Qualité de l'air, traitement des eaux urbaines : la France doit - encore - mieux faire
La France est sommée par la Commission européenne de se conformer à plusieurs normes communautaires, notamment en matière de qualité de l'air et de de traitement des eaux urbaines résiduaires. Le Parlement européen vient de son côté d'adopter définitivement le règlement sur la réutilisation des eaux usées urbaines traitées.
Crise ou pas, la Commission continue de veiller au respect de la législation communautaire par les États membres et de donner chaque mois bons – en clôturant les dossiers d'infractions – et mauvais points, qui prennent la forme graduelle de la mise en demeure, de l'avis motivé et de la saisie de la Cour de justice. Elle a toutefois prolongé les délais de réponse aux procédures d'infraction lancées depuis le début de l'année afin de tenir compte des affres de la crise.
La France – comme les autres États membres – est une nouvelle fois épinglée, comme souvent principalement dans le domaine environnemental. Outre les carences en matière d'accès à l'information environnementale déjà évoquées hier (voir notre article), la Commission déplore ses manquements en matière de qualité de l'air et de de traitement des eaux urbaines résiduaires.
Le lancinant problème de la qualité de l'air
La Commission a décidé d'adresser à la France une lettre de mise en demeure de transposer correctement la directive (UE) 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (voir notre article), qui prévoit des engagements nationaux de réduction des émissions d'oxydes d'azote (NOx), de composés organiques volatils non méthaniques, de dioxyde de soufre (SO2), d'ammoniac (NH3) et des particules fines (PM2,5) affectant aussi bien les humains (problèmes respiratoires, maladies cardiovasculaires et cancers) que les écosystèmes. La Commission reproche singulièrement à la France de ne pas avoir transposé l'exigence de mise à jour, au moins tous les quatre ans, de ses programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique.
Il faudra donc une nouvelle fois remettre sur le métier l'ouvrage – dans les quatre mois – alors que le gouvernement vient de publier le 29 avril dernier un décret complétant les plans de protection de l'atmosphère afin de répondre… à une condamnation de la CJUE, relative cette fois à une mauvaise application de la directive n° 2008/50/CE sur la qualité de l'air (voir notre article).
Ce dossier fait décidément figure de sparadrap du capitaine Haddock pour l'État français. Ses – mauvais – résultats en la matière sont régulièrement dénoncés et sanctionnés par les différentes autorités. Entre autres (le dossier étant malheureusement bien plus ancien), rapport de la Cour des comptes en janvier 2016 (voir notre article), décision du Conseil d'État en juillet 2017 (voir notre article), condamnation, donc, de la CJUE en octobre dernier (voir notre article) et tout récemment encore des tribunaux administratifs de Montreuil ou de Lille (voir notre article).
Eaux urbaines résiduaires : dernière étape avant la CJUE
La Commission demande également instamment à la France de respecter les règles de l'Union en matière de traitement des eaux urbaines résiduaires, et singulièrement de veiller à ce que ces dernières soient collectées et traitées de manière adéquate, comme l'exige la directive 91/271/CEE.
La Commission souligne que pour les agglomérations de 2.000 personnes ou plus, le traitement exige non seulement l'élimination de la matière solide, mais aussi la dégradation des substances organiques par l'utilisation de bactéries. Or, déplore-t-elle, les défauts de conformité demeurent répandus dans l'Hexagone, 169 agglomérations rejetant leurs eaux dans des zones soit normales, soit sensibles. Si la Commission relève "quelques progrès", elle estime qu'une "pleine mise en conformité avec la directive n'est pas attendue dans un avenir proche". Faute de remédier à la situation dans les quatre mois, la France pourrait se retrouver une nouvelle fois devant la CJUE. Une situation qu'elle connaît bien puisqu'elle a déjà été condamnée par le passé pour manquement à ses obligations dans ce domaine (voir notre article).
Un nouveau règlement pour favoriser la réutilisation des eaux urbaines
Hasard ou coïncidence, relevons par ailleurs que le Parlement européen a adopté définitivement le 13 mai le règlement "relatif aux exigences minimales applicables à la réutilisation de l'eau", proposé en mai 2018. Contrairement à ce que son intitulé pourrait laisser entendre, ce texte – qui ne nécessite pas de transposition – vise à favoriser la réutilisation des eaux usées urbaines traitées dans une station de recyclage, notamment aux fins d'irrigation agricole, afin d'atténuer la pression sur les masses d'eau et les nappes phréatiques.
Les mesures ne s'appliqueront toutefois que dans trois ans.