Fonction publique territoriale - Les centres de gestion face à la "concurrence" intercommunale
Malgré le renforcement significatif de leurs compétences auquel elle conduit, la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale ne satisfait pas complètement les centres de gestion. Ceux-ci se montrent même inquiets, notamment en raison du développement de l'intercommunalité, qu'ils considèrent comme un concurrent sérieux en matière de gestion des ressources humaines. Les centres de gestion voient en effet dans la mutualisation des services entre les communes et leurs groupements - encouragée par le gouvernement depuis que la Cour des comptes a pointé du doigt d'insuffisantes économies d'échelle - une forme de remise en cause de leurs compétences. Cette inquiétude est largement apparue dans lors d'un séminaire organisé le 15 mars à Paris par la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG), intitulé "Intercommunalité et décentralisation, quelle place pour les centres de gestion ?".
Les centres de gestion relèvent en premier lieu que la croissance des effectifs des structures intercommunales, du fait de la possibilité de se désaffilier dès qu'un seuil de 300 agents employés est franchi, a pour conséquence directe de réduire leur budget. Le mouvement intercommunal pourrait même entraîner les communes membres dans son sillage : "A une gestion experte des ressources humaines par les centres, les collectivités pourraient opter pour une gestion de proximité assurée par leur intercommunalité", estime la FNCDG dans un document d'étude diffusé à l'occasion de cette journée d'échanges.
Des missions facultatives à développer
Du point de vue des centres de gestion, la loi relative à la fonction publique territoriale n'arrange en rien les choses. Son article 29 donne en effet aux intercommunalités la possibilité de créer des comités techniques paritaires compétents à la fois pour les personnels de cet établissement et pour ceux des communes adhérentes, lorsque l'effectif global concerné est au moins égal à 50 agents.
Pour la fédération, "cette disposition contrevient de manière significative aux attributions reconnues par les lois de décentralisation de 1984 aux centres de gestion, lesquels ont, par nature, une compétence globale et mutualiste de gestion des ressources humaines au sein de la fonction publique territoriale".
Lors des débats sur le projet de loi réformant la fonction publique territoriale, la FNCDG avait proposé par la voix de son président, le député du Val-de-Marne Jacques Alain Bénisti, un relèvement du seuil d'affiliation obligatoire aux centres de gestion (actuellement fixé à 350 agents titulaires pour les collectivités locales et 300 agents pour les EPCI à fiscalité propre) et la définition dans la loi d'un socle commun de prestations pour toutes les collectivités et leurs établissements publics. On connaît la suite : les parlementaires n'ont pas retenu cette solution.
A défaut d'une garantie inscrite dans le marbre, les centres de gestion "doivent développer sans complexe leurs missions facultatives en s'appuyant notamment sur les centres régionaux coordonnateurs prévus par la loi", assure le directeur du centre de gestion de la Seine-Maritime, Alain Maillet. Ils peuvent notamment s'inspirer de l'exemple du centre de gestion des Côtes-d'Armor, qui a créé un service, quasiment unique, d'accompagnement des EPCI pour le transfert des personnels.
Thomas Beurey / Projets publics
Transfert des personnels de l'Etat : ce que proposent les centres de gestion
Dans le cadre de la décentralisation de 130.000 agents de l'Etat aux départements et régions, "les centres de gestion ont un rôle majeur à jouer à travers une véritable offre transversale de compétences", estime Jacques Alain Bénisti, président de la Fédération nationale des centres de gestion.
C'est sur une base facultative que les centres de gestion proposent leurs services aux collectivités d'accueil des agents transférés, puisque l'affiliation à un centre de gestion n'est obligatoire que pour les collectivités de moins de 350 agents titulaires. Mais la plupart des conseils régionaux et généraux ont recours aux centres de gestion, pour une palette de services dont l'étendue diffère toutefois d'un territoire à un autre.
Pour l'organisation des concours, les centres de gestion sont massivement sollicités. Afin d'assurer cette mission de manière optimale, les centres de gestion de treize régions ont défini entre eux une coopération à l'échelle régionale. Les concours d'agent technique et d'agent de maîtrise des établissements d'enseignement sont donc communs à l'ensemble des départements constitutifs de ces régions.
En matière de santé et de sécurité au travail, certaines collectivités, telles que le conseil général des Alpes-maritimes, ont recours par voie de convention aux services des centres de gestion. Dans ces domaines comme dans ceux de l'hygiène et de la sécurité, de nouvelles problématiques apparaissent. Les conseils régionaux et généraux doivent aujourd'hui prendre en compte la sécurité des agents TOS au sein des collèges, alors que jusqu'à présent, ils mettaient l'accent, de par leurs responsabilités, sur la sécurité des élèves.
Quant à la possibilité de recourir aux services des centres de gestion uniquement pour les personnels ouvriers et de service, autorisée par l'article 15 de la loi relative à la fonction publique territoriale, il semble qu'elle soit très peu utilisée.
Les nouveaux défis posés par les transferts de personnels ne devraient pas bouleverser les relations entre les centres de gestion et les collectivités locales, mais "les approfondir", conclut Ambroise Georget, directeur des services extérieurs du centre de gestion des Côtes-d'Armor.
T.B.