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Tourisme de mémoire - Profusion des musées sur la Grande Guerre, quel avenir après le centenaire ?

Les musées consacrés à la Première Guerre mondiale se multiplient depuis 2010 dans le Nord de la France, quitte à faire peser une incertitude sur leur viabilité. Car que deviendront-ils après 2018, passé "l'effet centenaire".

Musée de Meaux en 2011, Bullecourt en 2012, Fromelles en 2014, Souchez en 2015 ou encore Thiepval en mai 2016... La liste des nouveaux musées ou mémoriaux retraçant l'histoire de la "Der des Der", ou une bataille, complète une offre déjà pléthorique, avec (entre autres) Péronne, Verdun, Seclin, Albert, Arras et sa carrière Wellington ou encore Compiègne. "Bien sûr, le soufflé va retomber, il ne faut pas qu'on se leurre", prévient Michel Rouger, directeur du musée de Meaux, qui a couté 30 millions d'euros et a connu un pic de fréquentation en 2014 (133.300 contre 86.000 en 2015). "Je ne m'en fais pas pour les locomotives que sont Verdun, Péronne, Thiepval et nous. Je craindrais presque pour tous ces petits musées, est-ce qu'ils vont tirer leur épingle du jeu après le centenaire ?", s'interroge-t-il.

Péronne, symbôle de décentralisation culturelle

Dans l'histoire des musées de la Première Guerre mondiale, Péronne, qui a ouvert en 1992, a introduit une "vraie rupture", marquant une étape "de la décentralisation culturelle" et une "affirmation du pouvoir des collectivités territoriales", dans un territoire "en marge" comme la Somme, note la géographe Anne Hertzog, spécialiste du patrimoine de la Grande Guerre.
Le tourisme de mémoire, particulièrement important dans les pays du Commonwealth, a ensuite permis de légitimer l'essor de musées de moindre taille, comme celui de Fromelles. "Près de 40% de nos visiteurs viennent d'Australie", souligne ainsi Claire Fillassiez, directrice de cet établissement situé près de Lille, qui a accueilli 12.000 visiteurs en 2015.
D'autres musées se sont eux "institutionnalisés" dans le sillage de collections particulières comme à Bullecourt, dans le Pas-de-Calais, où une famille d'agriculteurs avait commencé à récolter divers objets de la bataille de 1917.
A Souchez, au pied de l'imposante nécropole de Notre-Dame-de-Lorette et de l'anneau de mémoire rendant hommage aux 600.000 victimes, de toutes nationalités, du conflit dans le Nord/Pas-de-Calais, le "centre d'histoire guerre et paix", gratuit et d'un coût de neuf millions d'euros, a été construit "pour combler un manque", selon David Pierru, chef de projet à la communauté d'agglomération de Lens-Liévin. "Les visiteurs, qui venaient voir Notre-Dame-de-Lorette comprenaient qu'il y avait eu des événements importants mais ne pouvaient pas les appréhender", plaide-t-il.

Effet de saturation ?

Les directions de ces musées le clament en chœur : chacun a bien sa place et sa spécificité, avec comme tendance de fond de privilégier une histoire plus sociale et culturelle que militaire. "On ne se duplique pas!", lance Hervé François, directeur du musée de Thiepval, qui se prépare à accueillir la famille royale britannique le 1er juillet pour les 100 ans de la bataille de la Somme.
Ainsi, ces musées qui voient le jour avec une muséographie plus vivante tentent d'apporter une touche originale, comme cette impressionnante fresque de 60 m de long, "pièce-maitresse" du nouvel établissement de Thiepval et signée de l'auteur de bandes dessinées Joe Sacco qui retrace les 24 heures de la première journée de l'offensive meurtrière.
"Il peut toujours y avoir une saturation, l'effet centenaire peut retomber, mais regardez les châteaux et les spectacles du Moyen Age, les gens y vont toujours!", explique Hervé François. "Mais il va falloir toutefois être raisonnable, c'est pour cela que plutôt que de travailler dans une logique concurrentielle, nous avons commencé à engager un dialogue entre musées et créé un pass", qui offre un tarif réduit à sept musées, de l'Aisne à Ypres (Belgique), ajoute-t-il.
Autre écueil pour ces établissements : faire revenir les visiteurs alors que la thématique, sombre, peut plomber le moral. "Les expositions temporaires doivent nous permettre de renouveler le sujet, explique Michel Rouger. Nous en avons fait une sur la bande dessinée qui a permis de toucher un public qui ne serait pas venu sans cela".

 

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