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Pôles de compétitivité - PME cherchent financements désespérément

Lenteurs des versements de fonds publics, frilosité des banques : les PME des pôles de compétitivité font face à un problème de trésorerie au moment de lancer leurs projets. La journée Capital pôles, organisée à Bercy le 18 avril, a permis de rompre la glace entre patrons de PME et investisseurs privés.

"Les PME sont confrontées à trois problèmes de financement : le financement très précoce pour prototyper l'innovation, le capital-risque, qui doit encore être amélioré, et la question de la consolidation à plus huit ans pour les pôles les plus anciens." Albert Ollivier, responsable de l'axe financement des PME et de l'innovation au sein du pôle Finance innovation, pointe les difficultés rencontrées par bon nombre de PME au sein des pôles de compétitivité. Cette question était au coeur de Capital pôles, une rencontre organisée le 18 avril à Bercy pour permettre aux dirigeants de PME de rencontrer des investisseurs privés. Preuve de ce besoin : les organisateurs - la direction générale des entreprises (DGE) et la Caisse des Dépôts - ont été submergés par les demandes de rendez-vous d'affaires, 3.500 au total quand ils ne pouvaient en honorer que 450.
Le financement des pôles est assuré à 55% par la puissance publique (Etat et collectivités), le reste par les entreprises. L'Etat a ainsi consacré 887 millions d'euros aux 71 pôles de compétitivité depuis leur création en 2006. Ce qui ne signifie pas que tout cet argent ait été versé. Car entre la validation du projet et son financement, la procédure est longue. Une procédure inadaptée aux besoins des PME qui doivent démarrer leur recherche et garder une longueur d'avance sur leurs concurrents. "A partir du moment où le projet est retenu, il peut s'écouler entre six et huit mois avant que les fonds ne parviennent à l'entreprise. Il faut pouvoir raccourcir ces délais pour que les entreprises puissent démarrer la recherche", a fait remarquer Marcel Deruy, président de Lyon place financière.

Opération-test en Rhône-Alpes

Les PME ont donc recours à l'autre source de financement. Même si le label "pôle de compétitivité" est rassurant pour les banquiers, il n'est pas suffisant. C'est un problème récurrent en France : les banques sont frileuses. Dans neuf cas sur dix, l'investissement des entreprises se fait sur fonds propres sans crédit bancaire. "Les pôles de compétitivité sont des écosystèmes modernes dans lesquels les acteurs financiers doivent aussi être partie prenante", a insisté Hervé Novelli, le secrétaire d'Etat aux PME, en ouvrant la rencontre.
Mettre de l'argent plus vite, "à l'instant T", c'est possible en Rhône-Alpes où est menée une opération-test depuis une quinzaine de jours par l'intermédiaire d'Oséo. La banque des PME propose ainsi de garantir à hauteur de 50% l'avance financière des banques pour les inciter à se lancer, avant même l'arrivée des subventions. Le nouveau produit pourrait bientôt être étendu aux autres régions, a indiqué Marcel Deruy.

Une autre solution réside dans le capital-investissement, un choix de plus en plus prisé, même si la plupart des PME sont encore réticentes à l'idée d'ouvrir leur capital. Des outils existent donc, mais ils sont souvent méconnus. "On ne savait pas financer l'investissement immatériel il y a vingt ans. Il existe aujourd'hui de nombreux produits : il faut trouver les formules pour qu'ils soient plus connus", a insisté Marcel Deruy. La Drire de Rhône-Alpes et Oséo devraient remettre un rapport fin juin pour faire le point sur la palette de produits existants.
Les patrons de PME attendent aussi beaucoup du Small Business Act en cours de préparation à Bruxelles. "Nos concurrents américains ont un Small Business Act. Or nous sommes sur des marchés mondiaux, donnez-nous les armes pour aller nous battre contre eux", a déclaré David Sourdive, vice-président du pôle Medicen, sous les applaudissements. Bonne nouvelle : la veille, au conseil de compétitivité informel européen de Ljubljana, Hervé Novelli a précisé que le projet de la Commission serait présenté fin juin avant d'être débattu au Conseil européen des ministres en charge de la Compétitivité, le 18 juillet à Versailles.

 

Michel Tendil

2008, année de recadrage

Après le saupoudrage, le recadrage ? En lançant les pôles de compétitivité en 2006, l'Etat s'est engagé à injecter 1,5 milliard d'euros sur trois ans. Le gouvernement a récemment assuré que le dispositif serait pérennisé après 2008. Mais l'audit des 71 pôles confié aux deux cabinets Boston Consulting Group et CM International, attendu pour la fin juin, devrait conduire à des coupes. "Il faut voir là où ça fonctionne mais aussi là où ça peut aller mieux pour conforter ce système", a déclaré, jeudi 17 avril, Luc Chatel, secrétaire d'Etat à l'Industrie, venu visiter le pôle consacré à la chimie environnementale Axelera, basé à Lyon. Interrogé sur l'éventualité d'une perte du label "pôle de compétitivité" pour les mauvais élèves, Luc Chatel s'est contenté de dire que "rien n'est prévu à ce jour". Pourtant Hubert Falco, le secrétaire d'Etat à l'Aménagement du territoire, a récemment fait savoir qu'il y aurait un "toilettage" et que les moyens devaient être "recentrés sur ceux qui ont travaillé".