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Suppression de la TP - Menace sur l'autonomie fiscale des collectivités ?

Lors d'une réunion technique qui s'est déroulée le 25 août à Bercy, les représentants des élus locaux ont vivement critiqué la dernière version en date du projet de remplacement de la taxe professionnelle. La perte de l'autonomie fiscale des régions et des départements et la répartition des impôts locaux entre les collectivités figurent au premier plan de leurs préoccupations.

La mise en œuvre de la cotisation économique territoriale (CET), telle que prévue par l'avant-projet de texte sur la suppression de la taxe professionnelle communiqué début août aux représentants des élus locaux (voir ci-contre notre article du 6 août), pourrait réduire considérablement l'autonomie fiscale des régions et des départements.
Les élus des départements sont très remontés, car la capacité qu'ont les conseils généraux de voter les taux de fiscalité pourrait ne porter demain que sur 12% des recettes, contre 35% aujourd'hui. Ce qui représenterait une réduction des deux tiers de leur autonomie fiscale. Dans un courrier adressé le 21 août à la ministre de l'Economie, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France (ADF), estime que le projet du gouvernement pose sur ce point "un problème de respect des principes constitutionnels" (la lettre du président de l'ADF est à télécharger ci-contre).
L'inquiétude des élus locaux est liée au fait qu'ils n'auraient plus de prise sur l'évolution de la cotisation complémentaire assise sur la valeur ajoutée des entreprises, que les départements et les régions doivent se partager – en principe à hauteur respectivement de 75% et 25%. Cette taxe, qui doit rapporter 10,5 milliards d'euros, sera en effet déterminée au niveau national à un taux compris entre 0 et 1,5% pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 500.000 et 50 millions d'euros, un taux unique de 1,5% étant appliqué au-delà de ce seuil. L'attribution aux départements de la cotisation complémentaire "revient au même que de leur transférer un impôt national, comme la TSCA [taxe spéciale sur les conventions d'assurance]", observe un responsable de l'ADF, pour qui la nouvelle contribution est en fin de compte "quasiment une dotation".
L'Association des régions de France (ARF) est sur la même longueur d'onde. La part que les régions touchent aujourd'hui sur les taxes foncières frappant les ménages et les entreprises leur échapperait tout simplement. En "privant" carrément les conseils régionaux "de toute autonomie fiscale", ce sont "25 ans de décentralisation" qui sont "mis en cause", commente l'un des responsables de l'association. Dans les faits, les élus deviendraient "des jouets de l'administration et du pouvoir de l'Etat".

"Le dossier n'est pas bouclé"

L'ARF ne fait pas du taux national affecté à la cotisation complémentaire un point de blocage absolu. Elle serait même prête à en accepter le principe si les régions conservaient une partie des taxes foncières sur les entreprises d'une part (la future cotisation locale d'activité) et sur les ménages, d'autre part, avec la possibilité pour chacune de fixer les taux.
Du côté des communes et de l'intercommunalité, les élus contestent sans doute moins les modalités de la réforme (lire notre article du 9 juillet), mais ils ne sont pas pour autant entièrement satisfaits. Ils revendiquent le bénéfice d'une partie de la cotisation complémentaire prévue pour les régions et les départements, "de l'ordre de 30% à 50% du produit de la taxe", précise un représentant de l'Association des maires de France. Ces recettes constitueraient en effet un juste retour de la "participation des communes et de leurs groupements à la croissance", explique-t-il. En échange d'une partie de la cotisation complémentaire, les communes et leurs groupements consentiraient à laisser aux départements et aux régions une partie des impôts sur les ménages. Les élus communaux n'y seraient pas opposés.
Si le ministère de l'Economie est allé aussi loin dans la spécialisation des impôts locaux, c'est par souci d'une meilleure péréquation financière, a expliqué lors de la réunion du 25 août le cabinet de Christine Lagarde. Mais pour les représentants des élus locaux, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs : la mise en place de mécanismes de péréquation horizontale sera une étape ultérieure.
Selon l'un des participants à la réunion, le dossier qui doit figurer dans le projet de loi de finances qui sera présentée en Conseil des ministres avant la fin de septembre n'est "pas bouclé". Du côté du ministère de l'Economie, il n'y aurait "pas de blocage de principe" concernant une autre répartition des impôts entre les collectivités. En effet, que la cotisation complémentaire soit répartie aussi au profit des communes et de leurs groupements "ne coûte pas plus cher à l'Etat", analyse ce participant.

 

T.B. / Projets publics
 

 

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