Personnes âgées - APA : un décret met en œuvre la mesure phare de la loi Vieillissement
Les départements n'auront finalement pas obtenu le délai de grâce demandé. Au début du mois de février, Laurence Rossignol - alors secrétaire d'Etat chargée de la Famille, de l'Enfance, des Personnes âgées et de l'Autonomie - leur avait opposé une fin de non-recevoir et réaffirmé que la réforme de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) à domicile s'appliquerait bien à compter du 1er mars 2016 (voir notre article ci-contre du 5 février 2016). Le gouvernement a tenu parole avec la publication du décret du 26 février 2016 relatif à la revalorisation et à l'amélioration de l'Allocation personnalisée d'autonomie et simplifiant l'attribution des cartes d'invalidité et de stationnement.
Jusqu'à 400 euros par mois de relèvement des plans d'aide
Le décret n'apporte pas d'éléments nouveaux, mais met en œuvre la réforme de l'APA prévue par la loi du 28 décembre 2015 d'adaptation de la société au vieillissement (voir notre article ci-contre du 16 décembre 2015). Il s'agit, en l'occurrence, de la mesure phare de la loi, dotée d'un financement de 325 millions d'euros, issus des 726 millions d'euros apportés en 2016 par la Contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa).
Le décret prévoit ainsi les dispositions réglementaires nécessaires aux trois composantes principales de la réforme de l'APA : l'augmentation du nombre d'heures d'aide à domicile pour les personnes les plus dépendantes, la réduction de la participation financière des bénéficiaires (ticket modérateur) et l'exonération de toute participation financière pour les personnes à revenus très modestes (bénéficiaires de l'Allocation de solidarité aux personnes âgées).
En pratique, le décret du 26 février augmente les plafonds du plan d'aide respectivement - selon le GIR du bénéficiaire - d'environ 100, 150, 200 et 400 euros. Le montant maximum des plans d'aide se trouve ainsi porté à 1.713,08 euros par mois (au lieu de 1.312,67 euros) pour les personnes classées en GIR 1 (les plus dépendantes) et à 662,95 euros (au lieu de 562,57 euros) pour celles classées en GIR 4. Ces relèvements correspondent à l'équivalent de 5 à 20 heures supplémentaires d'aide à domicile. A ce titre, la mise en œuvre de la réforme de l'APA devrait aussi constituer un coup de pouce appréciable pour le secteur - en sérieuse difficulté - de l'aide à domicile.
Par ailleurs, il devient également possible de dépasser ces plafonds pour financer des solutions de répit pour les proches aidants ou des solutions de relais lorsque l'aidant est hospitalisé. Le décret fixe ainsi le montant des plans d'aide au-delà duquel la situation des bénéficiaires doit faire l'objet d'un réexamen et - le cas échéant - d'une révision de leurs droits pour tenir compte de la revalorisation des plafonds d'aides évoquée plus haut et de la création d'un "droit au répit" pour les proches aidants.
Participation allégée pour les bénéficiaires de l'APA
Comme prévu par la loi, le décret du 26 février allège également la participation des bénéficiaires de l'APA. La formule de calcul - plutôt absconse - reproduite dans l'édition PDF du Journal officiel aboutit à une exonération totale de participation pour les personnes disposant de moins de 800 euros de ressources. Selon l'exemple donné dans le dossier de présentation de loi par le ministère, avec 1.500 euros de ressources mensuelles, une personne en GIR 1 et bénéficiant d'un plan d'aide au maximum verra sa participation passer de 400 à 250 euros, soit une économie de 1.800 euros par an.
Dans le même esprit, le décret supprime la majoration de la participation du bénéficiaire lorsque celui-ci fait appel à un salarié en emploi direct ne répondant pas aux exigences de qualité de qualification ou d'expérience fixées par arrêté (en pratique, le plus souvent un proche). Enfin, et comme prévu, les bénéficiaires de l'Allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa, ex minimum vieillesse) seront exonérés, de droit, de toute participation. Au final, environ 600.000 personnes devraient bénéficier d'une diminution de leur reste à charge.
La prise en compte du répit des aidants
Le décret du 26 février 2016 consacre également un long article à la prise en compte et au financement - par l'APA - des dispositifs de répit et de relais au bénéfice des proches aidants (en lien avec l'impact sur la majoration correspondante du plan d'aide). Le texte prévoit notamment que le besoin de répit de l'aidant est apprécié par l'équipe médicosociale sur la base de référentiels, en même temps que l'évaluation de la personne âgée. Le répit peut se faire par l'appel à différents dispositifs : accueil temporaire de la personne dépendante - en établissement ou en famille d'accueil - relais à domicile ou "tout autre dispositif adapté".
Dans le cas d'une hospitalisation du proche aidant nécessitant un renforcement temporaire des prises en charge professionnelles, le bénéficiaire de l'APA ou son proche aidant doit adresser une demande argumentée au président du conseil départemental.
Cartes à vie pour les bénéficiaires de l'APA des GIR 1 et 2
Le second chapitre du décret se consacre à la simplification de l'attribution des cartes d'invalidité et de stationnement pour les bénéficiaires de l'APA relevant des GIR 1 et 2, en reprenant l'esprit de la réforme déjà mise en œuvre pour les personnes handicapées. Il prévoit en particulier une attribution de plein droit et à titre définitif (sans révision périodique) pour les intéressés, soit par le directeur de la maison départementale des personnes handicapées (carte d'invalidité), soit par le préfet (carte de stationnement).
Reste un dernier aspect du décret qui ne va pas vraiment simplifier la vie des départements : leurs services devront avoir revu, à l'aune de la loi et du décret, la situation de tous les bénéficiaires de l'APA à domicile - soit environ 720.000 personnes - avant le 1er janvier 2017...
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : décret 2016-210 du 26 février 2016 relatif à la revalorisation et à l'amélioration de l'Allocation personnalisée d'autonomie et simplifiant l'attribution des cartes d'invalidité et de stationnement pour leurs bénéficiaires (Journal officiel du 28 février 2016).