Ville - Politique de la ville : une réforme... en 2012

"C'est une déception" a déclaré Claude Dilain, le maire PS de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) après l'installation par François Fillon du nouveau Conseil national des villes le mardi 25 mai. "Une petite déception" pour Catherine Arenou, le maire UMP de Chanteloup-les–Vignes (Yvelines). Il faut dire que les réactions après le discours du Premier ministre sont à la mesure des attentes qu'il avait suscitées : quelle que soit leur couleur politique, les maires de banlieue attendaient depuis plusieurs mois des engagements clairs sur la nouvelle géographie de la politique de la ville, la réforme de la péréquation, l'avenir des contrats urbains de cohésion sociale (Cucs) et de la rénovation urbaine. Or, sur tous ces sujets, le Premier ministre a essentiellement appelé les acteurs de la politique de la ville à la patience.

 

"La DSU sera maintenue au même niveau qu'en 2011"

Lors de la conférence sur les déficits publics, le 20 mai, le président de la République avait annoncé que les concours de l'Etat aux collectivités territoriales seraient gelés en valeur sur la période 2011-2013. "Pour rétablir nos comptes publics, tout le monde doit s'engager!", a confirmé François Fillon le 25 mai. Cependant, "le gouvernement poursuivra ses efforts en faveur de la péréquation et des territoires les plus en difficulté. La dotation de solidarité urbaine sera maintenue au même niveau qu'en 2011." Une formule curieuse puisque si on connaît aujourd'hui la dotation 2010, celle de 2011 reste un mystère. Cette déclaration a été diversement interprétée par les élus présents : certains ont compris que le montant de la DSU n'augmenterait pas entre 2010 et 2011, donc serait maintenu à 1,2 milliard d'euros. Ainsi, François Pupponi (PS, député-maire de Sarcelles) s'inquiète : "Si le montant de la DSU n'augmente pas en 2011, on ne pourra pas fonctionner." D'autres se satisfont "d'une transition en douceur" et espèrent que la progression sera la même entre 2010 et 2011 qu'entre 2009 et 2010, soit plus 6% (environ plus 70 millions d'euros). Bref, il faudra attendre la vraie présentation (et accessoirement le vote) du projet de loi de finances pour 2011 pour en savoir plus. Mais surtout, le Premier ministre a ajouté qu'il ne pouvait y avoir de réforme de la DSU avant "une analyse fine des effets de la suppression de la taxe professionnelle". Rappelons que l'inspecteur général des finances Bruno Durieux doit remettre avant le 1er juin au Parlement un premier rapport sur cette réforme. "Il sera ensuite procédé, le cas échéant, à des ajustements en loi de finances", a indiqué François Fillon sans préciser comment ces ajustements s'articuleraient avec le maintien du volume de la DSU.

 

Périmètre des ZUS, avenir des Cucs : "Ne mettons pas la charrue avant les bœufs"

Le rapport André-Hamel, rendu à l'automne dernier avait appelé à une réforme de la géographie prioritaire afin de mieux cibler les crédits en direction de zones les plus en difficulté. Un objectif largement partagé par les acteurs de la politique de la ville. Mais, pour François Fillon, ce n'est pas l'heure de s'engager dans cette révision, en tout cas pas avant que la réforme territoriale soit largement engagée : "Ne mettons pas la charrue avant les bœufs : une meilleure articulation entre région et département grâce à la création des conseillers territoriaux, la clarification des compétences entre les différents niveaux de collectivités favoriseront le dynamisme de notre politique de la ville." Il faut "prendre le temps de préparer une réforme ambitieuse" : les ZUS et les Cucs actuels seront donc "prolongés" dans la loi de finances 2011. Cependant, une expérimentation est prévue. Elle consistera en la négociation d'avenants sur les Cucs d'une "cinquantaine de villes ou agglomérations" : "Ces contrats devront comporter des engagements sur les politiques de droit commun - notamment l'emploi, l'éducation et la sécurité - et se fonder sur un véritable projet territorial." "L'expérience de ces premiers contrats, élaborés en collaboration avec les élus locaux, nous permettra d'affiner le dispositif."

 

Un projet de loi "préparé en 2011"

En conclusion de son discours, le Premier ministre a ajouté : "L'objectif sera ensuite de finaliser une réforme cohérente de la politique de la ville, les modalités de contractualisation mais aussi la péréquation et la dotation de solidarité urbaine. Un projet de loi sera préparé en 2011." Il aurait été surprenant après ce discours que les 55 membres du Conseil national des villes nommés en février dernier pour 3 ans (dont de nombreux élus et responsables de fédérations associatives) affichent un enthousiasme immodéré. La seule vraie annonce à la sortie de ce premier CNV est celle de Fadela Amara. Bien que s'étant prononcée publiquement à de nombreuses reprises pour une révision des ZUS dès 2010, une renégociation des Cucs au plus vite et en faveur d'une poursuite de la rénovation urbaine, la secrétaire d'Etat a indiqué qu'elle était "satisfaite d'avoir obtenu des arbitrages" et qu'il n'y avait donc "pas de raison pour qu'(elle) démissionne".

 

Hélène Lemesle

 

Le Conseil national des villes

Créé en 1988, le Conseil national des villes (CNV) est une instance consultative présidée par le Premier ministre qui concourt à l'élaboration de la politique de la ville. Il émet des avis, propositions ou recommandations sur saisine du gouvernement ou de sa propre initiative, il est consulté sur les projets de loi concernant la politique de la ville et suit le développement de la démocratie de proximité et de la participation des habitants. Il est composé de 55 membres : 25 parlementaires et maires, 15 représentants d'associations et d'organismes participant à la mise en oeuvre de la politique de la ville et des partenaires sociaux, 15 personnalités qualifiées. Les membres du CNV ont été renouvelés par arrêté du 16 février 2010. Nathalie Appéré, adjointe au maire de Rennes et Xavier Lemoine, maire de Montfermeil, en sont les vice-présidents.


 

 

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