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Personnes âgées - Maisons de retraite privées : les abus n'ont pas disparu

Une enquête de la DGCCRF sur l'hébergement en maison de retraite montre que près de 60% des établissements présentaient au moins une anomalie quant au respect des règles en vigueur : publicité trompeuse, absence de livret d'accueil, hausses illicites des prix, clauses abusives...

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) publie les résultats d'une enquête sur l'hébergement en maison de retraite, menée dans 311 établissements répartis sur 74 départements. Compte tenu du nombre croissant de personnes dépendantes, le secteur de l'hébergement des personnes âgées fait en effet "l'objet d'une vigilance soutenue de la part des services de la DGCCRF". L'objectif de l'étude était de vérifier "le respect des règles du Code de la consommation et du Code de l'action sociale et des familles (CASF), qui s'imposent aux établissements hébergeant des personnes âgées (Ehpa)". Parmi les points vérifiés figuraient notamment la loyauté des publicités (sur internet, dans les dépliants et dans le livret d'accueil), l'existence de droit d'entrée ou de frais de dossier, l'information des résidents sur les prix, la remise des notes, le respect du taux d'évolution des prix des contrats en cours, la conformité des contrats, l'existence de clauses abusives, l'existence du Conseil de la vie sociale... Point important : l'enquête a concerné des maisons de retraite hébergeant des personnes âgées ne bénéficiant pas, ou seulement partiellement, de l'aide sociale.

Au moins une anomalie dans près de 60% des établissements

Les résultats sont pour le moins mitigés, puisque 58,8% des établissements enquêtés présentaient au moins une anomalie (de gravité toutefois très inégale). Au final, la DGCCRF a délivré 178 avertissements, dressé sept procès-verbaux, prononcé douze injonctions et pris une mesure de police administrative.
Sur la publicité, l'enquête a montré des mentions "susceptibles de constituer des pratiques commerciales trompeuses" : prix mentionnés correspondant à ceux de l'année précédente faute de mise à jour, nombre de lits affiché supérieur à celui autorisé, établissement se présentant de façon erronée comme habilité à l'aide sociale, mise en avant de prestations inexistantes (salon de coiffure, jardin thérapeutique, transport personnalisé...)... La DGCCRF relève qu'"en particulier, les mentions relatives à la prise en charge sanitaire sont parfois largement inexactes" : description erronée de l'équipe de soins, mention de la présence d'un médecin coordonnateur alors que le poste est encore en attente de recrutement... Par ailleurs, six établissements ne remettaient pas de livret d'accueil, contrairement à l'obligation posée par le CASF.

Des contrôles utiles

Sur le volet des coûts, les enquêteurs de la DGCCRF ont notamment constaté que la facturation des droits d'entrée ou des frais de dossier est hétérogène selon les départements (de la gratuité jusqu'à 250 euros), mais que ces frais sont en général bien affichés. De même, l'affichage des prix - prestations d'hébergement, tarifs dépendance et prestations optionnelles - "est correctement réalisé sur l'ensemble du territoire". Ce n'est en revanche pas le cas pour le prix des interventions réalisées par des prestataires extérieurs (esthétique, pédicure, coiffure...). De même, si la très grande majorité des Ehpa augmente ses prix dans la marge autorisée par l'arrêté ministériel, "l'examen des contrats a permis de relever des hausses illicites dans plusieurs établissements". L'examen des contrats a également montré la persistance de certaines clauses abusives, comme le maintien de la facturation de la prestation dépendance durant les périodes d'hospitalisation, la perception d'une somme forfaitaire destinée à la remise en état des lieux après la libération de la chambre ou encore la facturation de la totalité du mois en cas de décès ou de libération de la chambre en cours de mois.
A l'issue de ces contrôles, la DGCCRF considère que "l'effort des professionnels doit surtout porter sur l'affichage des prix des prestations effectuées par des prestataires extérieurs et la rédaction des contrats proposés aux résidents". Elle estime aussi que "des contrôles réguliers semblent la voie la plus efficace pour sensibiliser les responsables d'établissements hébergeant des personnes âgées et pour corriger les pratiques contraires aux exigences du Code de la consommation et du Code de l'action sociale et des familles". Point positif : les contrôles de la DGCCRF se révèlent utiles, puisque "la plupart des observations effectuées les années précédentes ont été suivies d'effets".

Jean-Noël Escudié / PCA