candidats est envisagée. La Commission souhaiterait également faciliter la sous-traitance en permettant le paiement direct du sous-traitant par le pouvoir adjudicateur. Mais aussi rendre l'allotissement obligatoire en s'inspirant notamment de l'article 10 du CMP. D'autres idées pourraient être exploitées, comme celle de favoriser l'achat groupé transfrontalier ou celle d'encourager l'utilisation de variantes en permettant aux candidats de présenter des variantes sans répondre à l'offre de base. Enfin, la Commission envisagerait de mettre en place un régime allégé pour les services sociaux, notamment en mettant en place des seuils plus élevés ou en leur permettant de privilégier certains critères par rapport à d'autres (par exemple la qualité).
La Commission pourrait proposer d'instaurer un régime allégé pour les petits pouvoirs adjudicateurs. Dès lors, ce concept devra être défini au niveau européen. Ainsi, ces petits pouvoirs adjudicateurs pourraient se voir appliquer des délais plus flexibles, mais aussi une utilisation élargie des avis de pré-information.

En termes, toujours, de simplification des procédures, la Commission envisagerait également de réduire les documents à transmettre en généralisant les déclarations sur l'honneur et de créer un passeport européen de la commande publique (document qui attesterait pour un opérateur économique donné toute une série d'informations telles que l'attestation fiscale, le casier judiciaire…).
Par ailleurs, Bruxelles souhaiterait encourager la dématérialisation en prévoyant par exemple des procédures entièrement dématérialisées pour les centrales d'achats et en simplifiant le fonctionnement des systèmes d'acquisition dynamique.
Enfin, la Commission envisage une réduction généralisée des délais de présentation des offres et entend faire de la procédure négociée une procédure commune de l'achat public.

Utiliser le droit des marchés publics à des fins stratégiques, c'est-à-dire à des fins autres que le meilleur rapport qualité/prix ? Jusqu'à présent, la Commission a été stricte sur ce point : le droit européen des marchés a pour objectif de permettre aux pouvoirs adjudicateurs d'acheter le mieux possible au prix le plus bas possible et non de servir d'autres politiques n'ayant rien à voir avec les marchés publics et risquant de fausser la concurrence ou d'orienter le choix de l'acheteur. Ce principe pourrait être assoupli.