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Habitat - Logement des personnes défavorisées : 1,2,3...4 réformes !

Le décret du 2009-1684 du 30 décembre 2009 a mis en place un nouveau système d'agrément pour les organismes exerçant des activités en faveur du logement et de l'hébergement des personnes défavorisées hors secteur HLM. Pris en application de l'article 2 de la loi de mobilisation pour le logement et de lutte contre l'exclusion (Molle), ce texte concerne toutes les structures qui font soit de la maîtrise d'ouvrage, soit de l'ingénierie sociale, financière et technique (assistance pour l'accès et le maintien dans le logement), soit de l'intermédiation et gestion locative (avec quelques exceptions, voir notre article ci-contre du 15 janvier 2010). Le but est simple : permettre à ces structures, qui aident les plus défavorisés à accéder à un logement, d'être clairement identifiées comme des "services sociaux relatifs au logement social", et donc d'être exclues de la directive Services. Bientôt trois mois après la publication de ce décret, tour d'horizon des principales conséquences de cette réforme qui se télescope avec deux (voire trois) autres.

En attente de la circulaire sur la réforme des agréments 

Commençons par les bénéfices attendus de ce nouveau système d'agrément obligatoire : outre le fait d'être clairement exclues de la directive Services, les structures agréées se voient confirmer leurs avantages fiscaux, et reconnaître la possibilité d'accéder à l'ensemble des services de la CGLLS (non seulement la garantie de leurs emprunts, mais également les aides en cas de difficultés financières). Pour entrer dans ce nouveau cadre, toutes les structures qui souhaitent poursuivre leur activité en 2011 doivent obtenir un nouvel agrément avant le 31 décembre 2010. Or, pour l'instant, elles ne peuvent pas vraiment se tourner vers les services déconcentrés de l'Etat : ceux-ci attendent la parution de la circulaire expliquant le décret du 30 décembre 2009. Cette publication est attendue pour avril.
En effet, si les principales conditions pour obtenir ces nouveaux agréments sont inscrites dans la loi et le décret, de nombreux points restent à clarifier : qu'est-ce par exemple que la stabilité financière d'une association qui réhabilite quelques logements tous les 3 ans ? Quels critères seront retenus précisément par les services instructeurs pour distinguer une association "solide financièrement" d'une autre qui l'est moins ? La circulaire devrait répondre à ces questions. En pratique, sur ces questions de solidité financière des organismes demandant l'agrément, les collectivités devraient être très rapidement sollicitées : les associations auront besoin d'engagements financiers écrits de leur part à présenter soit au ministère soit au préfet.

Clarification des relations collectivités publiques-association

C'est ici que la réforme des agréments rejoint une deuxième réforme en cours : suite à la Conférence nationale de la vie associative du 17 décembre dernier, les services du Premier ministre ont publié, le 20 janvier 2010, une circulaire relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations (voir notre article du 22 janvier). Ce texte comprend un nouveau dossier de demande de subventions et un modèle de convention pluri-annuelle. Les préfets doivent "encourager les collectivités territoriales et leurs établissements à l'utiliser et à s'en inspirer". Mais surtout, cette circulaire explique quand précisément les collectivités publiques peuvent se dispenser de passer des marchés publics sans contrevenir à la réglementation européenne relative aux aides d'Etat. Une question distincte de celle de la directive Services.
Cette circulaire doit permettre une meilleure sécurité juridique des relations partenariales entre collectivités publiques et association. Les collectivités ne sont donc plus incitées à transformer systématiquement les associations en prestataires pour les montants supérieurs à 200.000 euros sur 3 ans. Cependant, il ne s'agit que d'une première étape : des discussions sont en cours entre le gouvernement, les représentants des associations et les représentants des collectivités territoriales. Elles devraient aboutir sur un deuxième texte, plus complet, vers l'été.

Troisième réforme : la refondation du secteur de l'hébergement

Enfin, sur la réforme des agréments issue de la loi Molle, s'est greffée à l'automne dernier la "refondation" du secteur de l'hébergement des sans abri menée par le secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu. Pour cette troisième réforme, aucun lien avec Bruxelles : il s'agit d'une décision gouvernementale visant à améliorer l'accueil des sans abris et leur accès au logement (voir notre article ci-contre du 22 mars 2010). L'établissement d'un référentiel prestation-coût devrait en particulier permettre de mieux proportionner le montant des subventions d'Etat aux organismes oeuvrant en faveur des sans-abris, à leur activité.

Si on ignore naturellement ce qui sortira de la combinaison de ces trois réformes, on peut cependant émettre quelques hypothèses. Il est clair que le gouvernement souhaite encourager les structures associatives à se regrouper. Cette position, que les fédérations associatives ne rejettent pas d'emblée, doit permettre une "normalisation" du secteur, et notamment éviter des difficultés financières des trop petites structures. Cependant, à la Fédération des Pact, on souhaite que ces éventuels regroupements soient faits avec discernement et progressivement. Et on indique qu'il serait absurde d'imposer à une structure qui fonctionne bien de prendre en charge, sans précaution, le parc à forts besoins de réhabilitation d'une autre structure en difficulté. 

Autant de questions qui se poseront très concrètement dès que les services déconcentrés commenceront à instruire effectivement les demandes de renouvellement d'agrément. Pour simplifier le tout, ajoutons que les services déconcentrés de l'Etat sont eux aussi en pleine réorganisation après la création le 1er janvier dernier des nouvelles directions départementales... et dans l'attente de la (très) prochaine création des agences régionales de santé !

 

Hélène Lemesle

 

Références : Décret n°2009-1684 du 30 décembre 2009 relatif aux agréments des organismes exerçant des activités en faveur du logement et de l'hébergement des personnes défavorisées ; Circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations : conventions d'objectifs et simplification des démarches relatives aux procédures d'agrément.

 

 

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