Congrès de l'ARF - Les régions s'organisent pour devenir propriétaires de leurs trains
Il y a presque deux ans jour pour jour s'étaient tenus à Nantes les états généraux du transport ferroviaire régional. A cette occasion, les régions avaient lancé un appel pour accroître leur rôle dans ce domaine. Deux ans après, réunies dans la même ville pour leur 9e congrès, elles ont pris les devants, à quelques semaines de la présentation de la réforme ferroviaire en Conseil des ministres. Huit présidents de région* ont en effet annoncé, jeudi 19 septembre, la création d'une structure commune pour l'acquisition de matériel ferroviaire roulant. D'autres régions volontaires sont invitées à les rejoindre. "C'est l'affirmation, au-delà de la question des moyens, que les régions françaises souhaitent être de vraies autorités organisatrices", a déclaré Jacques Auxiette, président des Pays de la Loire et responsable des transports à l'Association des régions de France (ARF), lors d'une conférence de presse. Selon l'hôte de ces rencontres, les statuts de cette association de "préfiguration", à laquelle adhéreront également le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) et l'ARF, seront déposés d'ici la fin de l'année.
Pour les régions, cette association sera de nature à augmenter "leur capacité à agir". Elle leur permettra "d'élaborer une stratégie coordonnée d'achat des matériels", d'améliorer les relations avec les industriels et, le cas échéant, de se porter propriétaires. Les régions soulignent que la fréquentation des Trains express régionaux (TER) a crû de 53% ces dix dernières années. Les 5.700 TER et les 6.200 Transiliens transportent chaque jour 3,9 millions de passagers. Mais elles n'ont pas la main sur les commandes, le choix du matériel... "Ces trains, on les paye, mais ils appartiennent à la SNCF", a rappelé Alain Rousset, alors que depuis la décentralisation de 2002, les régions ont acheté 1.500 trains, pour plus de 5,8 milliards d'euros. Selon l'ARF, les commandes en cours représentent 2,5 milliards d'euros. "Les frais de siège de la SNCF (l'ensemble des charges liées au siège de la société, ndlr) représentent 20 à 25%, nous ne savons pas à quoi ils servent", a tancé Alain Rousset, pour illustrer les économies susceptibles d'être dégagées.
"SNCF bashing"
A travers ce geste, les régions prennent aussi position sur la réforme ferroviaire en cours. "Le gouvernement peut encore améliorer le texte", a déclaré Jacques Auxiette lors d'une table ronde organisée en fin de journée. Le projet de loi, transmis à l'Autorité de la concurrence et au Conseil d'Etat, devrait être présenté en Conseil des ministres mi-octobre pour un examen au Parlement début 2014. Mais onze ans après la régionalisation du transport ferroviaire, il n'est pas à la hauteur des ambitions des régions. Celles-ci réclament "une nouvelle étape confirmant la responsabilité de cette politique ferroviaire", a insisté Jacques Auxiette.
Invité du congrès, Guillaume Pépy a refusé la "logique de l'affrontement" et dénoncé le "SNCF bashing" dont l'opérateur est souvent l'objet. Le patron de la SNCF s'est montré favorable aux revendications des régions, en particulier sur la propriété des trains, soulignant le travail accompli depuis le début de la régionalisation : "Vous avez transformé des omnibus moribonds en un service de proximité moderne." Mais il a aussi mis en garde les régions placées dans un "contexte hyper contraint". "Vous n'avez pas les ressources pour faire face à votre étranglement budgétaire. Vos compétences transport sont encore partagées", a-t-il fait remarquer, renvoyant au deuxième volet de la réforme sur la décentralisation attendu début 2014.
Le congrès de l'ARF se poursuit vendredi 20 septembre, sur le thème de la décentralisation.
Michel Tendil, à Nantes
*Pays de la Loire, Rhône-Alpes, Bourgogne, Picardie, Ile-de-France, Aquitaine, Auvergne et Paca.