Culture - Projet de loi création : la commission des affaires culturelles de l'Assemblée revient à son texte
Après les nombreux amendements introduits par le Sénat (voir notre article ci-contre du 24 février 2016), le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine est revenu devant l'Assemblée nationale. La commission des affaires culturelles et de l'éducation lui a consacré pas moins de trois séances, avant l'examen en séance publique, du 21 au 23 mars. A cette occasion, la commission et le gouvernement - qui a fait adopter une soixantaine d'amendements - sont revenus sur la plupart des modifications introduites par le Sénat, ramenant ainsi, pour l'essentiel, le texte à sa rédaction initiale.
Rétablissement des mesures de protection de l'Inrap
La mesure introduite par le Sénat et imposant le regroupement des collections publiques "inexploitées" des musées dans des musées "Pôles nationaux de référence" s'est ainsi transformée en une simple possibilité.
De même, la commission des affaires culturelles a rétabli les différentes mesures visant - de fait - à protéger l'Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) de la concurrence des opérateurs privés et des services archéologiques des collectivités.
Autre modification intéressant les collectivités : alors que le Sénat avait prévu que la présidence de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture est assurée par "une personne titulaire d'un mandat électif qui en est membre", la commission en a fait une simple possibilité.
Sur le patrimoine, qui a focalisé l'attention avant et pendant les débats en première lecture (voir nos articles ci-contre des 21 janvier et 11 février 2016), le gouvernement avait lui-même amendé son texte au Sénat, afin de rassurer les collectivités territoriales, et n'est donc pas revenu sur son contenu. La commission a toutefois procédé à une modification sémantique : pour éviter la confusion qui risquait de s'installer entre le plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) - qui remonte à la loi Malraux de 1962 et couvre les dispositifs du même nom - et le nouveau "plan de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine", elle a décidé de rebaptiser ce dernier... "plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine".
Sortie définitive pour les "cités historiques" et retour des éoliennes
En revanche la commission des affaires culturelles a entériné le remplacement, voté par le Sénat, de la dénomination très contestée de "cités historiques" par celle, plus neutre, de "sites patrimoniaux protégés" pour définir le nouveau dispositif de protection destiné à fondre dans un seul ensemble les secteurs sauvegardés, les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (Avap) et les zones de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP).
Enfin, les députés ont largement cédé à l'intense pression du lobby de l'énergie éolienne. Alors qu'un amendement adopté au Sénat prévoyait - pour limiter la pollution visuelle du patrimoine (on se souvient de l'affaire du projet d'éoliennes géantes dans la baie du mont Saint-Michel qui aurait abouti sans l'intervention de l'Unesco) - un avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France pour tout projet d'éoliennes dans un rayon de 10.000 mètres autour d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques, les députés ont adopté un amendement du président de la commission des affaires culturelles qui instaure une protection très théorique. A la place de l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France, il suffira en effet d'un simple avis - non contraignant - de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (adopté en seconde lecture par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale le 16 mars, examiné en séance publique du 21 au 23 mars 2016).