Archives

Avis d'expert - Matthieu Collette (Finance active) : "La gestion de la dette impose sécurité et lisibilité"

Matthieu Collette, responsable de la formation, des études et de la stratégie chez Finance active est intervenu, le 23 mai, sur la gestion de la dette des collectivités lors d'un colloque consacré aux finances locales. Il conseille aux spécialistes locaux de mettre en place des stratégies de couverture du risque des taux des emprunts.  


Localtis : dans le contexte actuel marqué par la crise financière, les collectivités françaises maîtrisent-elles bien les risques liés à leur dette ?
Matthieu Collette
: Dans leur ensemble, elles font preuve d'une gestion plutôt saine de leur dette. En effet, même si les taux moyens ont augmenté depuis trois ans, leurs risques de taux restent maîtrisés. Mais quelques collectivités ne sont pas à l'abri de réelles difficultés. Leur dette présente la particularité d'être très majoritairement composée de produits "structurés". Le principal risque pour les collectivités vient actuellement de ce type de produits. Complexes, ils sont indexés sur un cours de change, sur l'inflation, ou bien encore sur l'évolution comparée de deux taux d'inflation ou de deux taux de change. La dette des collectivités est composée en partie de produits structurés, parce que les banques ont eu tendance ces dernières années à un peu en forcer la vente. Pour cela, elles ont parfaitement su se jouer du cycle électoral. Il faut cependant reconnaître aux responsables financiers des collectivités une part de responsabilité. Ils ont sans doute été attirés par ces produits pour les avantages qu'ils procurent. Grâce à eux, il est en effet possible de réaliser des gains budgétaires. Sur une période de deux, trois, quatre ans et parfois plus, l'emprunteur bénéficie d'un taux bonifié, inférieur au taux du marché. Ceci permet alors aux collectivités de dégager des marges budgétaires, surtout dans un contexte où elles ont vu leurs charges de fonctionnement augmenter. Mais la bonification est la contrepartie d'un risque pris sur la seconde période de l'emprunt. L'emprunt bascule alors à taux variable sous condition, rendant la lisibilité et la prévisibilité plus délicates.

 

Quels produits conseillez-vous ?
Nous incitons nos clients à souscrire des produits "vanille", à taux fixe ou variable et à mettre en place des stratégies de couverture du risque de taux à base de produits dérivés (swaps et options). Si une collectivité emprunte à taux variable, nous l'invitons ainsi à effectuer des opérations de couverture, par exemple, à base d'options. Le but est alors de s'assurer un taux plafond et ainsi de gagner en sécurité et lisibilité.

 

Les responsables financiers sont-ils aujourd'hui bien formés et informés sur la gestion de la dette ?
Au sein de la plupart des collectivités, la gestion de la dette ne constitue qu'une partie du travail quotidien du responsable financier. Les grandes collectivités ont, elles, la possibilité de disposer d'une personne dédiée à la dette. De plus, la plupart des formations à la gestion publique locale sont de type généraliste et sont par conséquent insuffisantes face à la complexification de la gestion de la dette. Mais les choses évoluent dans le bon sens. Pendant longtemps, les banquiers ont été les seuls à détenir l'information. Or, aujourd'hui les responsables financiers locaux sont demandeurs de formations et d'information.

 

Propos recueillis par Thomas Beurey