Archives

Santé - Prévention sanitaire : les collectivités peinent à trouver leur place

Un rapport publié par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale montre que la place des collectivités et matière de prévention sanitaire reste importante mais incertaine malgré le recentrage opéré par la loi du 13 août 2004. Au flou dans la répartition des rôles entre Etat et collectivités s'ajoutent les chevauchements entre les différentes collectivités.

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale publie son rapport d'information sur la prévention sanitaire, déposé en conclusion des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss). Ce document - présenté par Jean-Luc Préel, député de la Vendée, vice-président de la commission des affaires sociales et chef de service hospitalier - s'appuie notamment sur un rapport de la Cour des comptes commandé par l'Assemblée et consacré au même sujet, ainsi que sur l'audition de nombreux experts et acteurs de la santé publique. Les conclusions de la Mecss apparaissent plutôt pessimistes. Le rapport d'information pointe en effet "une situation paradoxale" : celle de "vastes ambitions portées par de multiples acteurs, pour des résultats décevants".

La loi du 13 août 2004 : un coup d'épée dans l'eau ?

Parmi les faiblesses relevées par la Mecss figurent le manque de culture de la prévention et "des moyens financiers consacrés à cette politique [qui] sont insuffisamment mobilisés". Mais "surtout, en la matière, le problème français tiendrait à une absence de pilotage, à des priorités mal identifiées, à une coordination insuffisante entre les acteurs qui concourent à la prévention, ainsi qu'à des actions transversales insuffisantes aggravées par le caractère parcellaire des données de santé".
Le rapport ne manque pas de s'intéresser au rôle des collectivités territoriales en matière de prévention sanitaire. Certes, ces dernières ont vu leurs compétences en ce domaine rognées par l'acte II de la décentralisation et la loi du 13 août 2004. Mais nombre de collectivités continuent de s'y investir, directement ou en partenariat avec d'autres acteurs. Le rôle des collectivités dans le programme national Nutrition-Santé (PNNS) - avec son label "villes actives" - ou dans certains programmes spécifiques de lutte contre l'obésité infantile, comme Epode, en est un bon exemple (voir nos articles ci-contre). La dimension de prévention est même de plus en plus prégnante dans certaines politiques sociales, comme celle en faveur des personnes âgées. Le rapport observe aussi que "le département a conservé une compétence en matière de protection maternelle et infantile (PMI)".

Des chevauchements entre collectivités

Pour autant, la place des collectivités reste assez incertaine. Le rapport relève ainsi que l'absence de coordination et les "frontières incertaines entre différentes actions", observées à l'échelon national, "se retrouvent au niveau territorial". Ainsi, "malgré la clarification apportée par la loi d'août 2004, qui a opéré un recentrage des actions de prévention vers l'Etat, les départements peuvent continuer à participer à des actions de prévention en matière de dépistage et de politique vaccinale dans un cadre conventionnel". C'est le cas notamment pour le dépistage du cancer du sein, mais aussi pour le dépistage des maladies sexuellement transmissibles et du VIH, avec le financement, au moins partiel, de centres d'information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles, ainsi que de centres de dépistage anonyme et gratuit du VIH et des hépatites B et C.
A ce flou dans la répartition des rôles entre l'Etat et les collectivités, s'ajoutent les chevauchements entre les différentes collectivités. La Mecss rapporte ainsi, à titre d'illustration, les propos d'un maire entendu par le groupe de travail : "Les communes, les départements et les régions méconnaissent les différents intervenants : nous ignorons les compétences de chacun." De ce point de vue, les agences régionales de santé (ARS) constituent une opportunité et une avancée évidentes. Mais il leur reste à faire leurs preuves dans la coordination d'un domaine qui ne constitue pas forcément leur première priorité. La mise en place des "commissions de coordination des politiques publiques de santé, associant les services de l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements et les organismes de sécurité sociale" (article L.1432-1 du Code de la santé publique) pourrait néanmoins en fournir l'occasion, même si ces instances ne se sont guère fait entendre jusqu'à présent (voir notre article ci-contre du 13 avril 2010).

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : Assemblée nationale, rapport d'information sur la prévention sanitaire déposé par la commission des affaires sociales en conclusion des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (enregistré le 8 février 2012).

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis