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Protection de l'enfance - Protocole Justice-départements sur les MIE : une avancée à consolider et à améliorer

Le gouvernement a rendu public un rapport sur l'évaluation du dispositif relatif aux mineurs isolés étrangers (MIE), mis en place par le protocole et la circulaire du 31 mai 2013 (voir notre article ci-contre du 4 juin 2013). Il s'agit, en l'occurrence, de la mise en œuvre de l'accord entre le ministère de la Justice et l'Assemblée des départements de France (ADF). Les principales innovations concernent une clarification des rôles entre l'Etat et les départements, ainsi que la mise en place d'un système de répartition géographique des arrivées de MIE, afin d'éviter que la charge pèse essentiellement sur un nombre restreint de départements (comme la Seine-Saint-Denis, avec la proximité de Roissy).

Une avancée dans la solidarité interdépartementale

Le rapport a mobilisé six inspecteurs issus de pas moins de trois corps d'inspection : Inspection générale des affaires sociales (Igas), Inspection générale de l'administration (IGA) et Inspection générale des services judiciaires (IGSJ). Il dresse un bilan nuancé du dispositif.
Côté positif, les trois inspections générales saluent "une avancée dans l'harmonisation des pratiques et l'organisation de la solidarité interdépartementale à l'échelle nationale". L'accord et la circulaire de 2013 ont notamment permis "de créer un cadre de référence pour l'accueil et l'évaluation des jeunes étrangers isolés". En termes de rééquilibrage géographique, le dispositif - et plus précisément la cellule d'orientation nationale placée auprès de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) - s'est montré plutôt efficace. Un an après la mise en place de la réforme, 70 départements ont contribué à cette solidarité en accueillant des MIE qui n'étaient pas entrés par leur territoire, tandis que 25 autres bénéficiaient d'un "allègement" de leur nombre de MIE. Et cela malgré l'entrée tardive de certains départements dans le dispositif et la réticence persistante de certains conseils généraux envers le dispositif.

Une fragilité persistante

Le rapport souligne toutefois la fragilité des résultats ainsi obtenus. Fragilité juridique tout d'abord, car les recours introduits contre la circulaire du 31 mai 2013 par une douzaine de départements restent toujours pendants devant le Conseil d'Etat. Au-delà du résultat de cette instance, les rapporteurs insistent sur la nécessité de revoir certains aspects du dispositif : définition plus précise de la notion de danger (plus large que la seule notion d'isolement), nécessité d'un encadrement judiciaire de l'examen d'âge osseux, prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant dans l'orientation des MIE...
Sur le plan budgétaire, les 10,4 millions d'euros de l'Etat destinés à accompagner les départements étant en voie d'épuisement, les inspections générales considèrent que "l'arrêt de cette aide, que l'on ne peut pas considérer comme la compensation d'un transfert de compétence, enverrait un signal négatif pour l'implication des collectivités". Le coût de son maintien serait de l'ordre de 9,5 millions d'euros par an.

La nécessité d'"ajustements opérationnels"

Le rapport appelle également à de "nombreux ajustements opérationnels". On en retiendra notamment la nécessité d'homogénéiser les pratiques locales d'évaluation (avec, par exemple, des délais qui vont aujourd'hui de 2 à 17 jours selon les départements). De même, les rapporteurs plaident pour une mutualisation des évaluations, afin de permettre une montée en compétence. Cette mutualisation serait portée par les préfets de région, en concertation avec les départements.
Le rapport recommande par ailleurs d'améliorer les modalités de recours à l'expertise documentaire (expertise des papiers et autres documents), confiée notamment à la police de l'air et des frontières (PAF). Il en va de même pour ce qui concerne l'expertise médicale d'âge osseux, pour laquelle les rapporteurs préconisent "une concertation entre les professionnels concernés en vue de dégager une doctrine d'emploi de cet examen".
Sur la gouvernance du dispositif, les inspections générales plaident pour un renforcement du pilotage et une évolution vers davantage d'interministérialité, avec en particulier un cadrage du dispositif par une circulaire du Premier ministre et le développement d'outils statistiques performants.

 

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