Personnes âgées - L'OCDE se penche à son tour sur la dépendance
La dernière publication de l'OCDE - réalisée avec le concours de l'Union européenne - ne saurait être plus en phase avec l'actualité nationale. Intitulée "Besoin d'aide ? : la prestation de service et le financement de la dépendance", elle apporte un éclairage original et une ouverture internationale au débat sur la réforme de la prise en charge de la dépendance. Le choix de ce thème part d'un constat simple : à l'horizon 2050, près de 10% de la population des pays de l'OCDE aura plus de 80 ans (contre 4% aujourd'hui) et ce taux montera même à 15% en Allemagne et 17% au Japon. Conséquence : les dépenses de prise en charge de la dépendance devraient doubler, voire tripler, sur la même période.
Des situations de départ très inégales
Si l'avenir semble ainsi tracé - compte tenu de l'inertie des phénomènes démographiques -, le présent est loin d'offrir un tableau uniforme. La première différence tient à la part du PIB affectée à la prise en charge de la dépendance. Celle-ci est quasi nulle au Portugal (0,1%), alors qu'elle s'élève à 3,6% du PIB en Suède et à 3,5% aux Pays-Bas (pour une moyenne de l'OCDE de 1,5%). La France se situe plutôt dans le haut du classement, derrière également la Norvège, la Finlande, la Suisse, le Danemark, la Belgique et l'Islande. A l'exception notable de la Suisse, les dépenses publiques jouent le rôle principal dans le financement de la prise en charge de la dépendance, plusieurs pays - dont la France - ayant même aujourd'hui un financement quasi exclusivement public. Fruit des politiques mises en oeuvre dans tous les Etats développés, la majorité des prises en charge de la dépendance - qui concernent en moyenne 2,3% de la population - bénéficie désormais à des personnes vivant à domicile.
L'OCDE ne se contente pas de ce constat, au demeurant bien connu. Le rapport propose en effet, dans ses conclusions, un certain nombre de pistes de réflexion ou d'action. Il constate tout d'abord que le besoin de prise en charge a des "implications significatives" en termes de financement et de marché du travail. Il importe donc d'apporter une plus grande attention aux besoins de familles, dans une "approche gagnant-gagnant" (win-win approach). D'un côté, les aidants familiaux - et plus particulièrement les femmes - sont la "colonne vertébrale" de la prise en charge. De l'autre, les pouvoirs publics doivent porter davantage d'attention aux besoins de ces aidants familiaux. L'aide financière peut en être l'une des modalités, mais elle est difficile à adapter à la diversité des situations et peut se révéler contre-productive. Aussi le rapport juge-t-il plus intéressant de payer directement le bénéficiaire de la prise en charge (sur le modèle de l'allocation personnalisée d'autonomie). Mais le soutien aux aidants familiaux doit aussi passer par la possibilité d'un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée et par la mise en œuvre de services de soutien (formation, structures de répit, accompagnement psychologique...).
Des aidants familiaux, mais aussi des professionnels
Pour l'OCDE, la prise en charge de la dépendance ne peut toutefois se réduire aux seuls aidants familiaux. Elle suppose également un recours à des professionnels. Sur ce point, le rapport estime "possible d'attirer davantage de travailleurs vers le secteur de la dépendance et de les fidéliser". Il préconise notamment de renforcer les efforts de recrutement "en élargissant les sources et en sollicitant les aidants formels migrants", à l'image du Canada ou de l'Australie qui délivrent des permis de travail spécifiques pour les salariés du secteur des soins de longue durée. Il sera également nécessaire de revaloriser les rémunérations, afin de fidéliser les professionnels (ce qui a été fait - semble-t-il avec succès - en Allemagne, aux Pays-Bas, en Suède ou en Norvège). Enfin, il faudra améliorer la productivité de ces personnels, à travers différentes mesures comme la réorganisation des tâches ou l'utilisation des TIC.
Enfin, le rapport propose un certain nombre d'orientations sur la question du financement. Sur ce point, certaines suggestions du rapport font très directement écho au débat français sur la dépendance. Ainsi, l'OCDE estime que "l'assurance dépendance privée pourrait jouer un rôle dans certains pays mais, faute d'être rendue obligatoire, elle continuera probablement de ne représenter qu'un marché restreint" (la France étant toutefois le pays le plus avancé en ce domaine, avec un taux de souscription de 15% chez les plus de 40 ans). Pour garder le contrôle des dépenses, le rapport préconise de "mettre en œuvre un universalisme ciblé, c'est-à-dire orienter les prestations dépendance universelles vers ceux qui ont les besoins les plus forts" et de réfléchir à des politiques de financement "plus soucieuses de l'avenir", autrement dit répartissant l'effort de façon plus équitable entre les générations, au lieu de peser surtout sur les jeunes actifs. Dans le même esprit, il conviendra de faciliter l'apparition de nouveaux instruments financiers, notamment pour financer l'accueil en établissement : prêts viagers hypothécaires, dispositifs associant assurance vie et assurance dépendance...