Finances locales - Gilles Carrez prône le gel absolu des dotations de l'Etat aux collectivités
Les dotations de l'Etat aux collectivités locales (50,8 milliards d'euros en 2010) doivent rester "stables en valeur", vient de préconiser Gilles Carrez, président du groupe de travail sur la dépense locale, qui livrera ses conclusions finales d'ici la tenue, le 20 mai prochain, de la conférence des déficits publics. "L'Etat avec tous ses déficits ne peut plus assurer l'indexation (sur l'inflation) des dotations dans les prochaines années", a expliqué le député à l'AFP. "A partir de là, il faut que les collectivités locales s'adaptent", a-t-il poursuivi. Le très influent rapporteur général du Budget, qui préside aussi le Comité des finances locales, avait déjà déclaré à la fin de l'été dernier que, pour lui, le gel strict des dotations de l'Etat n'était pas inenvisageable. Il excluait toutefois une évolution à la baisse des dotations.
Ces annonces interviennent à l'issue d'une série de réunions hebdomadaires du groupe de travail qui réunit des représentants des collectivités territoriales et des ministères concernés. Réalisé avec l'aide des professeurs Alain Guengant et Guy Gilbert, deux éminents spécialistes des finances locales, un état des lieux de la dépense locale a été dressé. Il met notamment en exergue la forte corrélation entre le potentiel financier des communes et le niveau de leurs dépenses. Pour faire simple : plus une ville est riche, plus sa propension à dépenser est grande. Or, ces dépenses sont-elles toujours bien nécessaires ? Récemment, le président du Comité des finances locales s'est interrogé devant des journalistes sur ce sujet. En matière de sécurité par exemple, il se demandait en substance si telle ville riche a vraiment besoin de dépenser des milliers d'euros pour équiper ses rues de caméras de vidéo-surveillance, alors que telle autre, moins aisée, ne dispose pas des moyens pour en acheter.
Indispensable péréquation
L'Association des petites villes de France dénonce un "nouveau tour de vis" imposé aux collectivités locales. Elle rappelle que les maires n'ont pas prise sur la plupart des dépenses communales (qu'il s'agisse des dépenses liées à l'inflation des normes, au déroulement de carrière des agents territoriaux ou au prix des matières premières...).
Philippe Laurent, président de la commission Finances de l'Association des maires de France déclare, lui, ne pas être surpris par la proposition de Gilles Carrez. Il pose les conditions de son application. Un gel devra "impérativement s'accompagner de la mise en oeuvre d'une politique de péréquation plus déterminée". Pour le maire de Sceaux, "cela signifie clairement que, pour certaines collectivités disposant d'un potentiel financier plus élevé que la moyenne, le gel global se traduira par un prélèvement net sur leurs ressources. Ce mouvement a certes été amorcé en 2009, mais il devra nécessairement être amplifié", conclut-il.
Les élus locaux sont satisfaits par l'absence de propositions consistant à imposer un objectif de dépense pour les collectivités - l'équivalent de l'Ondam qui s'applique aux dépenses de santé. Le rapporteur général du Budget avait, dès le début, déclaré qu'il était hostile à cette solution préconisée par le rapport remis en mars 2009 par le comité pour la réforme des collectivités locales.
Gilles Carrez va proposer, par ailleurs, de revoir les dispositifs sociaux gérés par les départements, afin qu'ils soient moins coûteux, affirme le quotidien Les Echos dans son édition du 29 avril.
Thomas Beurey / Projets publics
Boom des dépenses communales
En vingt ans, les dépenses des départements et des régions sont restées quasi stables (hors transferts), tandis que celles des communes et intercommunalités ont progressé à un rythme supérieur à la croissance du PIB, constatent les experts de Bercy. Les plus dépensiers ne sont donc pas forcément ceux que l'on croit. "Attention aux lectures trop rapides", réagit Philippe Laurent, président de la commission Finances de l'Association des maires de France. "Si l'on met de côté les transferts de compétences, les départements ne font rien de plus qu'en 1980, ils en font même peut-être moins. Dans les Hauts-de-Seine par exemple, les crèches départementales ont été municipalisées. Les communes, elles, en font beaucoup plus qu'il y a 20 ans, du fait de la demande sociale", analyse Philippe Laurent.