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Droit - Les collectivités territoriales : un nouvel acteur des télécoms ?

"Sur le plan réglementaire et juridique, les collectivités locales sont désormais des acteurs incontournables du secteur des télécommunications, notamment pour l'aménagement des territoires. Elles ne peuvent plus rester passives et se contenter d'attendre. Elles seules sont capables d'agir sur le rééquilibrage entre zones urbaines et rurales", a plaidé l'avocat Frédéric Forster, spécialiste de la question au cabinet Alain Bensoussan, à l'occasion d'un petit-déjeuner thématique, ce 12 mai. Partant du bilan "très positif" dressé fin 2008 par l'Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) sur les réseaux d'initiative publique (RIP), l'avocat a d'abord montré les différentes formes d'intervention des acteurs publics et leur impact sur la concurrence. "L'écrasante majorité des collectivités a retenu la délégation de service public concessive pour agir. La dernière forme à la mode est actuellement le contrat de partenariat public-privé (PPP). Elle est en train de se développer mais n'atteindra vraisemblablement jamais le même succès que la DSP", a-t-il constaté. L'avocat a ensuite détaillé le contexte juridique. Les pouvoirs d'intervention des collectivités dans le secteur des télécoms ont été renforcés par la loi pour la confiance en l'économie numérique (LCEN) puis par la réforme des communications électroniques intervenue le 9 juillet 2004. "L'article L.1425-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) est fondamental car c'est sur cette base que les acteurs publics peuvent soit construire et exploiter des réseaux, soit fournir des services", a rappelé Frédéric Forster. Dernière en date, la proposition de loi du sénateur Xavier Pintat, adoptée en décembre 2009, met les collectivités au cœur de la création et de la mise en œuvre de schémas directeurs territoriaux : "L'article L.1425-2 du CGCT et les décrets "connaissance des réseaux" et "connaissance des services" qui en découlent permettent de mieux coordonner les initiatives privées et publiques en évitant des actions désordonnées sur le territoire", a-t-il commenté.

 

Financement public des réseaux

La question est désormais celle de la montée en débit, du déploiement de la fibre optique jusqu'à l'abonné et de son financement, "car le nerf de la guerre, c'est l'argent !". Sur ce point, les lignes directrices communautaires du 17 septembre 2009 encadrent précisément le périmètre des aides d'Etat et, par conséquent, des subventions des collectivités. Institué par la loi Pintat, le fonds d'aménagement numérique des territoires est en train de se mettre en place. "Il devra respecter ces lignes directrices européennes au risque de voir l'annulation des aides publiques", a prévenu Frédéric Forster. "Le partenariat public-privé est un moyen d'agir si la collectivité construit ou affine son projet en avançant avec son partenaire. Sa durée est équivalente à une procédure de DSP, car il faut passer, dans un cas, plus de temps avant, et dans l'autre, plus de temps après la signature du contrat", a repris l'avocat. "Les trois premiers PPP ont été remporté par France Télécom (en Auvergne, Gironde et Languedoc-Roussillon). Ce mode d'intervention était surtout privilégié par l'opérateur historique à un moment où il s'interdisait de répondre à des DSP. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les deux derniers contrats de partenariat (Finistère et Hautes-Pyrénées) ont, par ailleurs, été décrochés par Axione", a précisé un représentant de l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca). "Au cabinet, nous voyons désormais passer de nombreux appels à projets pour trouver la meilleure façon de pérenniser l'action des collectivités dans le secteur : DSP, partenariat, réinvestissement... Indépendamment des questions techniques, les collectivités se posent des questions", a conclu maître Forster.

 

Luc Derriano / EVS