Social - Les demandes d'asile à nouveau en hausse en 2009
L'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) a publié, le 8 avril, son rapport d'activité pour l'année 2009. Celui-ci confirme la tendance qui s'était fait jour en 2008 (voir notre article ci-contre du 22 juin 2009) : après une hausse de 20% en 2008, le nombre de demandes d'asile a progressé à nouveau de 12% l'an dernier. Au terme de trois années de baisse entre 2005 et 2007, ces demandes viennent donc de connaître une brusque progression de 35% en deux ans. L'an dernier, 47.686 personnes ont ainsi demandé l'asile à la France, contre 42.000 en 2008 et moins de 35.000 en 2007. Cette évolution fait de la France le second pays de destination des demandeurs d'asile, derrière les Etats-Unis, mais loin devant l'Allemagne (33.033 demandes en 2009) et le Royaume-Uni (29.845 demandes). Il faut toutefois rappeler que la demande d'asile est par essence cyclique, en lien direct avec la situation dans les zones de conflit ou de tensions. Le nombre de primo-demandes d'asile en France est ainsi monté jusqu'à 61.400 en 1989 avant de retomber à 17.400 en 1996, puis de remonter à 52.200 en 2003...
L'évolution enregistrée en 2009 est par ailleurs très différente de celle observée l'année précédente. Ainsi que l'explique Jean Gaeremynck, le président du conseil d'administration de l'Ofpra, "contrairement aux années précédentes, la croissance de la demande en 2009 est essentiellement imputable à l'augmentation du nombre de premières demandes". En revanche, les principales autres composantes de la demande d'asile - demandes de réexamen, mineurs accompagnants ou asile à la frontière - sont stables ou orientées à la baisse. Les demandes d'asile de mineurs isolés, qui posent de nombreux problèmes aux départements (voir nos articles ci-contre du 24 septembre et du 19 novembre 2009), sont toutefois en hausse, passant de 410 en 2008 à 447 en 2009. Cette légère augmentation fait suite à plusieurs années consécutives de baisse. La montée en charge des primo-demandes n'est pas sans effet sur le fonctionnement de l'Ofpra, puisque celles-ci sont les plus lourdes en termes d'instruction. L'autre évolution significative entre 2008 et 2009 concerne l'origine des primo-demandeurs. Les principaux pays d'origine sont en effet l'ensemble Serbie et Kosovo (26% du total en 2009 et +67% par rapport à 2008), le Sri Lanka (19,6% et +33%), l'Arménie (17,2% et +50%), la République démocratique du Congo (15,8% et +10,5%), la Russie (14,7% et -6,7%), la Turquie (13,7% et -8%) et la Chine (11,5% et +92%). En 2008, les trois principaux pays d'origine étaient la Russie (Tchétchénie et nord du Caucase), suivie de l'ensemble Serbie et Kosovo, et de la Turquie (kurdes).
La hausse des demandes observée depuis deux ans met le dispositif d'accueil en difficulté (voir notre article ci-contre du 24 novembre 2009). Les 21.000 places disponibles en centres d'accueil de demandeurs d'asile (Cada) sont en effet insuffisantes pour faire face à l'accueil des demandeurs. Les associations sont donc obligées de recourir de plus en plus souvent à des placements en hôtel avec des coûts conséquents pour le budget de l'Etat. La situation est encore compliquée par l'allongement des délais d'instruction, mais aussi par un récent arrêt du Conseil d'Etat sur la procédure de réadmission dite "Dublin" (directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003). Cette procédure européenne amenait la France à ne pas proposer de logement aux demandeurs d'asile déjà enregistrés dans un autre Etat de l'Union. Mais le Conseil d'Etat (arrêt 332631 du 20 octobre 2009, Youri et Anna M.) a considéré que l'obligation d'assurer des "conditions matérielles décentes" incluait l'obligation d'hébergement.
Jean-Noël Escudié / PCA