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Zones franches urbaines - Mieux coordonner l'aide aux entrepreneurs des ZFU

Si le dispositif des zones franches urbaines fonctionne plutôt bien, il peut encore être amélioré. C'est le sens des propositions faites par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ce 25 février. Parmi elles : mieux coordonner l'aide proposée localement aux chefs d'entreprises, améliorer la formation du personnel, accompagner davantage les femmes, faciliter l'accès aux financements.

Les résultats des zones franches urbaines (ZFU) sont globalement positifs. C'est l'une des conclusions du rapport préparé par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et rendu public ce 25 février.
Depuis la mise en place du dispositif par la loi du 14 novembre 1996, cent ZFU ont été créées, dont sept dans les DOM-TOM. Elles ont donné lieu à la création de 243.625 établissements, en majorité des microstructures, et à près de 600.000 emplois, dont 390.000 sont exonérés de charges sociales patronales. Par ailleurs, le taux de survie de ces entreprises est plutôt bon. D'après une étude de l'Insee, sur 29.000 établissements implantés en ZFU de première génération de 1997 à 2001, 32,5% sont encore actifs cinq ans et demi après leur installation. Autre effet bénéfique des ZFU : elles ont permis de diminuer le taux de chômage en zone urbaine sensible (ZUS), qui est revenu en 2008 à son niveau de 2004. Elles favorisent aussi la réduction de l'échec scolaire et la diminution de la délinquance.
Le dispositif est donc efficace, mais il peut encore être amélioré. C'est en tout cas l'avis du CESE. "Il y a un dispositif, il est utile ; pérennisons-le mais faisons en sorte qu'il marche mieux", a ainsi précisé Léon Salto, président de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie du CESE. "Il y a encore beaucoup à faire et il y a urgence", a pour sa part affirmé Fatiha Benatsou, rapporteur du projet d'avis.
Le CESE souligne notamment le manque de coordination entre les différents acteurs publics et privés qui interviennent dans ces zones. "Le problème, c'est qu'il y a une profusion de structures pour accompagner les entreprises alors que notre souci principal est de trouver des clients !", reconnaît ainsi Jean-Richard Requena, dirigeant de la société Inval, implantée en ZFU à Mantes-la-Jolie. Un dirigeant qui a fini par déléguer les relations avec les différentes administrations à un cabinet spécialisé pour se concentrer sur son coeur de métier. Face à cette profusion d'interlocuteurs, le CESE propose la mise en place d'une coordination locale d'aide aux entrepreneurs en ZFU, fédérant les actions autour de tous les acteurs privés et publics nécessaires au développement des entreprises. "Sa mission serait d'aider tous les jeunes créateurs à démarrer une entreprise durable en les orientant par le biais de conseils sur mesure", précise le projet d'avis. "Une association ou une conférence nationale" permettrait par ailleurs de mettre en réseau les structures locales de coordination et de valoriser ces zones et leurs entrepreneurs au niveau national.

 

Se baser sur le concept de bassin de vie pour fixer les frontières des ZFU

Autre préconisation du CESE pour améliorer le dispositif des ZFU : renforcer l'éducation. Il s'agit notamment d'accentuer l'effort de formation au niveau du primaire et du secondaire, de mieux accompagner la sortie du système scolaire obligatoire et de renforcer les dispositifs liés à l'orientation. "Les entreprises de ces quartiers ont du mal à trouver sur place les compétences dont elles ont besoin", a ainsi expliqué Léon Salto. Le conseil souhaite aussi mieux accompagner les femmes dans la démarche de création d'entreprise. "Aujourd'hui, les entrepreneurs sont essentiellement des hommes, a précisé Fatiha Benatsou. Il existe des dispositifs créés par la Commission européenne, mais ils ont été mis en place à titre expérimental et ne sont pas suffisants."
Au-delà de la formation, le CESE a pointé du doigt les difficultés rencontrées par les chefs d'entreprises de ces quartiers en matière de foncier. Il préconise d'améliorer l'aménagement de ces zones, de développer l'investissement public pour acquérir de nouveaux terrains et de faciliter les démarches pour y trouver un emplacement, avec la mise en place de guichet unique virtuel. Le conseil propose aussi de simplifier le zonage en se basant sur le concept de "bassin de vie, tel que défini par l'Insee et la Diact, comme critère pertinent pour fixer les frontières géographiques d'une ZFU". La délimitation serait quant à elle proposée par les communes concernées et validée par décret.
Côté financement, le CESE a également avancé des pistes d'amélioration. "Comme les autres, les chefs d'entreprises de ces zones se heurtent très vite au problème du financement, a expliqué Fatiha Benatsou, mais ils portent en plus une image négative." Le développement de l'aide à la création d'activité sur l'ensemble du territoire des ZUS, avec un meilleur accès au microcrédit, une meilleure utilisation des produits proposés par Oséo et la Caisse des Dépôts (prêt à la création d'entreprise et prêt participatif de développement), grâce une adaptation de ces outils et une meilleure communication, sans oublier un travail sur l'image de la ZFU, permettraient, d'après le CESE, de changer la donne en matière d'accès au financement.

 

"Il faut agir vite"

Globalement, les mesures proposées par le conseil ne sont pas révolutionnaires mais elles ont l'avantage d'être factuelles et applicables rapidement. "Nous ne demandons pas de moyens supplémentaires, a ainsi précisé Fatiha Benitsou. En revanche, il faut agir vite." Des mesures qui nécessitent aussi de prendre le sujet dans son ensemble. "C'est un travail de complémentarité qu'il faut mener en mettant en synergie l'ensemble des moyens : la sécurisation, la rénovation urbaine, l'amélioration de la qualité de vie, les transports... Si on prend en compte l'ensemble de ces problèmes, la mayonnaise peut prendre", a affirmé Léon Salto.
Reste que l'Etat ne semble pas aller dans le même sens. Il a récemment confirmé sa décision de remettre en cause l'une des principales incitations fiscales des ZFU, en instaurant, par l'article 190 de la loi de finances du 27 décembre 2008, un système dégressif pour les exonérations de charges sociales. A partir du 1er janvier 2009, le montant de l'exonération va ainsi décroître au-delà du seuil de 1,4 Smic, et s'éteindra lorsque la rémunération atteindra un seuil de sortie fixé à 2,4 fois le salaire minimum en 2009, puis 2,2 en 2010 et 2 Smic en 2011. L'Etat a toutefois renoncé à mettre fin à la sortie progressive du dispositif. "Le gouvernement n'a pas lâché le morceau pour une économie de seulement 70 millions d'euros !", s'est indigné Fatiha Benitsou. En revanche, sur l'aspect transitoire du dispositif, tout le monde est d'accord. "Tous les élus et autres acteurs insistent sur ce caractère transitoire, détaille le rapporteur du projet d'avis, mais il faut veiller à l'accompagnement des entreprises au moment de la sortie du dispositif." Mais ce moment est encore loin pour certains entrepreneurs. Les entreprises de ZFU de deuxième génération ont jusqu'en 2020 pour profiter des avantages fiscaux.


 

Emilie Zapalski