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PLF 2015 / Insertion - Le Sénat s'interroge sur le nombre de bénéficiaires du RSA activité

A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2015, Philippe Mouiller, sénateur (UMP) des Deux-Sèvres et rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires sociales sur les crédits de la mission "Solidarité, insertion et égalité des chances", s'inquiète d'un risque de sous-évaluation des dépenses relatives au RSA activité.
En l'occurrence, l'inquiétude porte moins sur une sous-dotation budgétaire récurrente, sinon délibérée - comme dans le cas des crédits de l'aide médicale d'Etat (AME) - que sur l'incertitude régnant sur les perspectives d'évolution du nombre de bénéficiaires de cette prestation.

Une sous-consommation chronique

Le rapporteur rappelle en effet que le RSA activité fait, depuis sa mise en place en 2009, l'objet d'une sous-consommation chronique en raison "des lacunes indéniables qui expliquent une montée en charge limitée du dispositif depuis sa création". Selon Philippe Mouiller, "68% des bénéficiaires potentiels du RSA activité continuent de ne pas avoir recours à la prestation. Le niveau effectif des dépenses est donc très largement inférieur à ce qu'il pourrait être". On peut en dire autant du RSA jeunes, qui comptait seulement 7.882 titulaires à la fin du mois de mars 2014. Le nombre prévisionnel de bénéficiaires du RSA activité pour 2014 est ainsi de 761.000, soit moins qu'en 2013 (772.000) et à peine un peu plus qu'en 2012 (721.000).
Mais deux éléments pourraient changer la donne en 2015. Le premier est la revalorisation exceptionnelle du RSA socle (voir notre article ci-contre du 2 septembre 2014). En relevant le plafond d'accès à la prestation, elle a pour effet d'augmenter le nombre de bénéficiaires potentiels (comme ce fut le cas avec la revalorisation de l'AAH durant le précédent quinquennat). Or une partie des bénéficiaires du RSA perçoit à la fois le RSA socle et le RSA activité. Plus de 250.000 allocataires sont aujourd'hui dans ce cas.

Quel impact pour les "Cent mille rendez-vous des droits" ?

Le second élément est le lancement des "Cent mille rendez-vous des droits", prévus par la convention d'objectifs et de gestion (COG) signée entre la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) et l'Etat. Ceux-ci ont pour objectif d'aller au-devant de personnes qui n'ont pas conscience de certains droits sociaux, pour lesquels ils remplissent pourtant toutes les conditions d'accès. Or, parmi les différentes prestations versées par les CAF, la plus méconnue de ses bénéficiaires potentiels est précisément le RSA activité.
Jusqu'à présent, les gouvernements successifs se sont bien gardé de lancer des campagnes d'information sur le RSA activité. Or les "Cent mille rendez-vous des droits" ne sont rien d'autre qu'une campagne d'information. Sans oublier que l'approche de la fusion de la prime pour l'emploi (PPE) avec le RSA activité - annoncée pour le début 2016 - va mettre un coup de projecteur sur cette dernière prestation dans les mois précédant la réforme...
Le gouvernement ne semble pas ignorer les effets possibles de ce contexte particulier. Ainsi, il a relevé à 830.000 son estimation du nombre de bénéficiaires du RSA activité en 2015, soit une progression de 9% par rapport à cette année. Mais le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales juge ce relèvement manifestement sous-évalué. S'appuyant notamment sur le témoignage des associations auditionnées, il estime "qu'une telle politique [d'information autour du RSA activité, ndlr] aura nécessairement un impact substantiel sur les dépenses de l'Etat. Or celui-ci n'est à aucun moment pris en compte dans les prévisions d'augmentation des dépenses à trois ans présentées dans le projet annuel de performances".

Références : Projet de loi de finances pour 2015, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 18 novembre 2014, examiné en séance publique au Sénat du 20 novembre au 9 décembre 2014.

Jean-Noël Escudié / PCA