Finances locales - Les sénateurs socialistes dévoilent un "plan d'urgence pour la péréquation"
Le groupe socialiste du Sénat a dévoilé le 29 juin un "plan d'urgence pour la péréquation" destiné à réduire les inégalités de richesses entre les territoires, qui atteignent un écart record de un à mille entre les communes les plus pauvres et les plus riches. Après l'inscription dans la Constitution, sous le gouvernement Raffarin, des principes d'autonomie et de péréquation financière, "aucune avancée n'a eu lieu", estime François Marc, sénateur du Finistère. Pire, la réforme de la taxe professionnelle a été l'occasion d'un "recul dans la péréquation", poursuit-il. Les sénateurs socialistes entendent défendre, à l'inverse, une péréquation "ambitieuse", dont les objectifs seraient fixés par la loi. Ainsi, aucune commune ne devrait avoir un potentiel financier par habitant inférieur à 80% du potentiel financier moyen de sa strate démographique. Pour les départements, ce taux serait de 90% et pour les régions de 95%.
Cet objectif serait d'abord atteint par un renforcement des dotations de péréquation allouées par l'Etat. Aujourd'hui, celles-ci représentent 6,8 milliards d'euros sur un total de 41 milliards de dotations, soit 16,6%. Insuffisante, cette proportion devrait atteindre 25%, considèrent les sénateurs. La mesure serait financée notamment par un relèvement de 10% du taux de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui passerait ainsi de 1,5% à 1,65%. La péréquation financière locale bénéficierait donc d'1,5 milliard d'euros supplémentaires. Les socialistes écartent tout risque pour la compétitivité des entreprises. En effet, le "cadeau" qui leur a été fait à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle, actuellement évalué à plus de 9 milliards d'euros annuels, serait simplement un peu moins important.
Révision des valeurs locatives
S'agissant de la péréquation financière entre les collectivités locales, les sénateurs socialistes maintiennent à 2% l'objectif de redistribution des ressources fiscales fixé par la loi pour le fonds national de péréquation des recettes intercommunales et communales (FNPRIC). Pour la mise en œuvre de ce fonds en 2012, ils proposent des mécanismes qui ne s'écartent pas fondamentalement des propositions faites par les associations d'élus locaux et le Comité des finances locales. Sauf sur un point. Alors que les élus locaux débattent avec passion de la nécessité ou non de prélever les communes et leurs groupements en fonction de leurs strates démographiques (lire notre encadré ci-dessous), ils proposent un mécanisme alternatif. Il s'agirait d'utiliser "un potentiel financier pondéré par une population majorée en fonction de la taille de la commune ou du groupement". Un instrument qui a le mérite d'avoir déjà fait ses preuves, puisqu'il est utilisé dans le calcul de la dotation de base de la dotation globale de fonctionnement.
Quant aux fonds de péréquation départementaux (sur les recettes des droits de mutation à titre onéreux et sur la CVAE) et régionaux (CVAE), ils seraient nettement renforcés.
Les socialistes de la Haute Assemblée préconisent que ces mesures s'inscrivent "dans une réforme équitable du système fiscal local et national, fondée prioritairement sur la révision globale des valeurs locatives ainsi qu'une meilleure prise en compte du revenu réel dans les différents prélèvements fiscaux".
Le plan d'urgence sera remis au candidat socialiste à la présidentielle. Pour François Marc, "il faudra le mettre en œuvre dans l'une des premières lois suivant l'élection".
Les socialistes ont devancé les rapporteurs UMP et centristes des groupes de travail de la commission des finances du Sénat qui planchent sur la péréquation. Ceux-ci dévoileront en effet leurs propositions le 6 juillet prochain.
Thomas Beurey / Projets publics
Gilles Carrez : "il faut des strates" pour la péréquation locale
Faut-il prendre en compte la taille des communes et de leurs groupements dans l'organisation des prélèvements au profit du futur fonds national de péréquation intercommunal ? Oui, répond Gilles Carrez, président du Comité des finances locales (CFL). Le contraire "serait inacceptable", déclare-t-il.
Un farouche débat oppose les maires ruraux et de petites villes aux maires de grandes villes, les uns étant partisans de prélèvements sans strates, les autres étant à l'inverse partisans de prélèvements stratifiés.
Pour Gilles Carrez, la détermination d'"un nombre de strates limité" pourrait constituer une solution, a-t-il indiqué à l'issue de la séance du CFL du 28 juin. Sur la même longueur d'ondes, Charles de Courson, vice-président du CFL, appelle cela le "point d'équilibre". Le CFL ne prendra pas de position définitive avant fin juillet.
T.B.