Tourisme - Quel impact du tourisme sur le climat en France ?
On connaissait déjà l'impact du climat sur le tourisme : le réchauffement climatique pourrait en effet avoir des conséquences très directes sur les activités de sports d'hiver, à travers le raccourcissement de la saison, la remise en cause de l'activité pascale ou la fragilisation des stations de moyenne montagne (voir notre article ci-contre du 29 mars 2007). Mais l'étude publiée par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) - du ministère de l'Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement - repose sur une approche exactement inverse. Autrement dit, quel est l'impact actuel de l'activité touristique sur le climat et comment cet impact est-il susceptible d'évoluer dans les prochaines années ?
10 à 11% des émissions nationales de gaz à effet de serre
Intitulée "Les stratégies nationales du tourisme et du climat", l'étude entend "faire le point sur la contribution des activités touristiques à la production d'émissions de gaz à effet de serre et sur l'impact réciproque des mesures du Grenelle de l'environnement sur l'activité touristique et des mesures prises en matière de développement touristique sur la politique climatique française". Tout en reconnaissant que la contribution du tourisme aux émissions de gaz à effet de serre (GES) n'est encore évaluée que de façon parcellaire, la DGEC rappelle que le tourisme est à l'origine d'environ 5% des émissions mondiales de CO2. Cette contribution a une triple origine : les transports (75% des émissions liées au tourisme), l'hébergement (21%) et les activités touristiques proprement dites (4%). En France, l'activité touristique a un impact supérieur sur le climat, car notre pays est la première destination touristique mondiale et accueille plus de 8% des arrivées touristiques internationales. Curieusement, la France ne dispose pourtant pas - contrairement à l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) - d'estimations portant sur les trois volets de l'activité touristique. En revanche, le transport touristique représente, à lui seul, 8% des émissions françaises de GES. Si l'on suppose que le rapport entre les trois sources est le même que celui observé au niveau mondial, la contribution du tourisme français aux émissions de GES pourraient donc se situer entre 10 et 11% du total. De façon logique - puisque les chiffres officiels ne portent que sur le seul volet des transports -, l'étude montre que la production de GES est très concentrée sur une typologie de touristes dits "hypermobiles" (essentiellement les Français se rendant régulièrement à l'étranger pour tourisme d'agrément ou d'affaires). Ainsi, 5% de l'ensemble des touristes français contribuent à 48% des émissions, et 20% d'entre eux à 80% des émissions.
Des scénarios fortement divergents
Au-delà du constat, l'étude de la DGEC s'efforce également de dégager des perspectives d'évolution. Un groupe d'experts mandatés par l'OMT estime ainsi que les émissions de GES dues au tourisme pourraient tripler à l'horizon 2035. La conséquence en est une prise de conscience mondiale du lien entre tourisme et climat : "Le tourisme devient aujourd'hui un enjeu pour la politique climatique, et ce sous l'impulsion des organisations internationales en charge de la question touristique et principalement l'OMT". En France, plusieurs scénarios ont été étudiés, allant du "maximaliste" (+767% d'émissions de CO2 à l'horizon 2050) au scénario "développement durable" (politique volontariste de division par quatre des émissions), en passant par le scénario "tendanciel" (+106% à l'horizon 2050).
Tout en soulignant son rôle dans l'évolution du climat, la DGEC reconnaît que le tourisme n'a pas fait l'objet d'une approche spécifique au sein du Grenelle de l'environnement (pas de groupe de travail consacré à ce thème). Néanmoins, les mesures du plan Climat ont "un impact certain sur l'ensemble des branches de l'activité touristique". L'étude cite notamment celles relatives aux transports et aux bâtiments. Il souligne aussi les "co-bénéfices" des politiques climatique et touristique. Par exemple, l'amélioration de l'isolation et de la ventilation des hébergements touristiques accroît aussi le confort de ces derniers. Il reste cependant à déterminer - et c'est l'objet de la dernière partie de l'étude - s'il ne faut pas envisager des mesures spécifiques au tourisme en matière de politique climatique. Il apparaît en effet que "les mesures existantes, compte tenu des tendances observées en matière de demande touristique, pourraient [...] ne pas être suffisantes". LA DGEC encourage donc les acteurs concernés à poursuivre "la réflexion sur les moyens à mettre en place pour assurer une politique de développement du tourisme volontariste tout en contribuant à l'atteinte des objectifs de la France en termes de lutte contre le changement climatique [...] (renforcement d'une filière touristique exemplaire, renforcement de la gestion environnementale notamment des compagnies aériennes, quotas d'émissions pour les bâtiments...)".