Personnes âgées - Loi Vieillissement : moins de six mois après le vote, les principales mesures sont entrées en vigueur

Marisol Touraine et Pascale Boistard, la secrétaire d'Etat chargée des personnes âgées et de l'autonomie, ont présenté en conseil des ministres, ce 15 juin, une communication sur la mise en œuvre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement (voir notre article ci-contre du 16 décembre 2015). Une communication en forme de premier bilan, un peu moins de six mois après l'entrée en vigueur de la majeure partie des dispositions de la loi.

Deux mois seulement pour le décret d'application de la réforme de l'APA

Un bilan lui-même en forme de satisfecit, puisque "les décrets paraissent selon le calendrier prévu". Ce satisfecit est toutefois loin d'être usurpé, puisque - contrairement à nombre de grands textes législatifs - la loi Vieillissement fait effectivement l'objet d'une mise en œuvre très rapide.
Ainsi, la communication en conseil des ministres rappelle que "cinq mois et demi après le vote de la loi, tous les textes sur la compensation financière et sur l'aide et l'accompagnement à domicile ont été publiés". La réforme de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) - mesure phare de la loi - a donné lieu à un décret du 26 février, qui traite également de la simplification des cartes d'invalidité et de stationnement (voir notre article du 2 mars 2016). Une sorte de record de vitesse, deux mois seulement après le vote de la loi ! 
Même chose pour le volet concernant l'aide à domicile (financée en grand partie par l'APA) : le dernier décret d'application - qui clarifie et unifie les régimes juridiques des services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) - date du 6 juin (voir notre article du 10 juin 2016). Un autre décret, en date du 26 avril, l'avait précédé pour définir le cahier des charges des Saad (voir notre article du 26 avril 2016). Sans oublier la circulaire précisant les modalités de l'expérimentation - déjà largement engagée - des services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad, voir notre article du 8 mars 2016).
On pourrait en dire autant de la conférence des financeurs - autre innovation importante de la loi -, dont le fonctionnement a fait l'objet d'un décret du 26 février dernier (voir notre article du 3 mars 2016).

Adaptation des logements au vieillissement : objectif atteint dès 2016

De son côté, dans un communiqué du 13 juin - à trois jours de la communication en conseil des ministres -, Pascal Boistard avait déjà fait le point sur un autre volet important de la loi : l'adaptation des logements au vieillissement. La secrétaire d'Etat explique notamment que l'engagement d'adaptation de 80.000 logements sur la durée du quinquennat sera atteint dès la fin de 2016. Entre 2012 et 2015, 63.464 adaptations de logements ont ainsi été financées par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) et l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Sur 2016, 18.500 adaptations de logements ont également été financées, sur la base d'un rythme identique à 2015.
Pascale Boistard estime ainsi qu'"entre 2012 et 2016, ce sont ainsi 82.000 logements qui auront été adaptés, contre 50.000 si le rythme était resté identique à celui de 2012".

Il y a un "truc" !

Cette rapidité dans le déploiement des mesures de la loi Vieillissement n'est pas due uniquement à l'engagement personnel des deux ministres et à la mobilisation de leurs services. Elle tient aussi au contexte très particulier de la loi Vieillissement, qui s'est notamment traduit par deux facteurs décisifs pour sa mise en œuvre.
Tout d'abord, le texte s'est révélé très largement consensuel dès sa présentation. Même s'il a été enrichi - modérément - lors de son passage au Parlement, les grandes lignes des principales mesures, à l'image de la réforme de l'APA, n'ont pratiquement pas bougé au fil de la discussion. Une situation qui favorise évidemment la préparation et la finalisation anticipée des textes d'application. 
Ensuite et surtout, de nombreuses mesures importantes du texte - ou permettant sa mise en œuvre - ont été anticipées. La plus emblématique - et la plus inhabituelle en termes budgétaire - est la création anticipée de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa). Celle-ci a été effet été mise en place le 1er avril 2013, soit plus de deux ans et demi avant l'entrée en vigueur la loi Vieillissement qu'elle est chargée de financer... Elle est également perçue depuis cette date, ce qui n'a pas manqué de susciter des polémiques sur le "détournement" des fonds ainsi collectés, dans l'attente de la loi. En 2016, les recettes de la Casa sont estimées à 723 millions d'euros et sont affectées au financement des mesures de la loi, dont plus de 450 millions d'euros pour la réforme de l'APA (voir notre article du 20 novembre 2015).
Au-delà du cas très particulier de la Casa, d'autres mesures de la loi ont également été engagées avant même que le texte soit promulgué. C'est le cas, par exemple, de la conférence des financeurs, expérimentée tout au long de 2015 (voir notre article du 9 février 2016). C'est le cas également de l'adaptation des logements au vieillissement (voir ci-dessus), mais aussi de la rénovation des logements-foyers, que la loi transforme en résidences autonomie. La Cnav et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ont en effet déjà lancé conjointement deux appels à projets, en 2014 et 2015, pour engager la rénovation de ces structures (voir notre article du 15 octobre 2015). Et d'autres mesures de moindre importance, comme l'expérimentation des Spasad, peuvent rallonger la liste.
Au final, la projet de loi Vieillissement restera - en dehors de son intérêt intrinsèque, qui est bien réel - comme un exemple d'"anticipation législative", qui a vu plusieurs dispositions du texte mise en œuvre, au moins partiellement, avant même son adoption. Un exercice dont l'efficacité semble aujourd'hui indéniable, mais qui pourrait poser question aux juristes sur le rôle de la loi et du législateur... 

 

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